Commémoration au cimetière juif de
BUSENBERG Discours prononcé par Otmar WEBER A l'occasion de la Journée Européenne de la Culture Juive dimanche 5 septembre 2021 traduit de l'allemand par Hildegard SCHÖNDORF - édition et photographies : Jean-François LÉVY |
Mesdames et Messieurs, chers amis,
A l‘occasion de la Journée Européenne de la Culture Juive je vous souhaite la bienvenue. Je suis heureux que vous soyez venus à Busenberg bien qu’il y ait aujourd’hui d’autres manifestations dans la région.
À notre grande surprise les membres de la famille Still : Jerry, Katie, Ben et sa famille sont venus des Etats-Unis. Soyez les bienvenus ! La mère de Jerry, Gertrud Levy est originaire de Dahn, Weißenburgerstraße 2, où se trouve aujourd’hui l’arrêt de l’autocar de la ligne régionale.
Et une autre surprise : Jean-François et Catherine Lévy sont venus de Strasbourg. À eux aussi notre cordiale bienvenue. Le père de Jean-François, Jules Lévy, était originaire de Dahn, Grabengasse 20.
Je souhaite aussi la bienvenue à Monsieur Dr. Franz-Josef Ratter, le représentant de la Landesarbeitsgemeinschaft et son épouse Ruth qui sont venus de Deidesheim.
1700 ans de présence juive en Allemagne - 400 ans de présence juive dans le Wasgau
En 321 un décret édité par l’empereur Constantin permet aux juifs de prendre des fonctions administratives à Cologne. Ce décret représente le document écrit le plus ancien d’une comunauté juive sur le territoire de l’Allemagne et c‘est pour nous la raison de célébrer l’anniversaire des 1700 ans de présence juive en Allemagne. Probablement des juifs y vivaient déjà avant cette date : en accompagnant les légions romaines ils sont arrivés sur les bords du Rhin.
Les instances politiques et sociales, ainsi que les communautés juives sont unanimes à souhaiter que cet anniversaire soit dûment célébré. En Allemagne il y aura 1500 manifestations, parmi lesquelles la nôtre à Busenberg.
Un tel anniversaire doit être l’occasion de se souvenir de l’antisémitisme qui a sévi pendant des siècles, des pogroms et de la tentative du national-socialisme d’exterminer le judaïsme européen. Mais il faut aussi prendre en considération le judaïsme vivant qui a imprégné l’histoire allemande et la culture juive contemporaine.
La situation politique actuelle est préoccupante. Nous nous souvenons des protestations contre Israël qui ont lieu au mois de mars dernier dans de nombreuses villes allemandes.
Le rappeur juif Ben Salomo parle des "inimaginables défilés de haine semblables à des pogroms à travers toute l’Allemagne". Il est effaré par la réaction de la majorité des Allemands qui s’est abstenue de manifester publiquement contre la haine antisémite.
Je constate souvent que certaines personnes cachent leur antisémitisme en critiquant la politique officielle d’Israël. (par exemple : on accuse les Israéliens de traiter les Palestiniens de la même façon que Hitler les a traités.)
La majorité des Allemands semble manifester une certaine indifférence envers les juifs et l’antisémitisme. C’est un fait avéré que l’antisémitisme qui prend aujourd’hui l’apparence de l’antisionisme est parvenu au sein de notre société. Mais il existe aussi des personnalités politiques qui mettent en garde contre ces dérives : dernièrement le président de la Republique fédérale, Walter Steinmeier, et la chancelière Angela Merkel ont condamné avec la plus grande fermeté l’antisémitisme et le racisme.
Yehuda Pushkin, rabbin à Berlin et à Celle, souhaite que "cet anniversaire attire une plus grande attention vers le judaïsme vivant qu’envers les musées et les cimetières".
L’organisateur de cet anniversaire, Andrei Kovacs, cherche à faire opposition à l’antisémitisme croissant : toutes les manifestations de cette année doivent contribuer à la compréhension et au respect réciproques. Car c‘est seulement de cette façon qu‘une vie juive peut être menée à l’avenir en Allemagne.
Selon le rabbin libéral Maximilian Feldhaken , le mérite de cet anniversaire est l’élargissement de l’horizon historique du peuple juif : "Nous avons droit à cette attention. Nous avons contribué massivement dans tous les domaines de la société allemande. Cela mérite une appréciation".
Le rappeur Ben Salomo pense que tous ces efforts n’ont pas changé l’antisémitisme croissant. Les conférences, les expositions, les concerts et les timbres de collection sont-ils inefficaces? On n’est pas obligé d’avoir la même opinion.
Malgré tout, la question demeure : cet anniversaire contribue-t-il à la lutte contre l’antisémitisme ? Les juifs peuvent-ils avoir un avenir sûr et agréable en Allemagne? Les synagogues n’ont-elles plus besoin de vitres pare-balles et les école juives n’ont-elles plus besoin d’une protection policière ? C’est difficile à imaginer aujourd’hui.
Ces manifestations atteindront de nombreuses personnes, mais elles ne toucheront que ceux qui s’engagent de toutes façons pour l’histoire judéo-allemande.
Pourtant, le rappeur Ben Salomo ne veut pas renoncer à la lutte pour un avenir sûr des juifs en Allemagne. Les derniers mots de la chanson qu’il a écrite pour l’anniversaire sont : "Nous ne nous ferons plus jamais chasser".
400 ans de présence juive dans le Wasgau
Dans le Wasgau il y avait quatre communautés juives : Busenberg, Dahn, Erlenbach, Vorderweidenthal. Chaque communauté possédait une synagogue (ce n’était souvent qu’une petite salle), un mikwe (bain rituel) et une école juive.
Depuis 1824, le cimetière juif à Busenberg sert les quatre communautés du Wasgau. Dans les années 1870 la communauté juive de Vorderweidenthal s’est dissoute par manque de membres ; le reste des juifs s’est rattaché à la communauté de Erlenbach.
Le 1er septembre 1939, qui marque le début de la deuxième guerre mondiale tous les habitants de la Zone Rouge (une bande de terrain d’une largeur de 20km le long de la frontière française), y compris les juifs ont été obligés de quitter leurs villages. À partir de cette date il n’y aura plus de juifs dans le Wasgau. Le 22 octobre 1940 au cours d’une action commando tous les juifs du Palatinat, de la Sarre et de Baden ont été transportés à Gurs.
Le chef de province du Palatinat Josef Bürckel signalait à son Führer : "Le Palatinat est libre de juifs". C’était la fin du judaïsme dans la région.
Après la deuxième guerre mondiale, seules la famille Simon Lévy est revenue à Dahn, de retour d’Algérie, et la famille de Ella et Sigmund Lemberger qui est revenue de Nagold ( Forêt Noire ) à Dahn.
La fin :
Quand en 1982 Ella Lemberger a émigré avec ses enfants en Israël, ce fut la fin des 400 ans de présence juive dans le Wasgau. Mais Ella est revenue habiter chez sa sœur Rosel à Bernkastel-Kues où elle est décédée en 1999.
Le cimetière juif de Busenberg :
Depuis plus d’un an une petite équipe de trois personnes travaille dans le cimetière : Messieurs Reiner Peter et Horst Trapp de Bundenthal et Otmar Weber de Dahn. Reiner Peter nettoie les pierres tombales et Horst Trapp est le spécialiste des travaux de rénovation. Nous travaillons tous trois bénévolement et de plus mes compagnons offrent les matériaux.
Cher Reiner, cher Horst, je vous remercie beaucoup de votre engagement pour le cimetière et j’espère que vous ferez partie encore longtemps de notre équipe.
Mes remerciements aussi à Monsieur Matthias Müller de Busenberg qui a redressé les pierres tombales, et à Monsieur le maire Christof Müller qui s’occupe du bon entretien du cimetière et qui a accordé une aide financière généreuse pour la remise en état des pierres tombales.
Tous ces travaux ont été exécutés en accord avec la communauté juive de Spire.
Pendant cette année nous avons redressé 29 pières tombales, nous les avons nettoyées de la mousse et des lichens. De plus nous avons restauré plusieurs plaques funéraires et nous avons rendu leurs inscriptions visibles.
En restaurant la plaque de la tombe n° 6. 5, Horst Trapp a fait une découverte extraordinaire : une inscription sur les deux côtés d‘une plaque en marbre blanc (voir ci-contre). Sur le revers on lit les noms et les dates des chrétiens :
Johann Weber ¬ 22. I. 1820 _ 20. I. 1877 Marie Weber, geb. Röhm ¬ 30. IV. 1822 _ 10. IX. 1904 |
Et au recto on voit l’inscription: | |
Hier ruht in Frieden Wilhelmina Schwarz, geb. Kullmann geb. 24. August 1856 gest. 21. März 1902 |
Après ce discours Monsieur le chantre Jan Nagler chantera six psaumes de David et la prière pour les victimes de la Shoah.
Arbeitskreis Judentum im Wasgau, Elisabeth & Otmar Weber, Schillerstraße 10b,66994 Dahn,
Tel.06391/2331 - e-mail : otmar_weber@gmx.de - page web : judentum-im-wasgau.de