Une première synagogue y a été construite en 1780.
Selon l'inventaire de 1843, elle est considérée comme en
mauvais état et trop petite. Une nouvelle
synagogue est bâtie en 1865. Celle-ci, aujourd'hui
désaffectée, sert de dispensaire.
Le cimetière israélite de Gundershoffen
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Un habitant de Gundershoffen fait visiter le cimetière juif à Mme Marcelle Rothé za"l et à son fils Michel (voix off) - 2011 |
A. Genèse
Au printemps 2016, à l'initiative du Comité du cimetière, composé du Dr Michel Cahen et de Raymond Lévy, il a été décidé de faire intervenir un auto-entrepreneur, M. Jean-Pierre Kleitz de Cosswiller, spécialiste des cimetières et de la généalogie juifs. M. Kleitz avait déjà effectué les mêmes opérations pour de nombreux autres cimetières juifs alsaciens.
La nécropole juive de Gundershoffen compte 966 tombes datées de 1815 à nos jours.
Elle comprend l'ancien cimetière, de 1815 à 1923, et le nouveau en contrebas, à partir de 1924.
Avec son équipe, M. Kleitz a entrepris les travaux suivants :
Aucun registre des inhumations n'ayant été retrouvé, il s'agit donc :
Pour la traduction, le choix s'est porté sur M. Yochoua Lilti, de Strasbourg, qui a commencé ses travaux à l'automne 2016 pour finir ces 500 premières stèles à la fin de 2019.
L'affaire est délicate et requiert une grande culture, puisque, outre la connaissance des quatre langues (hébreu, allemand y compris en écriture gothique pour l'état civil, judéo-alsacien et français), il s'agit aussi de faire correspondre les dates hébraïques et de l'état civil, ainsi que d'interpréter les références littéraires ou poétiques aux grands textes sacrés de la religion juive dont les épitaphes sont émaillées. M. Lilti maîtrise parfaitement ces connaissances. Il effectue donc un excellent travail.
La poursuite des travaux de M. Kleitz était prévue en 2017, mais a été empêchée pour des raisons budgétaires liées à la réquisition des fonds de la Commission par le Consistoire Israélite du Bas-Rhin, propriétaire légal de tous les biens juifs, meubles et immeubles, du département.
Au début 2017, cependant, les quelques stèles renversées et brisées ont pu être redressées et consolidées. Elles ne figurent donc pas comme telles dans le corpus photographique de J-P. Kleitz.
Un accord ayant été trouvé avec le CIBR, les travaux auraient pu se poursuivre à l'été 2018, mais M. Kleitz s'en est trouvé empêché pour raison de santé.
Par ailleurs, l'association ASHERN - les Amis des Sites Hébraïques des Environs de Reichshoffen et Niederbronn-les-Bains - a vu le jour en décembre 2017, et s'est engagée dans la poursuite du projet de conservation du cimetière israélite de Gundershoffen, mais aussi de celui d'Oberbronn.
ASHERN a trouvé un accord de partenariat avec l'association ICE-RF - Institut Chrétien pour l'Europe - Réseau Français, basée à Niederbronn-les-Bains, qui s'occupe de faire venir en France des jeunes volontaires européens. Sa directrice est Madame Anne Guillier, par ailleurs Maire de Niederbronn-les-Bains, mais aussi une des premières membres d'ASHERN.
Dès le mois d'août 2018, une équipe de huit jeunes de différents pays d'Europe (Allemagne, Espagne, Lettonie, Italie, France, etc.), un garçon et sept jeunes filles, ont entrepris de brosser les épitaphes de plus de 300 stèles du cimetière de Gundershoffen, aidés par quelques membres d'ASHERN. En trois jours, le travail avait été réalisé par les bénévoles, et nous les en remercions très sincèrement.
Les photos ont été prises dans la foulée par Raymond Lévy pour ASHERN. Elles sont terminées à fin mars 2019 pour les sections D, E, F et G, et à la mi 2021 pour les sections H et I.
Durant ce même mois de mars 2019, des prises de vues par drone ont été réalisées par Rêve d'Altitude, une auto-entreprise gérée par M. Adrien Adloff.
Le choix du mois de mars résultait du fait que les arbres feuillus du cimetière étaient en bourgeons, et la lumière excellente.
Les conifères ont cependant empêché la vision précise des tombes.
La technique du LIDAR a alors été mise en œuvre, utilisant des rayons laser pour produire de l'imagerie.
Un plan précis à 3 cm près a ainsi pu être établi.
A fin mars 2020 - pour cause de confinement - M. Lilti a pu finir les 106 traductions de la zone D.
Un an plus tard, il a terminé les sections E et F.
L'ancien cimetière est ainsi terminé, et le nouveau commence.
M. J-P. Kleitz avait étudié de nombreux cimetières juifs, de part et d'autre du Rhin. Il a donc conçu un système de numérotation universel, attribuant à chaque tombe un numéro original.
Cette numérotation commence par définir le cimetière, avec F pour France, 67 pour Bas-Rhin, suivi de GUN pour Gundershoffen. Elle reste basée sur les deux départements 67 et 68, qui ont fusionné dans la CEA - Collectivité Européenne d'Alsace - au 1er janvier 2021.
Vient ensuite la rangée notée R, suivie du n° d'ordre dans la rangée noté N. A préciser que les numérotations dans chaque rangée s'effectuent dans l'ordre chronologique, mais aussi le plus souvent dans le sens de lecture hébraïque. Elles s'incrémentent donc depuis la droite vers la gauche, dans les sections B, C, D, E, F, G et H, mais pas en sections A et I.
Si la stèle ou tombe contient plusieurs défunts (par ex. un couple) le n° N sera suivi de 1-2, de sorte que nous repérons ainsi les tombes, mais aussi les noms des défunts, ainsi que des mentions telles que Déporté ou Mort pour la France (section G et H).
Chaque monument funéraire peut faire l'objet de plusieurs photos, selon sa configuration spécifique et les zones de texte qu'il contient.
Nous trouverons ainsi r1, 2, etc. s'il n'y a d'intérêt que pour le recto, suivi de v1, 2, etc. lorsque le verso présente des inscriptions.
A noter que, si la section est mentionnée en marge du tableau Excel, les n° R des rangées s'incrémentent sur l'ensemble du cimetière.
Pour faciliter le repérage, les photos et descriptifs sont cependant regroupés par sections comme indiqué sur le plan.
Les sections sont clairement séparées par de petites allées d'environ 1m de large. J-P. Kleitz leur a attribué une lettre à chacune, la plus ancienne étant A.
Pour certaines d'entre elles, la numérotation peut poser des problèmes épineux, notamment en section A.
C. Traditions funéraires juives en Alsace
Lors du décès, le corps est immédiatement débarrassé des éléments extérieurs tels que bagues, alliances ou autres, afin de retrouver le caractère originel de la personne décédée.
Il est ensuite déposé sur le sol, car il n'y a qu'au sol que tous les humains soient égaux.
Une confrérie procède dès que possible à la toilette mortuaire et revêt le corps des vêtements prescrits par la tradition ancestrale alsacienne : robe serrée par un cordon à la ceinture, bonnet et chaussons.
Toutes ces pièces doivent être en lin naturel, sans teinture.
Si la tradition prescrit l'enterrement dans un linceul, la conformité aux lois françaises oblige à placer le corps dans un cercueil. Celui-ci doit alors être constitué d'une simple caisse réalisée dans le bois le plus courant, afin de respecter l'égalité des humains dans la mort.
Pour des raisons sanitaires, l'enterrement se fait le plus rapidement possible, en général sous 24h.
La mort étant l'impureté suprême dans la tradition juive, la cérémonie d'enterrement ne peut se tenir le jour du Shabbat ou d'une fête.
Cette cérémonie se tiendra donc un jour de semaine au cimetière même.
Elle sera avancée au jour du décès s'il s'est produit tôt un vendredi ou veille de fête, ou repoussée au jour suivant la fête dans le cas contraire.
Cela entraîne une difficulté importante pour le traducteur, qui doit vérifier dans l'état civil la date exacte du décès selon le calendrier civil, et ce, pour chaque tombe.
Dans la grande majorité des cimetières juifs alsaciens, le défunt est enterré en direction de l'Est, vers Jérusalem et le Mont Sion où il se dirigera le jour de la résurrection. La pierre tombale est donc elle aussi orientée vers l'Est, et la tête du défunt côté stèle, ceci, selon la tradition, pour que le défunt sache dans quelle direction aller lorsqu'il se relèvera.
Après le décès, la proche famille suit la semaine de Shiva, assise par terre et portant des vêtements déchirés. Tous les miroirs sont occultés. La période de deuil se poursuit pendant un mois.
En Alsace, les proches s'abstiennent de se rendre au cimetière pendant une période d'environ un an, afin que "le souvenir puisse se transformer en mémoire ", que le travail de deuil ait le temps de faire son effet.
Ce n'est qu'à l'issue de cette période qu'une seconde cérémonie est tenue, "l'inauguration de la matzeva", la pierre tombale, qui va perpétuer le nom du défunt et le souvenir de son passage terrestre.
Ensuite, la tradition juive veut que l'on ne se rende au cimetière qu'une fois par an, pendant la période des Selihoth, des prières de repentir avant les fêtes de Rosh Hashana et Yom Kippour.
Depuis 1945, un nouvel usage impose une prière collective pour les Déportés, ceux qui n'ont pas de sépulture et dont le souvenir est souvent rajouté sur les pierres de leurs parents enterrés ici.
Enfin, selon une tradition spécifiquement alsacienne, on ne doit pas pénétrer un cimetière avant d'être soi-même en deuil d'un de ses parents, pour préserver la jeunesse de l'impureté de la mort et de ne penser qu'à la vie.
En hébreu et en judéo-alsacien, plusieurs expressions désignent le cimetière juif, dont voici la traduction :
D. La pierre tombale dans "la maison des tombes"
La stèle est placée à la tête du défunt. Elle seule est d'importance, car le souvenir du défunt est représenté par son nom, gravé sur le support le plus durable : la pierre.
En Alsace du Nord, la pierre la plus commune est le grès rouge des Vosges. Ce matériau a l'inconvénient d'être friable et fortement sensible à l'érosion. Il a donc été remplacé par d'autres matériaux tels que le grès gris, plus dur, ou plus rarement le marbre ou le granit dès la fin du 19ème siècle.
C'est pourtant ce grès rose dans toute la section A, la plus ancienne, qui donne cette ambiance particulièrement sereine à notre nécropole.
Quelques anciennes stèles ayant été définitivement rendues illisibles par l'érosion, il est devenu indispensable de réaliser la présente conservation virtuelle du cimetière dans son état actuel, avant d'autres pertes inéluctables.
A partir de la fin du 19ème siècle, on trouve souvent des plaques de marbre vissées sur les stèles, sur lesquelles sont gravées les épitaphes. Les vis étant souvent de mauvaise qualité, elles finissent par rouiller, laissant tomber la plaque qu'elles maintiennent. Le marbre se brise et l'épitaphe est perdue. Cela donne une justification supplémentaire pour la conservation virtuelle des tombes avant la chute d'autres plaques, fort heureusement encore nombreuses.
Tous ces monuments funéraires sont depuis toujours réalisés par le tailleur de pierre local qui grave le texte en hébreu composé par la famille ou le rabbin, en le recopiant. Cela peut parfois donner lieu à quelques erreurs ...
Les épitaphes mentionnent presque toujours la date du décès selon le calendrier hébraïque, parfois traduites en français ou en allemand selon le calendrier civil. Cela donne parfois des mélanges de langues ou de calendriers assez amusants.
Quelques symboles distinctifs sont représentés sur les stèles. On retrouve ainsi à Gundershoffen comme ailleurs de nombreuses mains de Cohen et aiguières de lévites, mais aussi quelques shofars de ministres-officiants et couteaux de circonciseurs, ainsi que des grappes de raisin ou des grenades, dont les grains représentent les 613 commandements que tout Juif est tenu de respecter.
Les colonnes représentées de part et d'autre de certaines stèles symbolisent celles du Temple de Jérusalem.
Enfin, les colonnes tronquées symbolisent de jeunes vies ôtées trop tôt, hautes pour les jeunes adultes et plus réduites pour les jeunes enfants.
Tous les autres motifs décoratifs viennent du savoir-faire du tailleur de pierre lui-même, en accord probable avec les familles. On trouve ainsi de nombreux motifs floraux, des urnes drapées ou non, mais aussi quelques fleurs et saules pleureurs.
Partout, les épitaphes commencent par deux initiales hébraïques signifiant "ici repose ", et se terminent par d'autres initiales signifiant "Que son âme soit liée au faisceau des vivants auprès des âmes des autres justes reposant au jardin d'Eden" - citation biblique (I Samuel 25:29) et référence à la vie éternelle qui donne son sens à la "maison des vivants".
L'épitaphe en hébreu est obligatoire sur le recto de la stèle. Elle comprend au minimum le nom du défunt et la date hébraïque de son décès. Il prend souvent la forme d'un petit poème élégiaque qui met en valeur les vertus au sens religieux de la personne disparue.
L'émancipation des Juifs en 1791 ouvre une période de reconnaissance et de fidélité à la République Française, suivie de l'intégration dans la société. Cela se manifeste dès les années 1850 et partout en Alsace-Moselle par l'ajout sur les stèles - souvent au verso - d'une mention en langue française : nom et date de décès.
L'Annexion à l'Allemagne de 1871 n'a rien changé à cette nouvelle tradition, et les épitaphes en langue française se perpétuent.
Ce n'est qu'à partir de 1895 (l'Affaire Dreyfus), que la confiance en la France est remise en question. On commence alors à trouver des inscriptions en langue allemande, signe de l'intégration dans la société du IIe Reich, et ce, jusqu'en 1918 et le retour à la France républicaine.
L'architecture des stèles est aussi variée qu'intéressante. De la simple plaque de grès pour les plus anciennes, on évolue vers des formes en ogive ou en chapeau de gendarme, particulièrement appréciées en Alsace. Quelques stèles sont réalisées avec des colonnes de part et d'autre, symbolisant le Temple perdu de Jérusalem. D'autres sont à la mode de l'époque, comme le néogothique en vogue dans l'Europe du 19ème siècle.
Le néo-romantisme de la fin du 19ème s. de style forcément germanique dans l'Alsace annexée, allié aux progrès des savoir-faire, fait apparaître des monuments massifs aux décors foisonnants.
Le Jugendstyl apporte une touche nouvelle et plus sobre à l'entrée du 20ème siècle.
Quelques stèles remarquables constituent de véritables œuvres d'art. Certaines comportent des épitaphes sculptées en relief, ce qui constitue un pur chef d'œuvre de taille de pierre. Il est regrettable que le nom de leurs auteurs se soit perdu.
De nombreux emplacements vides (EV) suggèrent des tombes disparues, probablement vandalisées à l'époque nazie. Le nombre des EV s'élève à 350, principalement en section A et E.
Après la Shoah et les dégâts commis par les nazis dans les cimetières juifs, on remplace la stèle par une dalle de granit, plus difficile à renverser. On les trouve principalement en section H et I du nouveau cimetière.
Contrairement aux cimetières municipaux où les tombes sont remplacées à la fin de la concession, la tradition juive interdit de détruire une sépulture qui doit rester éternelle. Cela explique pourquoi les cimetières juifs sont privés et propriétés consistoriales. Par ce fait, ils constituent de véritables conservatoires des savoir-faire des tailleurs de pierre, ainsi que des styles et modes architecturaux au fil du temps.
Ces cimetières juifs sont donc, à ce titre aussi, de véritables monuments historiques. Ils peuvent parfois devenir conservatoires naturels - "la maison de la vie".
Ainsi le cimetière de Gundershoffen recèle de magnifiques arbres très anciens, antérieurs à sa création, âgés de 250 ans pour le moins : imposants chênes et pins sylvestres. On peut d'ailleurs se demander si notre nécropole n'a pas été implantée dans un ancien bosquet, comme il y en a dans le paysage environnant, en sommet de colline. Par l'ombrage qu'ils procurent en été, ces vieux arbres majestueux contribuent fortement au charme du lieu.
Mais nous sommes aussi dans un lieu assez vaste (presque 2 hectares), peu fréquenté par l'homme. Il s'agit donc d'un havre de paix où vivent plusieurs espèces animales. Sans compter les chats de passage, on peut y rencontrer écureuils et renards, mais aussi insectes divers, telle la mante religieuse...
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