146. au Ministère des Cultes d’Israël, Jérusalem

Le nombre des conversions au judaïsme ayant beaucoup augmenté depuis les années 1960, une inquiétude s’exprime dans certains milieux religieux juifs par crainte d’un manque de désintéressement des nouveaux convertis. Selon la loi juive, une conversion au judaïsme doit être entièrement désintéressée (pas en vue d’un mariage, par exemple). Mais une fois converti, le nouveau Juif ne doit en rien être différencié des autres. C’est sur ce point que porte la lettre ci-dessous, adressée au Ministère des Cultes d’Israël à la suite des nombreuses discussions relatives à la situation des convertis en Israël.
Lettre traduite de l’hébreu.


1986

Nous soussignés, hommes de pensée et de science, fidèles à l’accomplissement des mitsvot de la Torah qui nous prescrivent simultanément nos devoirs envers Dieu et nos devoirs envers nos prochains, animés par le seul souci de sauvegarder l’unité du peuple juif, nous élevons la protestation la plus énergique contre le projet ministériel visant à imposer au prosélyte un signe, sous quelque forme que ce soit, le singularisant en tant que prosélyte.


Ce projet est en contradiction flagrante avec la loi religieuse juive. Il bafoue les principes de justice et d’éthique par lesquels se distingue et se distinguera à jamais la Torah d’Israël. Ce projet blesse profondément et simultanément le corps social du peuple juif et l’âme du prosélyte. De nombreux versets de la Torah et d’innombrables rappels dans nos sources religieuses dénient toute valeur à une pareille proposition.


Nous n’aurons de cesse jusqu’à ce que ce projet soit intégralement annulé et nous ne reculerons devant aucun moyen à notre disposition pour arriver à cette annulation intégrale.

Professeur André Neher, Rav Léon Asknénazi (Manitou),
Professeur Eliezer Berkovits (1), Professeur Zeev Falk (2)

Notes :
  1. Rabbin et éducateur, Eliezer Berkovits (Nagyvarad, 1908-Jérusalem, 1992), Docteur en philosophie de l’Université de Berlin, a été formé au Séminaire rabbinique Hildesheimer de Berlin (disciple du Rabbin Yechiel Weinberg). D’abord rabbin à Berlin de 1934 à 1939, il fuit l’Allemagne nazie pour l’Angleterre, où il exerce ses fonctions à Leeds (1940-1946), puis pour l’Australie (Sydney, 1946-1950), et enfin pour Boston (1950-1958). En 1958, il est nommé directeur du département de Philosophie juive du Hebrew Theological College de Chicago. En 1976, il émigre finalement avec sa famille en Israël, où il demeurera jusqu’à la fin de ses jours. Il est l’auteur de nombreux livres en allemand, anglais et hébreu.
  2. Originaire de Breslau, Zeev Falk (1923-1998) se fixe à Jérusalem en 1939,où il mène des études rabbiniques et juridiques. D’abord avocat, puis conseiller juridique des ministères du Bien-être social (1955-1960) et de l’Intérieur (1960-1966), il enseigne le Droit juif, biblique et talmudique à l’Université de Tel-Aviv (1964-1970). Il a longtemps présidé l’Association israélienne de dialogue interreligieux, et a également créé et dirigé une publication : Siah Mesharim, sur les problèmes de la vie juive dans le monde contemporain. Il est l’auteur de plusieurs livres et de nombreux articles sur la pensée juive et le droit israélien. Ses relations avec André Neher ont débuté en 1966 et se sont maintenues dans un climat de grande amitié et d’estime réciproque.
Lexique :


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