Charles Netter, descendant d'une longue lignée de rabbins alsaciens, naquit à Strasbourg en 1826. Il entreprit une carrière d'homme d'affaires, d'abord à Lille et ensuite à Moscou, puis il s'installa à Paris en 1851.
L'affaire de Damas en 1840 (de cruelles persécutions perpétrées contre les Juifs de la ville à la suite d'une accusation de crime rituel) avait brutalement révélé aux Juifs d'Europe occidentale la vie misérable de leurs frères d'Orient. Ceux de France, émancipés les premiers, se sentirent un devoir impérieux face à ces populations déshéritées : celui de leur servir de protecteurs en cas d'oppression, celui aussi de leur permettre, par l'éducation et la culture, de s'élever dans l'échelle sociale. C'est dans ce but que se tinrent en 1859, dans la demeure parisienne de Charles Netter, les premières réunions qui aboutirent, un an plus tard, à la fondation de l'Alliance Israélite Universelle, dont il devint le trésorier.
Netter créa une école professionelle juive en 1865, ainsi qu'une société pour la sauvegarde des droits des travailleurs, et un foyer pour les ouvriers pauvres en 1880.
Délégué de l'Alliance en 1878 au Congrès de Berlin, il lutta en faveur de la reconnaissance de droits politiques pour les Juifs demeurant dans les nouveaux Etats créés dans les Balkans.
A la conférence de Madrid (1880) il réclama une protection pour les Juifs du Maroc. En 1881 il séjourna plusieurs mois à Brody pour organiser l'oeuvre d'assistance à l'émigration ou à la réinstallation des Juifs russes ayant été persécutés et expulsés de leurs lieux d'habitation.
Cependant son action essentielle fut consacrée à l'amélioration de la vie des Juifs en Palestine et au progrès de leurs conditions d'existence dans ce pays au moyen de la pratique de l'agriculture. Il fut influencé dans la conception de ses projets par les écrits du rabbin russe Zvi Hirsch Kalischer (1795-1874), qui avait magistralement présenté tout le problème d'un retour en Palestine dans son Drishath Sion (A la recherche de Sion).
En 1867, Netter présenta au Bureau de l'Alliance Israélite Universelle un projet d'assistance aux Juifs de Perses et d'autres pays orientaux pour qu'ils montent en Israël, et s'installent dans des villages qu'on fonderait pour eux. Il s'y rendit l'année suivante au nom de l'Alliance, et à son retour il recommanda la création d'un lycée agricole, qui serait suivi de l'établissement de localités agricoles pour les diplômés de cette école. Quand sa proposition fut approuvée, il partit pour Constantinople en 1869, où il reçut l'approbation du Grand Vizir
Mikveh Israël aujourd'hui : c'est un lycée agricole situé au sud-est de Tel Aviv. Cette institution a joué un rôle important dans le développement de l'agriculture en Israël et compte aujourd'hui un millier d'élèves. On y trouve toutes les branches d'agricultures qui existent dans le pays, des terrains expérimentaux, un jardin botanique et un pressoir à vin, le premier à avoir été construit en Israël: |
Cependant, par la suite, Charles Netter se montra déçu du peu de succès rencontré par Mikveh Israël, et du manque d'aptitude que représentait la Palestine en général pour intégrer un grand nombre d'immigrants. C'est pourquoi, il exprima son opposition à l'installation d'un grand nombre des Juifs russes et roumains dans les années 80, et rechercha pour eux des opportunités d'émigration aux Etats-Unis et dans d'autres pays.
Mais il révisa son opinion en 1882 (sans doute sous l'influence du Baron Edmond de Rotschild) et se rendit à nouveau dans le pays, où il rencontra des Juifs russes qui s'étaient installés à Rishon le-Tsion, auxquels il proposa son aide. il conçut de nombreux projets pour développer l'activité agricole et l'artisanat en Eretz Israël, mais il mourut quelques mois après son arrivée. Il fut enterré dans les terrains appartenant à Mikveh Israël.