Né
à Strasbourg en 1802, fondateur de "Notre Dame de Sion" dont
le but est d'aider à la conversion des juifs, il descend de la célèbre
famille Ratisbonne. Sa grand-mère Hanna Brull épouse Cerf
Berr en seconde noce. Son oncle Louis Ratisbonne fonde l'hospice
Elisa et l'Ecole du travail. Son père Auguste et son oncle Louis
seront présidents du Consistoire. Son frère Adolphe-Marie, plus
jeune que lui de dix ans, se convertira au cours d'un voyage à Rome
et s'établira à Jérusalem, où il finira ses jours.
Son cheminement vers le catholicisme serait due à l'influence d'un
professeur de philosophie Louis Bautain de l'université de Strasbourg,
disciple de De Maistre et de Lamennais qui l'achemine vers le Nouveau Testament.
Théodore se convertit le Samedi saint 14 avril 1827 à l'âge
de 24 ans.
Il publiera plusieurs ouvrages : Essai sur la morale en 1828,
Histoire de Saint Bernard et de son siècle en 1841.
La question juive
Le livre qui dévoile sa pensée profonde vis
à vis du judaïsme sera publié en 1868 : La question
juive par le Révérend Père Ratisbonne chez Dentu
et Douniol , libraires- éditeurs à Paris. (1)
Selon l'auteur, les juifs depuis 2000 ans "ne présentent dans leur lamentable histoire aucune vitalité" ; la cause de cette "éclatante déchéance" est écrite dans l'Ancien et le Nouveau Testament : les juifs sont une eau stagnante qui ne se mêle dans aucun des fleuves qui l'environnent .En fin de compte, Th. Ratisbonne est persuadé que, malgré toutes les entraves, Israël se convertira : "le vieux peuple de Dieu... tombera au pied de la croix et reparaîtra dans les derniers jours au couronnement de l'édifice immortel ." Le but de Th. Ratisbonne est d'aider ses anciens coreligionnaires à se convertir au christianisme , en particulier leurs enfants qui pourront être accueillis dans les pensionnats de Notre-Dame de Sion .
Une "commotion sociale" comme la révolution française pour donner au peuple israélite un signal fort, était par conséquent, nécessaire .
Le premier signe de ce réveil réside dans l'acte d'émancipation des juifs de 1791 : "il fallait que la France fût descendue bien bas dans les ténèbres de l'incrédulité pour se rencontrer soudainement au niveau de l'infidélité des juifs". En même temps , il constate que la Providence semble avoir choisi le moment où l'édifice social s'écroulait avec fracas pour "ébranler les murailles séculaires qui séparaient les juifs de la société chrétienne".
Th. Ratisbonne critique les décisions prises par le "Grand Sanhédrîn" réuni en 1807 par Napoléon et notamment l'acceptation par les représentants des juifs de la suprématie du "Code Napoléon au dessus du code de Moïse", c'est à dire la suprématie de la loi civile sur la loi religieuse.
L'analyse de la situation des juifs de France est révélatrice de sa pensée : le plus grand nombre est "indifférent" et abandonne la synagogue ; les autres sont les "réformateurs, disciples attardés de l'école de Voltaire" ; le troisième parti orthodoxe ou conservateur "se compose d'un assez grand nombre de juifs opiniâtres" parmi lesquels il y a "beaucoup d'ignorance et d'hypocrisie".
Le quatrième groupe rassemble "le parti des christianisants" qui admirent le culte catholique mais "s'arrêtent au seuil de l'église" et seraient représentés " dans toutes les principales familles israélites de l'Europe".
Enfin le parti qui l'emporte sur tous les autres serait "celui qui renie ouvertement la Bible et le culte hébraïque" pour s'attacher au "progrès" : Th. Ratisbonne ici les disciples de Saint-Simon et de Fourrier "qui ont fait " leurs premières conquêtes parmi les israélites les plus éminents" .
Ces derniers appartiennent à "l'israélitisme libéral " qui ne trouve pas grâce à ses yeux. Il se demande comment des hommes de bonne foi et de talent " peuvent se contenter d'une théorie si vague et si vaine".
Th. Ratisbonne aborde ensuite les raisons pour lesquelles les juifs sont persécutés : il leur reproche de ne pas ouvrir les yeux sur leur cause et cite les prophètes d'Israël qui les avaient prévues. Il constate que l'on ne peut pas méconnaître l'intervention de la main de Dieu dans l'explosion d'une catastrophe qui a duré deux mille ans.
L'auteur émet, à ce propos, une hypothèse pour le moins originale, en faisant apparaître l'Eglise catholique comme protectrice des juifs : elle n'a pas été le "glaive de la divine justice" , elle a au contraire "modéré les fureurs spontanées des peuples" en ouvrant aux juifs persécutés des "asiles inviolables" : de là, "les ghettos dont l'origine se rattache à une pensée hospitalière, trop oubliée, trop calomniée de nos jours" .
Il conclut ce chapitre en écrivant : "les israélites commettent évidemment une injustice et une ingratitude quant ils s'insurgent aujourd'hui contre une institution qui les a sauvés autrefois."
Le rôle joué par l'Eglise dans les croisades et dans l'Inquisition , où elle s'est illustrée par de nombreux massacres et bûchers semble totalement oublié par Th. Ratisbonne qui semble apparemment frappé ici d'amnésie .
Dans la deuxième partie, l'auteur reproche aux juifs de nier contre le texte même de l'Ancien Testament , le "dogme du messie et de la rédemption du monde". Il pense toutefois "que le temps des miséricordes promises à Sion est venu " . Il décèle chez les juifs "un défaut d'étude" car ceux-ci s'imaginent que le christianisme est une autre religion que le judaïsme : "le christianisme n'est en réalité que l'accomplissement des promesses faites à Abraham et aux patriarches d'Israël".
(1) Accessible en ligne : http//gallica.bnf.fr ( notice FRBNF 37254035). Retour au texte.