II y a plusieurs années déjà, M. Alexander Marx a bien voulu me communiquer la copie d'un document écrit sur parchemin et conservé au Jewish Theological Seminary of America à New-York (1).
Le manuscrit en question a été calligraphié par un scribe attitré (sofer) et concerne une fondation de Cerf Berr.
II ressort du texte même que l'acte original de cette fondation avait été déposé chez le "notaire royal", sans que le nom et le lieu d'habitation de ce personnage y soient nommés. Mais comme je savais que Cerf Berr avait eu souvent affaire au notaire Laquiante de Strasbourg, qui portait le titre de notaire royal, j'ai supposé que c'est dans son étude que devait se trouver l'acte original de fondation dont il s'agit ici. Ma supposition devait se confirmer. J'ai, en effet, trouvé l'original parmi les actes notariés de Me Laquiante aux Archives départementales du Bas-Rhin. A la fin du texte hébreu on lit les lignes suivantes rédigées en français :
CERF BERR. | DAVID SINTZHEIM. LAQUIANTE. |
Ce fut le dimanche 9 Tischri 5547 (1786) que le syndic R. Hirtz, fils de R. Berr de Medelsheim, vint en présence de témoins et de membres de sa famille réunis à Bischheim, faire la déclaration suivante : Puisque les docteurs recommandent avec insistance de soutenir ceux qui s'occupent de l'étude de la Loi, de marier les jeunes filles pauvres et de donner l'aumône aux pauvres et puisque Dieu lui avait accordé richesse et honneur, il avait destiné une somme de cent soixante-quinze mille livres en argent français pour être employee à ce triple but, savoir : Talmud Tora (étude de la Loi), Hakhnâssat Kalla (mariage de jeunes filles pauvres), Cedaka (aumône).
Le capital devait rester toujours intact, tandis que les intérêts de sept mille livres devaient être distribués annuellement, ainsi qu'il sera expliqué plus loin.
Le conseil de famille était composé des membres suivants : R. David Sintzheim, beau-frère de Cerf Berr, R. Nethanel (alias Samuel Séligmann Alexandre), R. Méir (Moutzig), R. Wolf Lévy, tous trois gendres de Cerf Berr, et ses trois fils : R. Mardochée (Marx), R. Baruch et R. Todros (Théodore). Ils devaient également administrer la fondation aussi longtemps qu'ils habiteraient l'Alsace ou la France, et si R. Guedalya, autre gendre de Cerf Berr, devait jamais revenir en Alsace ou en France, il ferait lui aussi partie de cette administration.
Cerf Berr avait d'abord remis la somme de 175.000 livres à ses gendres et à son fils Marx, mais plus tard il la reprit pour
acheter la seigneurie de Tomblaine en Lorraine. Mais cette seigneurie était hypothéquée en faveur de la fondation, et rien des revenus ne devait être distrait par Cerf Berr ou ses ayants droit avant que les 7.000 livres fussent payées.
Au cas où le Gouvernement défendrait aux Juifs de posséder des terrains et où la seigneurie de Tomblaine devait être vendue, la somme de 175.000 livres était à prélever d'abord sur le prix de la vente pour être versée à la fondation. Et c'était le seul cas où Tomblaine pouvait être aliénée.
Chaque année, les administrateurs de la fondation avaient à distribuer, selon les indications données plus loin, la somme de 7.000 livres.
Quatre membres de l'administration devaient être designés par le sort : l'un était chargé de conserver la caisse avec tous les documents et l'argent de la fondation, et lestrois autres devaient avoir chacun une clef de cette caisse, qui ne pouvait être ouverte qu'en présence de ces trois membres. L'acte original de la fondation devait être déposé chez le notaire royal, tandis que des copies légalisées étaient remises aux membres de l'administration ainsi qu'au rabbin de la rrégion où se trouvait l'école talmudique. Mais le notaire n'avait pas le droit de délivrer une seconde copie à un administrateur sans le consentement de tous les membres de l'administration.
Ces administrateurs avaient à gérer les finances de la fondation, ne devaient rien payer que contre quittance, devaient tout inscrire dans un livre de caisse, et, lors des assemblees annuelles, les comptes seraient vérifiés par les membres de la commission administrative. Procès-verbal devait être dressé de cette vérification. Nul ne pouvait être élu membre de cette commission, s'il n'avait pas, au moins, un budget de 5.000 livres.
Voici maintenant la manière dont il fallait distribuer Ies 7.000 livres.
TALMUD TORA (Étude de la Loi).
Le donateur se réservait le droit d'échanger ces maisons contre trois autres meilleures et même d'installer l'école dans un autre endroit et dans une autre rrégion. Plus tard les administrateurs devaient avoir aussi ce droit, mais le transfert ne pouvait avoir lieu qu'après avoir été voté à l'unanimité.
Il fallait étudier la Loi, jour et nuit, dans cette école talmudique ou Bet ha-Midrasch, et y faire l'office matin et soir pendant toute l'année, tant en semaine que les samedis et les jours de fête.
Les administrateurs avaient le privilège de pouvoir demeurer dans ces trois maisons, et l'un des talmudistes devait être le rabbin du Bet ha-Midrasch. Il était tenu de prêcher le samedi avant Pâque et le samedi de la semaine de pénitence. Il touchait 9.500 livres par an. Les deux autres talmudistes touchaient chacun 1.200 livres par an. Ces sommes étaient payées trimestriellement. Le rabbin recevait, en outre, 120 livres par an pour le chauffage et l'éclairage de la salle d'étude.
Le bedeau touchait 30 livres et 450 livres pour la réparation des maisons, pour le "vingtième", les contributions et menus frais, achat de livres, etc. Le restant des 450 livres était remis aux administrateurs et conservé chaque année en vue de réunir la somme necéssaire à l'entretien d'un quatrième talmudiste, auquel on donnerait au moins 400 ou 500 livres par an.
Les trois talmudistes entretenus dans le Bet ha-Midrasch de Bischheim n'avaient pas le droit de s'occuper d'un commerce quelconque leur unique occupation devait être l'étude de la Loi. Le matin, une demi-heure après l'office, its devaient se réunir dans la salle d'étude et étudier aver soin un chapitre de la Mishna, puis réciter une pri-re en faveur de Cerf Berr, après quoi, its devaient étudier soigneusement un chapitre du Talmud, selon le choix du rabbin préposé au Bet ha-Midrasch, jusqu'à midi. Ensuite its pouvaient rentrer chez eux jusqu'à deux heures. L'après-midi était destiné à l'étude des commentateurs talmudiques et halachiques (Poskim). Cela durait en été jusqu'à l'heure de l'office de Min'ha et en hiver jusqu'à la tombée de la nuit.
Le fondateur se réservait le droit de choisir les visiteurs du Bet ha-Midrasch et de remplacer, s'il le fallait, l'un ou l'autre des talmudistes. Ce droit devait revenir plus tard aux membres de la commission administrative, dont les décisions devaient toujours être prises à la majorité des voix.
Si jamais un descendant de Cerf Berr ou un parent de sa première femme Juttelé ou de sa seconde femme Hannelé devait se présenter comme candidat à l'un des postes de talmudistes, il serait préféré à tout étranger, mais seulement la condition qu'il réunirait en sa personne toutes les qualités nécessaires, tant au point de vue moral qu'au point de vue intellectuel, pour remplir les fonctions en question.
Cerf Berr se réservait également le droit pour lui-même ainsi que pour ses fils de majorer le capital de la fondation, afin de pouvoir augmenter le nombre des talmudistes, tandis qu'il devait toujours être interdit de diminuer le traitement des trois talmudistes aussi longtemps que le capital ne serait pas majoré.
HAKHNASSAT KALLA (Mariage d'une jeune fille).
1° Chaque année on devait doter une jeune fille de bonne famille, dont le père serait sans moyens suffisants.
Les membres de l'administration devaient lui allouer une somme de 200 livres pour dot, et pour les
frais du trousseau et du mariage la somme de 300 livres.
Au cas où elle aurait un trousseau, le montant devait en être ajouté à la dot.
Comme le père de Cerf Berr avait déjà légué une somme d'argent se trouvant alors dans les mains de son
fils et ayant même destination, Cerf Berr décida que les deux legs devaient être réunis en un seul et que tous les trois ans les intérêts du legs du père devaient être ajoutés à ceux du sien, ce qui donnerait la somme de 1.500 livres.
La jeune fille avait à prouver sa bonne conduite par un certificat du rabbin ou du syndic de son lieu de résidence.
Elle ou son père avait à faire ses déclarations devant les membres de l'administration, qui devaient en dresser procès-verbal.
3° La bénéficiaire devait être âgée d'au moins seize ans. L'âge serait attesté par un certificat du syndic de son lieu de résidence légalisé par la signature du rabbin.
4° La préférence devait être réservee à une parente de Cerf Berr jusqu'au troisième degré et si elle était pauvre.
5° Si une parente pauvre de Cerf Berr avait été choisie pendant trois années consécutives, il fallait tâcher de trouver, la quatrième année, une parente de Juttelé, première femme de Cerf Berr, et, la cinquième année, une parente de Hannelé, seconde femme de Cerf Berr, et ainsi de suite.
6° Toutes les fois qu'il n'y aurait pas de parents de Cerf Berr, la préférence serait donnée soit aux parents de Juttelé, soit à ceux de Hannelé, ou inversement.
7° Une parente, orpheline de père et de mère, aurait le pas sur toute autre, et une orpheline de père sur une orpheline de mère.
8° Dans chaque cas il fallait prouver sa parenté par une attestation du syndic, du lieu de résidence légalisée par la signature du rabbin. De même devait être prouvée l'indigence.
9° S'il n'y avait pas de parents, le choix pouvait tomber sur une étrangère, originaire d'Alsace ou de la région où se trouverait alors le Bet ha-Midrasch. De préférence on devait choisir la fille d'un talmudiste nécessiteux et une orpheline. S'il s'agissait de choisir entre la fille d'un non-talmudiste orpheline et une nonorpheline, les administrateurs devaient faire comme bon leur semblerait, sauf la troisième année, où il fallait de toute façon choisir une orpheline. En général, les administrateurs devaient avoir à coeur de gérer les affaires de cette fondation selon les principes de la justice et de l'équité.
10° Si des étrangères seules et non des parentes devaient briguer la dot et que parmi les jeunes filles en question il y eut la fille d'un des professeurs du Bet ha-Midrasch, celle-ci devait avoir la préférence.
11° Si dans les trois premières années, il n'y avait pas de parente de Cerf Berr apte à recevoir la dot, mais une parente de sa première femme Juttelé et de sa seconde femme Hannelé, les administrateurs devaient porter leur choix deux fois sur des parentes de Juttelé et la troisième fois sur une parente de Hannelé, et la troisième année seulement sur une orpheline. De même, si la quatrième et la cinquième année il n'y avait pas de parente de Juttelé ou de Hannelé, on devait choisir une parente de Cerf Berr, et si, l'année suivante, des parentes de Hannelé ou de Juttelé venaient à se présenter, on pouvait leur accorder tout de suite le montant du legs sans attendre trois années.
12° Après que le choix serait fait au mois de Nisan, les administrateurs devaient tâcher de trouver un parti convenable pour la jeune fille en question, de préférence un étudiant ou un lettré. Les fiançailles devaient être célébrées au mois d'Eloul suivant, et le mariage au mois d'Eloul de l'année d'après. Au besoin, ces dates pouvaient être changées. Au mois de Nisan suivant, les administrateurs se réuniraient à nouveau pour choisir une autre jeune fille, dont les fiançailles seraient célébrées au mois d'Eloul, époque du mariage de la première jeune fille, et ainsi de suite, de sorte que les administrateurs avaient à se réunir deux fois par an, au mois de Nisan et au mois d'Eloul, pour délibérer des affaires de la fondation et pour célébrer les fiançailles et le mariage des jeunes filles bénéficiaires des dots.
13° Si le choix des administrateurs s'était porté sur une parente pauvre de la famille Cerf Berr, originaire d'un endroit éloigné de plus de dix lieues de Bischheim, il fallait donner l'autorisation de faire le mariage ailleurs qu'à Bischheim ; mais le mariage d'une parente de la région et surtout d'une étrangère devait être célébré au siège du Bet ha-Midrasch.
14° Si deux parentes du même degré s'étaient présentées et que les administrateurs fussent embarrassés de
donner la préférence à l'une plutôt qu'à l'autre, il fallait tirer au sort de la façon suivante :
sur un billet on 6crirait Mazal tob, sur un autre Année suivante ; ces deux billets seraient mis dans un coffret ; sur deux autres billets on écrirait les noms des jeunes filles, et on les mettrait aussi dans un coffret, puis on sortirait un billet de chaque coffret, et la jeune fille dont le nom sortirait avec le billet Mazal tob, devrait être dotée tout de suite, tandis que la seconde aurait à attendre jusqu'à l'année suivante. Mais la troisième année on n'avait qu'à tirer au
sort pour les trois orplielines, comme il sera expliqué plus loin.
15° Une jeune fille, âgée de plus de vingt ans, devait avoir la préférence sans tirage au sort sur une jeune fille moins âgée, le tirage au sort n'ayant lieu que dans les cas d'égalité absolue. Par contre, une jeune fille âgée de moins de vingt ans, qui, du fait des conditions exposées plus haut, avait la préférence sur une autre âgée de plus de vingt ans, ne pouvait pas être évincée par sa
concurrente par suite de son âge ; et tout ceci ne comptait que pour les parentes. Mais s'il n'y avait pas de parentes et que les administrateurs fussent d'avis de donner la préférence à une étrangère entre plusieurs, cela était permis à condition qu'il y ait unanimité, les absents même étant tenus de donner leur assentiment par écrit. S'il n'y avait pas unanimité, il fallait tirer au sort de la manière
suivante :
on inscrirait cinq noms par exemple sur cinq billets à mettre dans un coffret, sur un sixième on écrirait Mazal tob, et quatre autres seraient laissés en blanc, ces cinq billets devant être mis dans un second coffret. La jeune fille dont le nom sortirait avec le billet Mazal tob bénéficierait de la dot. Le même mode était à employer aussi pour plus de cinq candidates.
16° Toutes ces décisions devaient être prises dans les assemblées générales des administrateurs, c'est-a-dire des fils et des gendres de Cerf Berr, qui habitaient l'Alsace et la France. Ces assemblées auraient lieu chaque fois dans la salle d'étude du Bet ha-Midrasch à Bischheim ou dans tout autre endroit où serait le siège du Bet ha-Midrasch. Un administrateur habitant un endroit éloigné de plus de dix lieues de Bischheim ou du siège du Bet ha-Midrasch ne serait pas obligé d'assister à l'assemblée ; les autres membres pouvaient la faire à eux seuls ; mais ils devaient lui envoyer le procès-verbal quinze jours avant l'assemblée, et lui, de son côté, pouvait transmettre son opinion par écrit sans prendre part au vote. Après la seance, il fallait donner communication au membre absent de toutes les decisions qui auraient été prises. Si des administrateurs étaient empêchés d'assister à la réunion, elle pouvait être remise à un autre jour, mais pas plus tard que le 15 Nisan ou le 15 Eloul. Pour que 'assemblée fut valable, il fallait au moins la presence de trois administrateurs ; s'il n'y en avait que deux, il fallait leur adjoindre le rabbin du lieu où se trouvait le Bet ha-Midrasch.
17° Si la jeune femme qui avait reçu sa dot de la fondation de Cerf Berr mourait la première année de son mariage sans laisser d'enfants, le mari était tenu de rembourser la dot à la commission administrative après déduction des frais du mariage. Si elle mourait dans la seconde année sans laisser de postérité, il devait rembourser la moitié de la dot. Cette condition était à inscrire dans le contrat de mariage, et même si, par suite d'oubli, elle n'avait pas été inscrite, elle devait être appliquée.
18° Si un ou plusieurs des administrateurs n'étaient pas d'accord avec les décisions prises par la majorité, ils
devaient faire part de leurs réclamations au rabbin du pays du Directoire de la Noblesse d'Alsace (Ritterstand) ou à celui du siège du Bet ha-Midrasch. L'un ou l'autre de ces rabbins devait fonctionner comme juge dans les différends qui pourraient surgir entre les membres de l'administration. Mais s'il devait s'agir d'une affaire importante, les administrateurs pouvaient adjoindre encore deux autres juges au rabbin, afin de former un tribunal de trois membres.
Toutefois ceci ne pouvait se faire que si le ou les administrateurs en question avaient fait inscrire, en seance même, leur protestation dans le procès-verbal; sinon, leurs réclamations seraient considerées comme nulles et non avenues.
Le jugement du tribunal ou du rabbin devait être sans appel, et tous les administrateurs étaient tenus
de s'y soumettre, sous peine de perdre tous les droits à la fondation.
19° Une jeune fille apparentée à la famille Cerf Berr et possédant une fortune de plus de 1.200 livres ne pouvait recevoir la dot de la fondation; une étrangère qui avait assez de fortune pour trouver un mari était également exclue.
20° Les 1.200 et les 300 livres ne devaient jamais être partagées, mais toujours être accordees à une seule jeune fille.
21° Dans le testament du père de Cerf Berr il avait été stipulé que tous les trois ans devait être dotée une orpheline. Pour ce motif il fallait choisir chaque troisième année une orpheline de père. Une orpheline parente du père ou de la mère de Cerf Berr avait la préférence sur une étrangère. S'il y avait une ou deux parentes du côté du père et une du côté de la mère, il fallait tirer au sort; mais cela devait se faire seulement pour trois jeunes filles, dont deux devaient être parentes du côté du père et une du côté de la mère, ou une du côté du père et une du côté de la mère et non pas deux du côté de la mère et une du côté du père. Ne pouvaient prendre part au tirage au sort que trois orphelines sans plus. S'il n'y avait pas de parents jusqu'au troisième degré, on pouvait tirer au sort entre trois orphelines étrangères. Dans tous les cas le premier fils issu de ce mariage devait porter le nom de Dob Bär et la
première fille le nom de Gelche. Ceci devait se faire la troisième, la sixième, la neuvième année, etc., selon le voeu du père de Cerf Berr.
C'est pour cette raison aussi qu'une copie du testament du père de Cerf Berr devait être inscrite dans le registre des procès-verbaux de la fondation, en tant qu'il avait trait à l'attribution d'une dot à une jeune fille, tandis que la copie de tout le
testament devait être conservee aux Archives de la fondation, pour que tout soit exécuté ponctuellement.
Mais si l'on avait doté une orpheline la première ou la deuxième année et si le nom du père ou de la mère de Cerf Berr avait été donné à l'enfant, on pouvait attendre jusqu'à la troisième année après pour doter une orpheline, puisque c'est la troisième année seulement que le testament du père de Cerf Berr devait être exécuté. C'est pour cette raison aussi que pour la troisième année c'étaient les prescriptions du père qui devaient être prises en consideration en cas de doute, tandis que pour les autres années c'étaient celles du fils qui devaient seules être exécutées.
CEDAKA (OEuvre de charité).
Les frais d'entretien du Bet ha-Midrasch devaient se monter à 4.500 livres, la somme destinée à doter une jeune fille à 1.500 livres, de sorte que des 7.000 livres, montant des intérêts de la fondation, il restait encore la somme de 1.000 livres par an.
Cette somme était à répartir entre des parents pauvres du côté du père ou de la rnère de Cerf Berr. Tous les parents jusqu'au troisième degré devaient être inscrits dans un livre, et il fallait leur partager ladite somme, une moitié au commencement
du mois de Nisan et l'autre moitié au mois d'Eloul. Les administrateurs devaient leur envoyer l'argent à domicile afin de leur
éviter les frais de voyage. Les parents plus éloignés que le troisième degré n'avaient pas droit à cette somme. Les plus proches devaient être préférés aux plus éloignés. Mais les administrateurs avaient le droit de faire des exceptions en cas de nécessité extraordinaire. Toutefois un seul parent ne devait jamais recevoir en une fois plus de 150 livres, et s'il n'y avait pas
assez de parents pauvres du côté du père ou de la mère de Cerf Berr, il fallait donner le reste de l'argent à des parents de sa première ou de sa deuxième femme, et s'il n'y en avait pas de ceux-là, il fallait faire du restant de la somme des chemises, des souliers, des pantalons, des vestons et des gilets et les distribuer à des
nécessiteux, particulièrement au siège du Bet ha-Midrasch.
Comme cette fondation était perpétuelle, les administrateurs ne devaient jamais acceptor le moindre don de la part d'un étranger. afin d'eviter des querelles. Mais si les fils de Cerf Berr voulaient augmenter le capital, rien ne s'y opposait.
Si plus tard il devait y avoir en Alsace et en France moins de cinq descendants de Cerf Berr, la fondation serait administrée par les syndics généraux du pays et par les rabbins de Haguenau, du Directoire de la Noblesse d'Alsace et de Ribeauvillé ou par le rabbin de la région où serait le siège du Bet ha-Midrasch. Ils devaient choisir des administrateurs après entente avec les descendants de Cerf Berr jusqu'àu nombre de cinq. De préférence les syndics eux-mêmes devaient faire partie de l'administration. Mais s'il restait cinq descendants de Cerf Berr en Alsace ou en France, ceux-là seuls devaient être les administrateurs et aucun étranger ne devait se joindre à eux.
Néanmoins, Cerf Berr exprima le voeu que le rabbin de la région où se trouvait le siège du Bet ha-Midrasch et les syndics de la même région prissent soin que l'administration de sa fondation fût toujours gérée selon les principes de la justice et du droit, ainsi qu'il était stipulé dans l'acte de fondation. C'est pour cela que le rabbin devait avoir lui aussi une copie de cet acte, afin de pouvoir se rendre compte si tout était en ordre ou non et d'être à même de prendre les mesures nécessaires pour redresser des injustices.
Par cette fondation toutes les autres, faites antérieurement par Cerf Berr, étaient annulées, puisque toutes étaient englobées dans celle-ci. Cerf Berr se réserva le droit d'augmenter le capital, mais ni lui, ni aucun membre de sa famille ne pouvait jamais le diminuer ou changer les conditions inscrites dans l'acte de fondation. Les membres de l'administration qui signèrent l'acte de fondation le 21 Tischri 5547 à Bischheim furent : 1° Marx Berr ; 2° Samuel Séligmann Alexandre de Bouxwiller ; 3° Lippmann Berr ; 4° Méir Moutzig ; 5° Baruch Berr ; 6° Wolf Lévy de Bonn ; 7° Théodore Berr.
Malheureusement, cette oeuvre pieuse de Cerf Berr ne devait pas être de longue durée. On sait que l'immense fortune laissée par Cerf Berr à ses enfants fut détruite par la Révolution et par suite du refus de Napoldon de régler les dettes du Directoire.
La propriété de Tomblaine fut vendue, le 5 octobre 1810, par Hippolyte, alias Lippmann, Baruch et Théodore Cerfberr au comte et à la comtesse Molitor. C'est sans doute à cette date que la fondation de Cerf Berr cessa d'exister.