La deuxième guerre mondiale de 1939 à 1945, enfin, a porté à notre champ de repos les plaies les plus profondes, comme elle a marqué de ses griffes tous les cimetières et toutes les synagogues de notre province.
En Allemagne même, "la guerre contre les Juifs" avait commencé sur ce champ de bataille où la victoire était facile. Elle s'est continuée de la même manière en "Alsace reconquise", avec l'esprit méthodique propre à nos ennemis. Notre cimetière, après avoir subi, comme les autres, le vandalisme germanique, eut encore le malheur de servir comme champ de bataille pendant la dernière phase de la guerre (janvier mars 1945).
Nous avons déjà dit qu'à notre retour après la Libération, nous avons trouvé ses murs éventrés, sa porte enfoncée, les monuments renversés et troués par des obus, son sol labouré par des tranchées et couvert d'engins de guerre, le hall détruit, la maison du gardien sinistrée.
Cet état lamentable est décrit dans une lettre adressée, en janvier 1946, au bureau du Ministere de la Reconstruction et de l'Urbanisme de notre ville. En voici le texte :
Sous la direction et la surveillance dévouées et bénévoles de M. Simon Lemmel, membre de la Commission du Cimetière, les travaux de réparation ont été entrepris et menés à bonne fin. Le cimetière a été remis en état, autant que l'ont permis les destructions dont il avait été l'objet. Le hall a été restauré, la maison du gardien reconstruite. Des registres ont été rétablis, également par les soins de M. Lemmel, indiquant numéros et emplacements de toutes les tombes encore existantes.
Un monument érigé par la communaute israélite de Haguenau à la mémoire de ses membres déportés, fusillés ou morts au champ d'houneur, pendant la guerre de 1939 a 1945, a été inauguré le 26 septembre (premier jour de Seli'hôth) 1948. Ce monument porte, outre les noms de 148 personnes (de Haguenau même ou y ayant en des attaches), l'inscription suivante :
Rappelons à cette occasion aussi l'épitaphe consacrée au Capitaine Georges Weill, mort pour la France, au Hohwald (Bas-Rhin) le 20 juin 1940, donc après l'armistice officiel.
Sur le parchemin déposé dans les fondements du Monument avec une urne contenant des cendres recueillies a Auschwitz, on a fait figurer deux inscriptions, l'une en hébreu, l'autre en francais :
"Ce monument a été érigé en mémoire de nos braves, nos martyrs et nos victimes de la guerre 1939-1945. Les fonds pour son érection ont été fournis par des souscriptions bénévoles de tous ceux qui ont des attaches à la communauté israélite de Haguenau. Les misères et les peines, causées par la cruauté d'hommes envers d'autres hommes, ont dépassé tout ce qu'on connaissait jusqu'à ce jour. Notre communauté qui comptait au début de la guerre 600 âmes, en a perdu par la seule déportation 120. La France pleure 150.000 victimes juives (*), l'Europe 6.000.000. Nous implorons Dieu de protéger l'humanité contre le retour de tels malheurs. Si un jour on devait ouvrir ce coffret et trouver cet écrit, que de tels faits puissent paraître comme des fantômes de l'imagination et non pas comme la triste réalité ! Que l'homme ne puisse plus s'avilir jusqu'à un niveau plus bas que celui de la bête ! L'inauguration de ce monument est fixée au 26 Septembre 1948 = premier jour de Seli'hoth,22. Eloul 5708, et est placée sous la présidence de Monsieur Jules Moch, Ministre de l' Intérieur. Le comité pour l'érection était présidé par : Le Rabbin Joseph Bloch, le Président de la Communauté Joseph Strauss, le Président du cimetière Paul Weil." |
(*) On estime aujourd'hui - en 2008 - que le nombre de Juifs déportés à partir de la France se montait à 75000 environ (note de la Rédaction du Site).
Nous reproduisons ci-dessous l'annonce de la cérémonie, parue le 25. 9. 1948 dans le Journal de Haguenau :
INAUGURATION DU MONUMENT ÉRIGE PAR LA COMMUNAUTÉ ISRAÉLITE DE HAGUENAU
à la mémoire de ses membres déportés, fusillés et morts au champ d'honneur, pendant la guerre de 1939 à 1945
Les pierres posées depuis la Libération perpétuent, pour une grande partie, le souvenir de notre exil et de nos misères, mais aussi de notre gratitude envers tous ceux, qui, dans nos lieux de refuges, nous ont soutenus et souvent sauvés. Les localités suivantes y figurent :
Aix-les-Bains, Annecy, Angers, Bergerac, Béziers, Clermont- Ferrand, Doumartin-sur-Vraise (Vosges), Ecully (Rhône), Grenoble, La Châtre, Lons-le-Saulnier (Jura), Montauban, Montélimar, Nuits-Saint-Georges (Côte d'Or), Parthenay, Rodez, Sarlat (Dordogne), Sorges (Dordogne), Thonon-les-Bains, Vesoul et Vichy.
(1)Cliquez ici pour voir la liste des Juifs de Haguenau déportés, fusillés et morts au champ d'honneur pendant la guerre de 1939 à 1945 |
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