Dès son plus jeune âge il est assoiffé de justice sociale
et encore au lycée il crée avec l’un de ses amis les Jeunesses
Socialistes de Provins.
Après son bachot il commence des études de droit et de philosophie
tout en travaillant comme instituteur à Montereau.
Mais la guerre arrive, Roger, sursitaire, est appelé sous les drapeaux.
La fin de la guerre le retrouve à Foix où il travaille un moment
dans les bureaux de l’armée.
Quand les Allemands envahissent la zône sud il perd son travail. Il se
retrouve à Toulouse où il apprend le métier de typographe.
Ses parents s’étant installés dans un village des environs de
Toulouse, il les rejoint et y travaille comme ouvrier agricole.
Il passe ses loisirs à faire de la peinture.C’est à cette époque
qu’il commence à chercher un sens à sa vie. Il se plonge dans
l’étude de la Bible evidemment en français, et effectue même
une retraite dans un couvent.
La guerre enfin terminée, son père lui propose de reprendre des
études et quel n’est pas son étonnement quand Roger lui déclare
qu’il veut devenir rabbin. Il se sent en effet une responsabilité envers
les survivants de la Shoah et décide de leur consacrer sa vie.
Le Grand rabbin Liber hésite un peu à admettre un élève de 29 ans qui sait à peine lire l’hébreu et ne connaît pas grand chose au judaïsme. Il accepte cependant de faire l’expérience et de l’accepter. A cet époque quelques jeunes Polonais rescapés des camps habitent à l’École rabbinique et le grand rabbin Liber met Roger en contact avec Ephraïm Rozen. Ephraïm se charge d’enseigner à Roger les bases nécessaires à des études rabbiniques et Roger devient le professeur de français d’Ephraïm . Ce sont tous les deux d’excellents élèves et leur amitié ne se démentira jamais.
A sa sortie de l’École, Roger a acquis toutes les connaissances qui doivent faire de lui un rabbin digne de ce nom. Jeune marié, il est nommé rabbin de Sarreguemines. Cette petite communauté n’avait pas eu de rabbin depuis fort longtemps et il lui faut la réorganiser entièrement. Mais il se rend vite compte que sa véritable vocation est auprès des jeunes ; aussi quant René Sirat décide de créer l’Aumônerie de la jeunesse, il accepte avec enthousiasme de devenir aumônier de la jeunesse du Sud de la France, Jean Kling s’occupant de Centre et René du Nord. Leur collaboration a été sans faille pendant de nombreuses années. Ephraïm, Jean et René sont jusqu’à ce jour mes petits frères.
Nous nous installons à Montpellier où l’Université attirait
de nombreux étudiants juifs du bassin méditerranéen. Roger,
arrivé seul, prend contact avec l’Union des Étudiants, y organise
des cours, des sorties et passe une grande partie de son temps avec eux. Notre
famille le rejoint enfin. Très vite il se rend compte de l’utilité
d’un centre communautaire et, avec l’aide du FSJU, il loue une grande maison
près des facultés. Avec l’aide des étudiants nous mettrons
cette maison en état pour la rendre apte à servir de centre pour
tous. Certains étudiants désirent manger cacher.Quelques uns mangent
chez nous mais ce n’est pas une solution, nous parvenons enfin à créer
une cantine cacher qui fonctionne avec une vingtaine de jeunes. Le vendredi
soir nous sommes beaucoup plus nombreux. Il organise également des séminaires
de Pessach, soit au centre même, soit aux environs de Montpellier, et
chose beaucoup plus révolutionnaire, des soirées dansantes le
samedi soir afin que nos jeunes ne fréquentent pas les boîtes de
nuit de la ville.
Presque tous les soirs de nombreux étudiants suivent des cours de Talmud,
d’hébreu et de pensées juives et tous les mois les conférenciers
les plus en renom font une conférence au Centre. Ces conférences
sont suivies non seulement par les étudiants, mais par les membres de
la communauté et par de nombreux professeurs de l’université .
Il dirige le Talmud Torah de Montpellier et se rend toutes les semaines à
Sète, Nîmes et Béziers où il a aussi crée
des talmudei-torah. Quand après six ans de ce travail nous pensons que
nous devenons un peu vieux et qu’il est peut être temps de consacrer plus
de temps à nos enfants, nous pouvons partir tranquilles, la relève
est assurée par un couple d’étudiants.
Après un an nous émigrons une fois de plus pour Sarcelles où il est impossible de travailler sérieusement. Des membres de la communauté ne cessent de mettre des bâtons dans les roues du rabbin et il sont soutenus par certains membres du Consistoire de Paris.
Hélas en février 1986, la maladie l’emporte par une nuit d’orage le jour de la mort de Moshé Rabbeinou (Moïse). Nous n’avons pas eu la joie de vieillir ensemble mais il m’a laissé une merveilleuse famille. Il a é té mon maître, mon ami et m’a tout simplement appris à vivre.