Synagogue de Bâle - © M. Rothé |
Les informations les plus anciennes sur l'existence d'une communauté juive datent du 13ème siècle, alors que Bâle est encore une ville libre allemande. Le cimetière juif médiéval a été découvert au début du 20ème siècle et les restes ont été transférés en 1938 dans le cimetière juif actuel.
Au moyen-âge les Juifs de Bâle étaient libres d'acquérir et de vendre des biens immobiliers. Ils s'adonnaient au commerce et au prêt d'argent, parfois auprès des évêques de la cité. Juridiquement ils étaient placés sous la protection impériale : selon un rostre de 1241, ils devaient payer à la Couronne une taxe annuelle de 40 marks.
Pendant la Peste noire, ils furent accusés d'empoisonner les puis ; les membres du Conseil de la ville essayèrent de les protéger, mais durent finalement céder devant les guildes qui manifestaient devant l'Hôtel de Ville. Six cents juifs, leur rabbin en tête, furent brûlés sur le bûcher ; 140 enfants furent baptisés de force. Ainsi prit fin la première communauté juive de Bâle (16 janvier 1349).
En 1342, un Juif de Colmar reçut l'autorisation de s'installer à Bâle et il fut rapidement suivi par d'autres. En 1365 l'empereur transmit ses prérogatives sur les Juifs à la Cité; La seconde moitié du 14ème siècle fut une période de prospérité en dépit des restrictions imposées par l'Eglise. Cependant, en 1397, l'accusation d'empoisonnement fut renouvelée. Les Juifs s'enfuirent et la communauté disparut à nouveau.
Pendant quatre siècles il n'y eut plus de communauté juive dans la ville. A partir du milieu du 16ème siècle, les autorités de la cité émirent alternativement des permis de résidence individuels et des décrets d'expulsion.
A la fin du 16ème siècle, Bâle devint un centre pour l'imprimerie hébraïque. Les imprimeries étaient la propriété des Chrétiens, mais ils devaient avoir recours à des correcteurs juifs qui obtinrent ainsi des permis de résidence.
En 1789, à la suite de la Révolution française, les émeutes anti-juifs firent rage en Alsace et de nombreux juifs alsaciens se réfugièrent à Bâle où ils reçurent des permis de séjour temporaires.
Sous le règne de Napoléon des juifs, principalement des citoyens français d'Alsace, s'installèrent à Bâle. On en comptait 128 en 1805 et ils fondèrent une communauté, mais à des conditions restrictives : le Conseil municipal de Bâle s'opposait formellement à cette création. Il interdisait le mariage aux fils des nouveaux immigrants alsaciens, établis depuis 1800 dans la ville. Seul l'aîné avait le droit de se marier. Cette mesure restrictive devait avoir comme but d'éloigner les nouveaux venus du territoire bâlois. La première synagogue de Bâle était située au marché aux bestiaux, l'actuelle rue basse des Tanneurs, la deuxième à peu près à hauteur de l'actuelle Banque populaire Suisse, au No l Grünpfahlgasse, un immeuble dénommé jusque vers les années 1850 "die Juden schule" (école juive).
Toutefois ils furent expulsés en 1835, lorsque le Gouvernement français rompit ses relations avec le canton pour protester contre l'interdiction faite aux Juifs de Mulhouse d'y acquérir des biens. En effet, les fils de Reb Baruch Wahl de Mulhouse avaient acheté des biens sur le territoire de Bâle-Campagne qui était interdit aux Juifs, et le Grand-Conseil du Canton, par arrêté du 18 avril 1835 annula le contrat d'acquisition. Le gouvernement français fut saisi de l'affaire, et le Président du Conseil des Ministres, M. de Broglie, notifia au gouvernement de Bâle-Campagne une ordonnance royale du 12 septembre 1835, laquelle déclarait que ce gouvernement, "ayant méconnu le libre exercice du droit d'établissement et de propriété" envers des Français, et persistant dans son déni de justice, les relations diplomatiques entre la France et le gouvernement de Bâle-Campagne étaient suspendues, et certains traités alors en vigueur entre la France et la Suisse dénoncés."
Ce n'est qu'en 1847 que la nouvelle constitution accorde une certaine amélioration du sort des Juifs établis à Bâle. Depuis 1805 les offices religieux ne pouvaient avoir lieu que dans des appartements ou locaux privés. A partir de 1847, et vu les nouvelles dispositions en faveur des Juifs, ceux-ci purent (à partir du 4 septembre1850) tenir leurs offices dans un local en location sis au Heuberg No 7. Aussi, encouragés par de nouveaux décrets en leur faveur, les Juifs Bâlois songeaient-ils à la construction d'une petite synagogue. Les dirigeants communautaires de l'époque, Léopold Dreyfus, Abraham Picard et Adolphe Ruef, avaient formulé une requête d'achat auprès du petit Conseil Bâlois (29 septembre 1849), le grand Conseil actuel, qui donna un avis favorable. L'achat fut conclu et comprenait un immeuble au 403,Unterer Heuberg, se composant d'une grange et d'une courette. Le Conseil donna l'autorisation pour la transformation de l'immeuble en synagogue.
Afin d'éviter des complications ultérieures, l'administration demanda que l'achat de cet immeuble soit enregistré au nom d'une personne physique : Monsieur Léopold Dreyfus Hirsch, président de la communauté de l'époque. Le prix d'achat était de 4050 francs suisses. Léopold Dreyfus était donc de facto propriétaire de l'immeuble, mais bien entendu, comme il ressort du sermon d'inauguration du Rabbin Moïse Nordmann de Hégenheim (qui assumait outre ses fonctions de rabbin de Hégenheim, également celles de Bâle, Berne, Avenches et Chaux-de-Fonds) toute la communauté juive avait apporté son obole pour la réalisation du projet.
Théodore Herzl sort de la synagogue de Bâle, 1903. Archives sionistes, Jérusalem. |
En 1865 que le Gouvernement put obtenir l'assurance que tous les Français, sans distinction de culte, seraient également traités par les Cantons suisses, après une seconde affaire survenue en 1860, un Juif français s'étant vu refuser le droit de s'établir à Bâle-Ville. Ces deux affaires furent à l'origine de l'émancipation des Juifs de Suisse en 1866, pour laquelle s'était battu Moïse Nordmann.
Une communauté fut recréée à Bâle, où une synagogue fut inaugurée en septembre 1868, également par Moïse Nordmann. Elle est située Eulerstrasse/Leimenstrasse, et c'est aujourd'hui encore, un des plus grands centres communautaires de Suisse.
Le Rabbinat de Bâle fut confié au Rabbin Arthur Cohn après la mort du Rabbin Moïse Nordmann .
Le premier Congrès sioniste se réunit à Bâle en 1897, où l'on adopta le "Programme de Bâle". Par la suite d'autres congrès sionistes se tinrent dans la ville : le deuxième (1898), le troisième (1899), le cinquième (1901), le sixième (1903), le septième (1905), le dix-septième (1931) et le vingt-deuxième (1946).
Parmi les personnalités importantes de la communauté juive on compte :
Z. Dreyfuss-Brodsky, représentant du Judaïsme suisse auprès de l'Agence juive (décédé en 1942)
L'avocat Marcus Mordecai Cohn (1890-1953), un sioniste actif de formation rabbinique, qui est devenu par la suite le conseiller sur la loi juive auprès du ministère de la Justice en Israël
Le chimiste Markus Guggenheim (1885-)
Tadeus Reichstein (1897-), qui a reçu le Prix Nobel de Médecine en 1950.
Pendant la seconde guerre mondiale, Bâle a recueilli de nombreux réfugiés juifs. La plupart d'entre eux ont quitté la ville après la guerre.
En 1960, Bâle est devenue la deuxième communauté juive de Suisse, qui compte 2291 membres (et 838 familles en 1969).