"Pélican", c'est le nom par lequel, au début, nous avions entendu parler de Monsieur Fraenckel. Issu des E.I., il avait fait, ainsi que son épouse, une des premières "promos" d'Orsay. C'est là-bas que Castor (Robert Gamzon), créateur des E.I. avait fondé l'Ecole Gilbert Bloch pour former de nouveaux cadres communautaires qui suppléeraient aux ravages de la guerre dans leurs rangs. Monsieur Fraenckel aimait évoquer les idées utopistes de Castor, les expériences et les activités originales des résidents d'Orsay.
Orsay est resté un nom de rêve pour toutes celles et pour tous ceux qui y sont passés : la maison, le parc, les ballades et l'ambiance. Nous avons connu Orsay plus tard avec Manitou et ce lieu est resté pour nous un extraordinaire lieu de contacts, d'initiation au vécu juif et de ressourcement. Il est impossible de parler de Monsieur Fraenckel sans évoquer Orsay et Manitou. Puis ce fut le Maroc où notre maître passa dix ans. Là-bas il s'est imprégné, comme lui seul savait le faire, du judaïsme sefarade, de son mode de vie, de ses maîtres et de sa musique. Jamais nous n'oublierons ces moments privilégiés où à l'occasion d'une fête ou d'un mariage dans sa famille, Monsieur Fraenckel recevait ses invités en djellaba. Le monde séfarade, Monsieur Fraenckel le vivait, le chantait et l'étudiait intensément comme par ailleurs le monde hassidique. Combien de "melavé malka" ou de soirées "bakashoth" avons-nous encore aujourd'hui en mémoire !
Mais ce qui nous est resté ancré le plus profondément, c'est son enseignement. Monsieur Fraenckel nous a ouvert toutes grandes, les portes de la Torah, l'envie d'étudier avec lui, de l'écouter, de bénéficier de son approche du monde juif, d'entendre enfin un discours adulte et sérieux, un discours exempt de démagogie. Il était également un conteur plein d'humour avec des anecdotes savoureuses. un grand connaisseur du monde juif alsacien dont il était issu.
Baerenthal, Marmoutier, Orsay, le Maroc, Strasbourg et tant d'autres lieux, autant d'étapes qui ont jalonné cette vie à la fois si riche pour lui et pour nous. ses élèves. Autant de lieux, autant de facettes de ce maitre extraordinaire, irremplaçable, auquel nous n'avons pas su donner en retour le kavod (l'honneur) et la place qu'il méritait. Nous avons eu un maitre, et nous n'avons pas été assez ses disciples. Et pourtant, nous parlons son langage, nous nous référons sans cesse à lui, nous voudrions toujours et encore le solliciter pour nous expliquer, lui demander conseil !
Nous ne nous ferons jamais à sa disparition car toujours résonnent en nous ses paroles, ses chants, sa présence.
Publications
Deux oeuvres posthumes d'André-Aaron Fraenckel ont été publiées :
Textes d'André-Aaron Fraenckel sur notre site :