Pour lire la traduction des mots colorés dans le texte, posez le pointeur de la souris sur le mot, sans cliquer : la traduction apparaîtra dans une bulle. Les mots colorés et soulignés sont de vrais liens |
Pinhas Kahlenberg dans sa jeunesse |
Pour moi, la "carrière" de 'hazan de Pinkas Kahlenberg reste rattachée à un souvenir de jeunesse. C'était à Obernai, où mon père, zikhrônô livraha, était alors Parness. Une maladie du ministre officiant exigeait qu'un "baal-tephilla" le remplaçât pour l'office du vendredi soir. On fit appel au petit Pinkas, âgé de dix ans ! Pour la communauté d'Obernai, ce fut une révélation. Pour Pinkas, la promesse d'une grande carrière, que mon père, au goût artistique si sûr, lui prédit alors. Il avait vu vrai. Se jouant de toutes les difficultés, matérielles ou musicales, la voix de Pinkas prenait de l'ampleur, de l'assurance, et bientôt ce timbre si personnel, qui a fait de lui, rapidement, l'un des 'hazanim les plus éminents de notre époque. Lorsque Pinkas Kahlenberg chante, tout se tait autour de lui. L'instrument le plus nuancé, le chœur le plus cultivé, sont comme ramassés et transmutés par sa voix à laquelle ils servent de silencieux accompagnement. Et lorsque Pinkas Kahlenberg prie, cette voix saisit en une fervente brassée l'émotion de l'assemblée, et la porte devant Dieu, avec lequel elle entame un bouleversant dialogue.
Ce sacerdoce liturgique suffirait à remplir dignement la vie d'un 'hazan. Mais la personnalité de Pinkas Kahlenberg est trop riche et diversifiée pour s'en satisfaire.
Juif, Pinkas Kahlenberg ne l'est pas seulement lorsqu'il officie sur l'Almemor. Il l'est dans chaque démarche de sa vie, vouée à l'observance de la Torah et des mitsvoth, dont la valeur et le sens lui ont été enseignés très tôt, par un père rabbin, qui fut un véritable Sage, dont la mémoire bénie auréole ses fils, qui lui rendent un égal honneur.
''Hazan, il ne l'est pas seulement à l'heure des offices, mais dans les multiples activités pour lesquelles la vie de la communauté sollicite ses talents et auxquelles il se donne avec un enthousiasme juvénile et un sérieux qu'aucune difficulté ne saurait ébrécher : l'enseignement, l'aumônerie militaire, la direction de la jeunesse, les œuvres sociales...
Mais ce sont les yeux et les mains de Pinkas Kahlenberg que Dieu a tout particulièrement favorisés en leur permettant de devenir les instruments d'une intense âme d'artiste. Le nom de Pinkas Kahlenberg compte d'ores et déjà parmi ceux des grands peintres juifs de notre temps. Ses portraits, ses esquisses, ses paysages aux couleurs vives et somptueuses, aux lignes vigoureuses et pourtant délicates, ont ce style unique et personnel qui est la marque du génie. L'on retrouve cette marque dans les dessins et les céramiques, qui ne sont pour Pinkas Kahlenberg qu'activités de loisirs ou de vacances; mais tout ce qu'il touche et crée se revêt de charme expressif et de beauté.
Entre toutes ces facettes d'une personnalité peut-on établir une échelle de valeurs ? Avec les Pirké Avoth, nous serions tentés de dire qu'il en est une qui les dépasse parce qu'elle les inclut toutes et les fait miroiter de leurs vrais feux : c'est le bon cœur. Le bon cœur Juif de Pinkas Kahlenberg, dont les lointains et les proches subissent l'attrait et le rayonnement, et dont une fraternelle expérience m'a permis, comme à tant d'autres, d'apprécier les richesses discrètes, irremplaçables, inépuisables...
Vers le site d'André Neher |