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Dans ce contexte, l'histoire de chacune de ces communautés apparaît chaque fois comme un élément important pour mieux comprendre, non seulement leur évolution au niveau local, mais aussi pour apprécier plus précisément ce qu'elles représentent sur le plan régional. A cet égard, chaque étape s'inscrit bien entendu dans un mouvement général lié à a succession des différentes époques en cause.
A partir du 12ème siècle, l'Alsace était au centre de cette civilisation rhénane dominée par le Saint Empire Romain Germanique. Politiquement, son territoire était partagé entre des souverainetés laïques et ecclésiastiques. Ainsi, les plus célèbres seront constituées par la suite, notamment en Haute Alsace, par la maison de Habsbourg ou les Seigneurs de Ribeaupierre et en Basse Alsace, essentiellement par les évêques de Strasbourg dont dépendait Saverne et les comtes de Hanau-Lichtenberg.
L'histoire des Juifs d'Alsace fut marquée ensuite par l'appartenance de la région à la France depuis 1648 et, par les ruptures que constituèrent chaque fois les périodes au cours desquelles elle était allemande : de 1870 à 1918, ainsi que pendant son annexion imposée par le pouvoir nazi de 1940 à 1944.
Reconstituer l'histoire de la communauté juive de Saverne, consiste par conséquent à traverser les siècles qui la concernent en relevant dans ce cadre historique les particularités qui la caractérisent. On distingue ainsi trois périodes successives :
Avant le 12ème siècle la présence de Juifs à Saverne est très limitée ; elle ne commencera à s'affirmer qu'au début de ce siècle.
La présence de Juifs en Alsace est observée en 1150 par Benjamin de Tudèle, un rabbin espagnol de l'époque qui a parcouru la région. Strasbourg est alors un centre important, mais il est relevé que des Juifs vivent aussi en particulier à Saverne, de même qu'à Mulhouse, Ensisheim, Obernai, Molsheim, Haguenau, Wissembourg et Colmar.
L'existence de Juifs à Saverne, territoire épiscopal sera, par la suite, attestée au début du 14ème siècle par un document datant de 1338. Il s'agit d'une convention passée le 4 décembre de cette année entre la Ville de Strasbourg et 15 chefs de familles y résidant. Le texte mentionne une certaine "Mösselin von Zabern und sine Kint", c'est- à-dire la veuve de Mossel et ses enfants. Cette famille a pu trouver refuge à Strasbourg car elle aété poursuivie par les terribles bandes dites du "Roi Armleder", le nom donné à leur chef, Jean Zimberlin qui porte un bracelet en cuir au bras, et qui sévissent dans la région à cette époque en s'attaquant particulièrement aux Juifs.
Une présence marginale de quelques Juifs y est encore relevée jusqu'en 1349, date à laquelle il leur est interdit de résider dans la ville. La tristement célèbre "peste noire" chasse ainsi pratiquement tous les Juifs de la région. Ils ont été la proie de la vindicte populaire. Un acharnement sauvage et meurtrier les rend coupables du fléau qui s'abat pourtant sur tous, sans distinction ni de race, ni de religion.
Le petit nombre de Juifs qui peuvent encore y résider malgré tout, est définitivement expulsé de la cité en 1440 par le nouvel évêque de Strasbourg, Robert de Bavière qui autorise cette expulsion souhaitée par les représentants de la ville. Ainsi, pendant près de deux siècles, plus aucun Juif n'aura la possibilité de s' installer à Saverne.
En effet, dès 1613 l'amorce d'une modification de la situation se concrétise puisque l'évêque Léopold d'Autriche consent aux Juifs le droit de faire du commerce, sans toutefois être autorisés à ouvrir boutique. En 1616, pour les dissuader de venir à Saverne, et aussi pour en tirer un profit, un droit de péage spécifique aux Juifs, ou Judenzoll, est institué pour tous ceux d'entre eux qui veulent entrer dans la ville.
A partir de 1622, à l'époque de la guerre de trente ans, une première famille peut y habiter après avoir séjourné à Otterswiller qui se trouve juste à côté de Saverne. En effet, durant le siège de la ville par le Comte de Mansfeld, plusieurs Juifs des alentours s'y sont réfugiés à Saverne. L'un d'eux a eu un comportement courageux dans le cadre de la défense de la cité et en récompense, il est autorisé à s' y installer en bénéficiant d'un droit de séjour.
L'année suivante, en 1623, un dénommé Gottfried Judd
peut louer à Saverne une maison vide et délabrée. En 1634,
le Grand Chapitre accorde protection à Saverne à Josepp Judd et
Lazarus. Pour faire face à la situation, l' Evêque Franz Egon de
Furstenberg contraint les Juifs à habiter dans des maisons situées
autour d'une cour se trouvant dans la basse-ville, sur la rive droite de la
Zorn. L'endroit sera très vite appelé "Judenhof",
la "cour des Juifs". Le premier lieu de culte se trouve dans une maison privée
donnant précisément sur cette cour.
En 1651 déjà, l'existence d'un commerce de sel exploité par Abraham Judd de Bouxwiller peut être relevée, un second établissement identique a d'ailleurs été créé par Hirtzel Judd de Saverne en 1661, qui cherche à concurencer son coreligionnaire de Bouxwiller. Dans un autre domaine, en 1654, le Tribunal Episcopal accorde aux Juifs une autorisation d'abattre rituellement des animaux, sans toutefois leur accorder le droit de vendre de la viande aux Chrétiens.
Le 21 octobre 1669, l'Évêque Franz Egon de Furstenberg les assigne à résidence dans un autre quartier de la basse ville appelé "Blindstadt" ou "quartier aveugle" et situé, cette fois-ci, sur la rive gauche de la Zorn. Il s'agit d'étendre le quartier du Judenhof pour faire face à l'accroissement des demandes de résidence.
En effet, dans ces conditions, la situation a évolué plus rapidement et les Juifs ont même un représentant, en la personne de Abraham Lévi, qui se plaint en 1677 auprès des pouvoirs publics des impôts particulièrement lourds pour les Juifs depuis que Saverne entretient dans ses murs une garnison de 1500 hommes et que les remparts doivent être reconstruits. Les interventions de ce premier représentant de la communauté sont relevées également en 1683 et en 1687.
En 1689, six familles juives résident à Saverne et en 1691,
l'un de leurs membres, Löwel Levi, frère d'Abraham, obtient l'accord
lui permettant d'acquérir une maison en ruine. Enfin, le 18 juin 1695,
le Cardinal de Furstenberg autorise pour la première fois un juif, Maier
Levi, à ouvrir une boutique pour vendre "toutes sortes de marchandises,
à savoir de toute sortes de draps, de soie, d'épices". Celui-ci
est même autorisé à acquérir un immeuble au centre-ville,
hors du Judenhof, pour y installer son commerce. Ce mouvement va prendre de
l'ampleur par la suite.
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