BISCHHEIM
APERÇU SUR L'HISTOIRE DE LA COMMUNAUTE DE BISCHHEIM
Texte publié dans la plaquette
éditée à l'occasion de la consécration de la synagogue de Bischheim le 13
septembre 1959, 10 eloul 5719
Bischheim se flatte à juste titre d'être une communauté-mère
en Alsace. Y résidaient les Juifs qui commerçaient ou travaillaient
à Strasbourg bien avant que cette métropole n'autorisât nos
coreligionnaires à élire domicile dans ses murs. Des documents historiques
nous les signalent dès le début du 17e siècle.
Bien connue est l'histoire de Cerf-Berr de Médelsheim,
fournisseur des armées, établi à Bischheim dès avant la Révolution (vers
1750), de son rôle prépondérant dans l'émancipation des Juifs, de son oeuvre
philanthropique immense, pour qu'il soit besoin de la rappeler ici.
Cerf Berr demanda à Moses
Mendelsohn, l'illustre philosophe, de rédiger un plaidoyer en faveur de
l'amélioration de la condition des Juifs en Europe. Mendelsohn chargea un de
ses amis chrétiens de cette tâche et en 1781, Christian Dohm publia un mémoire
intitulé : Ueber die bürgerliche Vorbesserung der Juden (Pour
l'amélioration de la condition civique des Juifs).
Cerf
Berr fit traduire cet opuscule qui avait eu un grand retentissement en Allemagne.
Il influença directement Mirabeau qui publia en 1787 un livre : Sur Moses
Mendelsohn et sur la réforme politique des Juifs.
L'idée de l'émancipation des Juifs faisait son chemin.
Des hommes célèbres en furent les porte-paroles (l'abbé Grégoire, etc.).
Cerf Berr décida Malesherbes
à réunir une commission chargée d'étudier les moyens d'améliorer la condition
des Juifs. Il en fut la cheville ouvrière. Le 28 septembre 1791 les Juifs
accédèrent enfin à la pleine citoyenneté française.
Le rôle joué par Cerf Berr de Bischheim dans l'évolution
de la situation des Juifs de son époque honore à jamais notre communauté. Il
fut d'ailleurs le premier juif autorisé à demeurer à Strasbourg avant la grande
révolution.
Il en est de même de celui de David Sintzheim, son beau-frère, célèbre pour avoir été le premier grand rabbin de France.
Après avoir enseigné dans l'école fondée par Cerf Berr à Bischheim, il présida
le Sanhédrîn rassemblé sur ordre de Napoléon 1er à Paris en 1806 et chargé de
régler les problèmes du judaïsme dans le cadre des constitutions impériales.
POPULATION
- En 1774 : 39 familles juives sur 210 habitants.
- En 1784: 473 individus (79 familles).
- Un décret impérial du 20 juillet 1808 obligea les
Israélites à adopter des noms de famille fixes et à faire la déclaration à
l'Etat Civil. La liste de ces noms relève l'existence de familles qui se sont
conservés jusqu'à nos jours à Bischheim.
- En 1850 : 759 personnes
- et en 1900, 298 personnes de religion israélite résident
à Bischheim.
- En 1936, la communauté qui groupait également les
Israélites demeurant à Schiltigheim, comptait 149 personnes.
- Le nombre de ses membres disparus par faits de guerre
entre 1940 et 1944 s'élève à 25 personnes.
- Elle compte aujourd'hui (1959) 52 familles membres de la Communauté.
La Communauté de Hoenheim sera sous peu rattachée à Bischheim.
INSTITUTIONS
-
Synagogues :
-
La première fut fondée avant 1781 par Cerf Berr. Auparavant,
le culte public avait dû se contenter de locaux provisoires.
- Trop petite et vétuste, cette synagogue céda la place à
un magnifique bâtiment dont la construction; décidée en
1834, se heurta à des difficultés financières, considérables.
Elle fut pourtant menée à bien grâce aux très grands
sacrifices consentis par toutes les couches de la population juive de Bischheim
(24.000 francs en 1837) et grâce à la politique énergique
de la Commission administrative de l'époque. Par delà le Consistoire,
le Conseil municipal, les autorités préfectorales, elle adressa
une pétition à Sa Majesté le Roi des Français
et obtint satisfaction.
Intérieur de l'ancienne synagogue
|
L'inauguration eut lieu le 24 août 1838, dans l'allégresse
générale, présidée par le Grand Rabbin de Strasbourg,
Arnaud Aron,
le Grand
Rabbin Schlomo Wolf Klein (plus tard grand rabbin à Colmar)
et le Rabbin
Isaac Baer plus connu sous le nom de Reb Itzik.
- Cette synagogue dont le centième anniversaire donna lieu à
une splendide cérémonie le 3 octobre 1937, ne survécut
pas aux blessures que lui infligea un bombardement aérien en 1944.
- Au même emplacement se dresse aujourd‘hui une maison de D., conçue
par M. Edmond Picard, architecte à Strasbourg. Elle espère remplacer
dignement l'ancienne.
Institutions scolaires :
- Un Beith Hamidrasch, où trois talmudistes enseignaient les
matières juives, avait déjà été fondé
grâce aux libéralités de Cerf Berr. En 1792, cette école
fut transférée à Strasbourg.
- En 1835, une école israélite ouvrit ses portes. Elle
compta bientôt une centaine d'élèves. L'exiguïté et l'insalubrité des locaux
nécessita la construction d'un bâtiment scolaire. De pénibles négociations
avec les autorités (de 1843 à 1847) aboutirent le 7 mai 1848 à l'inauguration
de la nouvelle école. L'enseignement des filles était assuré par deux
institutrices, celui des garçons par un instituteur (le dernier fut M. Metzger,
décédé en 1955).
- Les cours d'instruction religieuse fonctionneront
dorénavant dans une salle de classe moderne offerte généreusement par un membre
de la Communauté.
Cimetière :
L'ancienne synagogue de Bischheim
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La nouvelle synagogue - © M. Rothé |
- Jusqu'en 1797 les morts de Bischheim trouvaient leur
ultime demeure dans les grands cimetières d'Ettendorf et de Rosenwiller.
Depuis, le cimetière, appartenant en propre à la Communauté, se trouve à la
limite de la commune en direction de Hoenheim. De très vieilles tombes y sont
encore visibles.
Sociétés :
- De tout temps, il a existé de nombreuses sociétés de
bienfaisance à Bischheim ; celle des
Dames est encore très active. De même la Tare ‘Hevre (purification des morts)
continue à accomplir une de nos plus grandes mitsvoth.
Personnalités :
Elles furent si nombreuses, qu'il est impossible de les énumérer
toutes sans en oublier.
- Rabbins :
Joseph Moch d'Ettendorf (1764-1837)
Isaac
Baer (Reb Itzik) dont l'humour était apprécié
par ses coreligionnaires et par ses autres concitoyens (1809-1881). Il eut
comme élève à Bischheim le futur Grand Rabbin de France
Zadoc
Kahn.
Joseph Bloch (1820-1905)
Dr
Zacharius Wolf, ancien directeur du Séminaire de Colmar et
maître de nombreux rabbins et ‘hazanim d'Alsace.
Arthur Weil, ancien directeur de l'instruction religieuse à Strasbourg,
rabbin de Bâle, décédé il y a trois mois (juin
1959).
L'actuel Grand Rabbin du Bas-Rhin, M.
Abraham Deutsch et le Rabbin de Strasbourg, M.
Max Warschawski sont également d'anciens rabbins de Bischheim.
Originaires de Bischheim furent le Grand
Rabbin Schlomo Wolf Klein Wolf Klein, pilier de l'orthodoxie française,
le rabbin Félix Blum de Mulhouse, ainsi que le rabbin Lazarus Bloch
de Haguenau.
- ‘Hazanim (ministres officiants) :
Bischheim fut une pépinière
de ministres officiants grâce à son école. Nous viennent
à l'esprit les noms des frères Metzger (Rouen et Colmar), Roos
(Roubaix), Lévy (Haguenau), Civi (Metz), Kahn (Nancy), Klein (Nancy),
Heymann Weil (36 ans à Bischheim). A ce dernier succéda M. Georges
Schwartzfuchs présentement à Marseille.
De nombreux Baalé Tefila et Baalé Tekia ont
mis leur talent au service de la Communauté : Salomon Metzger, Israel
Klein, Elie Weill, Wolf Sternheim, Moïse Salomon, Albert Lévy,
Léopold Weil.
- Parnassim (présidents) :
Simon Lévy, Nathan Lévy,
Jules Klein (membre du Consistoire), Nathan Klotz, Moïse Salomon, Léopold
Schwarz, Bernard Klotz, Gabriel Blum, Fernand Bloch (2 fois), Paul Lazare,
Lucien Mossbacher, Jacques Salomon, Arthur Asch.
Sous la présidence de ce dernier, la Communauté construisit
la nouvelle Synagogue.
Actuellement la Communauté de Bischheim est administrée
par :
Messieurs Charles
Friedemann, rabbin
André Lazar, président; Werner
Hess ; Salomon Kahn (décédé en 1959); Max Lederer ; Alfred Weill ; Nathan Weil,
membres de la Commission Administrative. Ce dernier assure également, à la
satisfaction de toute la communauté, les fonctions de ministre officiant.
(La rédaction de cette esquisse historique a été facilitée
par le livret que le Professeur Ginsburger publia en 1937 lors du centenaire
de l'ancienne synagogue de Bischheim.)