Je suis né le 29 août 1920 à Mulhouse, sous le nom de Louis-Lazare
JACOB (Jean-Louis JAUBERT à partir de 1943 !).
Je suis le fils de Hippolyte JACOB, originaire de Benfeld, et de Suzanne SCHWAB,
native de Wintzenheim. Ma famille habite Colmar, où mon père exerce
la profession d'expert-comptable, jusqu'à l'arrivée des Allemands.
Ensuite, pendant plus d'un an, je suis avec mes parents à Massiac (Cantal).
En 1941, les chantiers de jeunesse étant obligatoires, je choisis le
groupement de "Jeunesse et Montagne" à Entremont (Savoie),
et c'est au sein de ce Mouvement de jeunesse que je monte une équipe
de chanteurs (dans le style Ray Ventura).
A ma démobilisation en 1942, je rejoins les Compagnons de la Musique
à Lyon (quartier du Point du Jour).
Et ensuite
Les Compagnons de la Chanson
En 1944 les Compagnons de la Musique deviennent les Compagnons de la Chanson,
et donnent l'un de leurs premiers récitals parisiens à la Comédie
française. Edith Piaf est la vedette de cette soirée ;
c'est là qu'elle les découvre et qu'elle s'enthousiasme pour leur
qualité vocale. Elle décide de les prendre en main et de moderniser
leur répertoire.
A la Libération, la formation s'engage sous les drapeaux en tant que
chorale du théâtre aux Armées, et suit les troupes de la
première armée du Général de Lattre qui se bat encore
dans le Nord de la France. Le groupe prend sa forme définitive : Fred
Mella, doté d'une voix exceptionnelle, qui sera le soliste, Jean-Louis
Jaubert, Guy Bourguignon, Marc Herrand, Jean Albert,
Jo Frachon, Gérard Sabbat et Hubert Lancelot. En
septembre 46, la liste est au complet avec l'arrivée de Paul Buissonneau.
Au printemps 1946, Piaf décide de chanter avec eux les Trois cloches,
oeuvre d'un auteur suisse, Gilles. Grâce à cette collaboration,
les Compagnons deviennent des vedettes du jour au lendemain (le titre se vend
à un million d'exemplaires). Cette même année ils tounent
un film, Neuf garçons, un coeur. Avec Piaf, ils enregistrent quelques
succès : Céline, Dans les prisons de Nantes en 46,
C'est pour ça en 47, (chanson du film Neuf garçons,
un coeur).
Toujours vêtus de leur "uniforme", une chemise blanche et un
pantalon bleu, ils sont acclamés à travers la France, avant que
Piaf ne décide de les emmener avec elle en tournée aux Etats-Unis.
Grâce à son introduction, ils seront reçus comme des stars
à New York en 1947, puis en 1948, où ils se produiront aussi à
Hollywood.
En 1949, lors d'une tournée au Québec, deux d'entre eux se marient
sur place. Fred Mella avec Suzanne, une comédienne. Paul Buissoneau quitte
les Compagnons pour s'installer à Montréal, avec sa jeune épouse
québécoise. Il est remplacé par le jeune frère de
Fred, René Mella.
Les succès des années 50
C'est à l'ABC, célèbre salle parisienne du Boulevard
Poissonnière, que les Compagnons attaquent les années 1950,
toujours encouragés par Edith Piaf. En 1951, c'est sur la scène
de la salle Pleyel qu'ils se produisent. En 52, ils retrouvent les Etats-Unis
pour une nouvelle tournée. Puis retour à Pleyel en 53.
Les tournées s'enchaînent à un rythme qui ne ralentira
pas souvent. De plus, ils sortent disque sur disque, qui se vendent mieux
les uns que les autres.
En 1952, Marc Herrand les quitte du jour au lendemain pour retrouver son ancien
métier de chef d'orchestre. Jean Broussolle prend la relève,
et fait profiter les Compagnons de ses talents d'auteur ainsi que d'adaptateur,
ce qui leur permet de de reprendre des succès du moment, français
ou étrangers.
Les années 50 se déroulent au fil des tournées (souvent
américaines) et de la vie familiale de chacun : mariages, enfants,
joies et peines.
En 1956, c'est Jean Albert qui s'en va pour tenter une carrière solo.
Cette fois, Il est remplacé par un jeune guitariste doté d'une
belle voix, Jean-Pierre Calvet. En février les Compagnons montent
sur la scène de l'Alhambra, mythique salle parisienne de l'époque.
Un mois plus tard, ils se retrouvent à la Gaîté lyrique
dans une opérette co-signée par Jean Broussolle, Minnie Moustache.
Au cours des années 50, les Compagnons collectionnent les succès
: d'abord le Galérien en 50, dont la musique est signée
par Léo Poll, père de Michel Polnareff, puis Lettre à
Virginie (Jean Constantin) et le Violon de tante Estelle (Broussolle)
en 55, San Francisco en 56 (Broussolle-Van Parys), Gondolier
en 57 (Broussolle-De Angelis), Guitares et tambourins (Broussolle-De
Angelis-Marcucci) et Si tu vas à Rio (adapt. Broussolle) en
58 ou le Marchand de bonheur en 59 (Broussolle-Calvet).
Jérusalem en or
(Yeroushalayim shel zahav) interprété par les Compagnons de la Chanson
Les années 60 : consolidation
Déjà vingt ans de carrière et de vie communautaire pendant
les longues périodes tournées ! Les Compagnons ont su structurer
leur troupe, en se répartissant les responsabilités et les tâches
particulières : contrats et relations publiques (Jaubert), régie
scénique (Bourguignon), trésorerie et éclairages (Sabbat)
ou costumes de scène (René Mella). Broussolle écrit et
arrange des chansons (parfois aidé de Calvet à la composition),
Lancelot rédige les mémoires de la formation. Les cachets sont
régis par les règles de l'ancienneté et c'est un contrat
exclusivement moral qui lie les neuf chanteurs. Cette organisation précise
et minutieuse constitue le secret de leur longévité.
Le 26 janvier 1961, les Compagnons fêtent leurs vingt ans de carrière
à Bobino, scène qu'ils retrouveront un an plus tard, le 8 février
62. Les neuf chanteurs ne se soucient guère des vagues rock ou yéyé
qui détournent leur jeune public ; leur succès est tel qu'ils
n'ont aucun mal à remplir les salles. Après quinze ans passés
chez Pathé Marconi, ils signent un contrat en or chez Polydor en 1962.
En mars 64, les Compagnons restent cinq semaines à l'Olympia avant de
repartir en tournée internationale. Ils donnent vingt récitals
en URSS, puis se rendent pour la quatrième fois en Israël (il seront
toujours accueillis chaleureusement dans ce pays, et un grand nombre de leurs
titres seront traduits en hébreu). Ensuite, de longues tournées
les mènent dans toute l'Afrique, puis au Canada et à New York.
A cette époque, les Compagnons vendent environ 500.000 disques par an
! Les succès se succèdent au même rythme : Verte campagne
(60), Roméo (61), Un Mexicain (62), la Chanson de Lara
(66), En écoutant mon coeur chanter (67) ou Quand la mer monte
(68).
Les Compagnons reprennent de nombreuses chansons de leur grand ami Charles Aznavour
: par exemple la Mamma, Que c'est triste Venise ou Sur ma vie.
Aznavour a aussi co-signé des titres avec Jean Broussolle (Un Mexicain,
Roméo).
Partir, revenir
A partir de Paris, les Compagnons poursuivent infatigablement leur vie de voyages,
à la fois gratifiante et épuisante. Mais le 31 décembre
1969, Guy Bourguignon disparaît pendant la tournée. Les Compagnons
décident de ne pas remplacer leur ami décédé et
c'est à huit qu'ils se rendent au Québec au printemps.
En 72, c'est Jean Broussolle qui quitte la troupe. Cette fois-ci, on lui trouve
un remplaçant : Michel Cassez dit Gaston, qui devient le benjamin
de l'octuor. Gaston est un multi-instrumentiste qui a travaillé avec
Claude François.
Les Compagnons poursuivent ainsi leur route au cours des années 70 :
Israël en 72, Paris en 75 ou le Japon en 79, pas une année sans
scène internationale ou nationale. En 1973, ils retrouvent la scène
parisienne de Bobino après trois années d'absence. Quelques nouveaux
auteurs-compositeurs apparaissent dans leur répertoire : par exemple
le duo Jean-Claude Massoulier/André Popp, et même, Michel Mella,
fils de Fred. Mais ils chantent toujours beaucoup d'adaptations comme la
Marche de Sacco et Vanzetti (71) ou Parle plus bas (du film le
Parrain en 72). Après le départ de Jean Broussolle, Jean-Pierre
Calvet continue d'écrire certaines musiques et le nouvel arrivé,
Gaston, co-signe certains titres (Mouche, On se quitte, On
a déjà vu ça).
La tournée d'adieux
Approchant à
grands pas des quarante années de carrière, les Compagnons annoncent
en 1980 leur tournée d'adieux... qui durera près de cinq ans !
En 82, à la suite d'une série de récitals en France, en
Belgique et en Suisse, Fred Mella subit une opération du coeur. Cela
ne les empêche pas de reprendre la route pour une nouvelle "tournée
d'adieux" qui confirme leur popularité intacte. Mais cette fois,
c'est réellement la fin de leur parcours commun : le 30 août 83,
ils donnent leur tout dernier concert sur la scène de l'Olympia, dont
ils ont rempli la salle pendant cinq semaines. Cette année-là,
ils se rendent aux Etats-Unis, au Canada, en Egypte ou en Israël où
on les réclame encore une fois. L'ultime récital a lieu le 15
mars 1985.
Désormais, chacun d'eux se consacre à son activité favorite
: Jean-Louis Jaubert au football en tant que membre actif de la fédération
nationale, Gérard Sabbat au théâtre, Jean-Pierre Calvet
et Gaston travaillent pour la télévision, René Mella s'adonne
à la construction en bâtiment et Jo Frachon devient même
animateur d'un célèbre jeu télévisé. Fred
Mella est le seul à poursuivre une carrière musicale.
En 1989, Jean-Pierre Calvet meurt à 62 ans. En 92, c'est Jo Frachon qui
disparaît. Les Compagnons appartiennent désormais à l'histoire
de la chanson française qu'ils ont participé à construire
pendant 40 ans : 40 disques, 400 chansons et huit mille galas. Aujourd'hui,
les innombrables compilations toujours rééditées continuent
à se vendre. En 1989, Hubert Lancelot, archiviste de la formation, a
sorti un ouvrage sur leur épopée, Nous, les Compagnons.
Pour ses obsèques, le président François Mitterrand
souhaitait que soit joué L'enfant aux cymbales. Ce fut en janvier
1996.
le 19 octobre 2002 une "Place des Compagnons de la Chanson" a été
inaugurée dans le quartier du Point du Jour à Lyon, lieu de
naissance de la formation.
Jean-Louis
Jaubert est décédé à Paris, à l'hôpital, le 3 juin 2013.