Richard Neher
"C'est la justice, la justice seule que tu dois rechercher, si tu veux te maintenir en possession du pays que l'Éternel ton D.ieu t'a donné" (Deutéronome 16:20)

Pour évoquer la personnalité du Président Richard Neher disparu il y a quelques semaines, on se doit de rappeler tout naturellement sa carrière de grand magistrat, sa culture juive profonde ou le minyane (communauté) de la rue Silbermann qui fut sa création. On se doit aussi d'évoquer Richard Neher vice-président de la communauté et son rôle éminent de conseiller qu'il n'a cessé de jouer auprès de tant de présidents apportant ses idées et un esprit de conciliation jamais en défaut.

Mais la carrière la plus magistrale, la vie publique la plus éclatante ne peuvent exprimer ce que fut sa personnalité réelle, son sens inné de la morale et son amour de la vie. De par mon métier j'ai le souvenir de procès de Cour d’Assises que le président Richard Neher mena avec un scrupule, un respect de l’accusé et une ouverture de coeur exceptionnels.

J'ai aussi le souvenir, lorsqu'il arrivait à Richard Neher de collaborer à Tribune Juive, de l'esprit le plus curieux, le plus vif qui soit. Le dernier papier qu'il nous remit concerna sa découverte d'un étonnant rabbin - voyageur qui au 15e siècle entreprit de quitter l’Italie pour se rendre en Eretz Israël au prix de nombreuses aventures et tempêtes. La description du voyage s'arrêta lorsque le rabbin débarqua en terre d’Egypte. Richard Neher rêvait de raconter la suite de cette alyah. D'autres devront le faire. Mais le rabbin voyageur et son récit sont le symbole de sa vie interrompue, tout entière tendue vers Israël. C'est en Israël que vivent tant des siens dont son frère le professeur André Neher. C'est avec André Neher qu'au sortir de la guerre il écrivit sous l’égide de Yechouroun Transcendance et Immanence, le texte le plus célèbre de l’existentialisme juif, celui d'une actualisation de la Révélation, après Auschwitz. Décidément, Richard Neher, penseur ou historien, fut un Juif d'une dimension exemplaire.

Richard El’hanan NEHER za"l est né à Obernai, en 1910, d’une vieille famille alsacienne qui alliait aux vertus juives traditionnelles l’amour de la culture, de l’art, de la musique et de la poésie.

Jeune magistrat, il est révoqué par les décrets de Vichy. Réfugié à "Mahanayim" en Corrèze, durant les quatre années de guerre, il épouse en 1942 Julienne Dreyfuss, elle aussi d’origine alsacienne qui lui donnera deux filles.

En 1945, il est réinstallé dans ses fonctions et au cours d’une brillante carrière, il deviendra successivement Conseiller à la Cour d’Appel de Colmar, Président du Tribunal de Grande Instance de Sarreguemines et Président de Chambre à la Cour d’Appel de Colmar.

En plus de ses nombreuses responsabilités communautaires à Strasbourg, il enseigna longtemps à la Faculté de Droit de Strasbourg et à l’École Supérieure de la Magistrature à Paris.

Richard Neher, Président de Chambre Honoraire de la Cour d’Appel de Colmar, Officier de la Légion d’Honneur, est décédé le 8 Avril 1981, quelques jours avant Pessah, alors qu’il s’apprêtait avec son épouse à rejoindre en Israël ses enfants et petits-enfants qu’il adorait.

© : A . S . I . J . A.