62. à Nelly SACHS, Stockholm

Quelques mois avant qu’elle ne reçoive le Prix Nobel de Littérature (1), André Neher exprime déjà son admiration à la poétesse Nelly Sachs, dont il connaît très bien l’œuvre.



…In meinem Ohr ist ein Geräusch
als ob Jemand dabei wäre,
den Stachel aus der Wunde zu ziehn –
den Stachel, der in der Mitte der Erde steckt –
Jemand nimmt die beiden Hälften der Erde auseinander
wie einen Apfel,
die beiden Hälften von Heute und Gestern –
nimmt den Wurm heraus
und fügt das Gehäuse wieder zusammen !…
…Gutes Neujahr !
Möge der Augenblick, da Er uns verlassen,
zu Ende sein !…
Dans mon oreille il est un bruit
Comme d’une présence venue
Pour extraire le dard de la plaie
Le dard fiché au cœur de la terre.
Quelqu’un ouvre les deux moitiés de la terre
Comme une pomme,
Les deux moitiés d’hier et aujourd’hui,
Enlève le ver
Et referme la boîte.
… Bonne année !
Puisse l’instant où Il nous a abandonnés
Toucher à sa fin ! (2)

Strasbourg, le 13 septembre 1966

Chère Nelly Sachs,


Je ne puis approcher du schofar et de Roch ha-chana sans que vos admirables vers me ressaisissent, jusqu’au fond de l’âme.

Au seuil d’une année nouvelle et féconde, soyez remerciée pour votre œuvre par l’un de vos si nombreux admirateurs.


André Neher (3)

Notes :
  1. Le Prix Nobel de Littérature 1966 a été décerné conjointement à Samuel Joseph Agnon et à Nelly Sachs. André Neher en félicite Nelly Sachs dans une lettre du 21.10.1966 :
    « Chère Nelly Sachs, la veille du Chabbat où toutes les synagogues du monde ont lu dans la Torah l’histoire d’Abraham, tous les journaux du monde et toutes les ondes du monde ont vibré de votre nom, couronné du Prix Nobel. Ainsi votre œuvre a-t-elle, elle aussi, comme celle d’Abahram, unifié, en cet Erev Chabbat, toutes les horloges du monde au cadran d’un moment d’éternité. Soyez félicitée et bénie d’avoir apporté une contribution si magnifique, une gerbe d’œuvre si pleinement mûre, à l’accomplissement de l’ ‘Éon’ d’Abraham. Et continuez de lier cette gerbe à de nouveaux épis, illuminés par le miracle ardent de votre inspiration. […] » (© Archives André Neher)
  2. Poème de Nelly Sachs, traduit par Gilbert Cahen. La traduction en français ne figure pas dans la lettre d'André Neher.
  3. Le 16.9.1966, Nelly Sachs, en réponse, adresse en allemand le message suivant à André Neher (nous en donnons la traduction française) :
    "Cher Monsieur le Professeur André Neher, quelle joie profonde du Nouvel An ne m’avez-vous pas procurée avec votre lettre qui me touche beaucoup ! Puisse aussi la bénédiction être sur vous ! Avec reconnaissance. Votre Nelly Sachs"  (© Archives André Neher).
Lexique :


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