Mon cher Jean,

Jean Kahn et le G.R. Warschawski

Plus de 40 années d'amitié, un quart de siècle de collaboration justifient mon désir de m'adresser à toi au moment où tu seras honoré comme aucun responsable communautaire ne l'a jamais été. Ne pouvant être auprès de toi en France lorsqu'on te remettra les insignes de Grand officier de la Légion d'Honneur, permets-moi de te dire par cette voie combien je  me sens proche de toi et de tous les tiens, et combien je partagerai votre joie et votre émotion lorsque celui qui a marqué de son empreinte la communauté juive française verra le chef de l'État reconnaître ses mérites exceptionnels.

En remontant les nombreuses années que tu as consacrées à la défense du judaïsme, je te vois franchir les étapes qui t'ont amené à être le responsable juif le plus connu en France. Ton curriculum vitae nous laisse stupéfaits. Après tes études de Droit et ton passage au Barreau, tu reprends l'affaire de ta famille et en même temps tu te consacreras aux "affaires" de la communauté, dont tu seras le président pendant près de vingt ans. Tu as créé la A.S. Menora, club sportif qui a regroupé des jeunes strasbourgeois et beaucoup de rapatriés d'Afrique du Nord. C'est à partir de ce moment que commencera une vie entièrement consacrée à ta communauté qui, de Strasbourg, s'étendra à l'Europe entière.

Membre de la Commission administrative de Strasbourg, tu en deviens vite le président.
Au bout de vingt ans, tu entres alors au Consistoire du Bas-Rhin, dont tu assures encore la présidence.

Remise de la décoration à l'Elysée - 15 mai 2001 © G. Roos

Au cours des dix dernières années, cumulant cette fonction avec celle de la présidence du Consistoire central à laquelle tu as été élu en 1995,  ton action s'est étendue dans tous les domaines. Tu auras été président du CRIF (Conseil Représentatif des Institutions juives de France) puis du Congrès Juif Européen. J'ai eu le plaisir de reconnaître ton activité dans la communauté en te conférant le titre de "'Haver", avec l'ensemble de mes collègues.

Dans ta carrière au service de la communauté juive, tu n'oublieras pas tes années de scoutisme E.I.F., et tu sauras attirer beaucoup de tes camarades dans ce travail éducatif.  Ni ton âge,  ni tes problèmes de santé ne sauront diminuer  ton dynamisme et ta prise de conscience.

Président de la Communauté de Strasbourg, Président du Consistoire régional puis du Consistoire central, tes fonctions de  responsabilité te mettent en contact avec toutes  les organisations juives nationales, européennes et même mondiales.

Tu  seras rapidement élu dans toutes les institutions avant d'en assumer la présidence. Je ne citerai que quelques-uns uns des organismes dont tu feras partie : tu seras président du CRIF français puis du Congrès Juif Européen. A partir de 1991, tu rencontreras les plus hautes personnalités du judaïsme mondial, et tu ajouteras à ton activité cultuelle et culturelle un extraordinaire palmarès au niveau politique, tout en cumulant la présidence du Consistoire central avec celle Consistoire israélite du Bas-Rhin.

Aucun aspect communautaire concernant de près ou de loin le judaïsme ne te sera étranger. Tu voyageras à travers le monde pour participer aux rencontres.

La  défense des Droits de l'Homme partout en Europe sera un autre volet de ton action, et tu seras en 1996 nommé Président de la Commission consultative européenne des Droits de l'Homme, et  tu seras avec ceux qui luttent contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie.

Au cours de la même cérémonie, le Président de la République a remis au Grand Rabbin de France, Monsieur Joseph Sitruk (qui fut rabbin à Strasbourg), les insignes d'officier dans l'ordre de la Légion d'Honneur ) - Ici, J. Sitruk avec Mgr. Lustiger, Archevêque de Paris

Le Front National, avec son chef Jean-Marie le Pen chercheront à t'abattre, mais sans succès.

L'Affaire du Carmel d'Auschwitz ne te laissera pas indifférent.

Lorsqu'en 1994 fut créée une commission consultative contre le racisme et la xénophobie,  tu seras nommé à sa tête  à l'unanimité, par tous  les ministres des Affaires étrangères de l'Europe. Tu accomplis un travail épuisant.

Combien de fois tes amis t'avaient-ils mis en garde contre les risques menaçant ta santé à cause de l'excès de ton travail surhumain, qui te conduisait à travers le monde? En vain !  Même lorsque tu seras atteint par la maladie, tu ne t'avoueras jamais vaincu, et jusqu'aujourd'hui tu continues à lutter pour le judaïsme, et contre toute forme de discrimination et d'antisémitisme.

Juif français d'Alsace, depuis de nombreuses générations, tu ne pouvais rester indifférent au destin d'Israël et ton amour  pour l'État juif t'a amené  il y a de années à œuvrer en faveur de l'Université de Haïfa , qui t'a accordé  le titre de Doctor Honoris Causa, pour reconnaître ta collaboration dans l'action humanitaire sans frontières en faveur des immigrants intellectuels des pays de l'Est.

Je dois m'arrêter car il y aurait tant de choses à te dire. Depuis le jour  où je t'ai remis le diplôme de 'Haver, tu as gravi tous les échelons  et tu es aujourd'hui un exemple de juif  engagé  dans sa communauté et dans la cité. Quoi d'étonnant qu'en l'espace de quinze ans tu ais franchi tous les échelons dans l'ordre de la Légion d'Honneur, depuis ta nomination comme Chevalier en 1984 jusqu'à cette plaque de Grand Officier que je te souhaite de porter longtemps avec Nicole, Daniel, François et tes petits-enfants.

C'est mon souhait affectueux et celui de tous tes amis, Mazal Tov ! Ton ami Max Warschawski.

© A . S . I . J . A .