Evelyne et Jean-Georges KAHN
Hava et Yochanan COHEN-YASHAR
Je suis né à Merlebach, en Moselle, en 1934. Mon enfance a été marquée d'une manière décisive par la guerre mondiale et l'angoisse de la Shoah, à laquelle nous avons échappé de justesse.
Après la guerre, j'ai fait mes études à l'Ecole Maïmonide, à Boulogne sur Seine, près de Paris, puis au Lycée de Forbach, Moselle.
J'ai étudié l'histoire et la géographie à l'Université de Strasbourg.
Evelyne est née à Vichy, en 1940. Elle a fait ses études au lycée de Mulhouse.
Evelyne a étudié les lettres modernes dans la même université que moi. Nous nous sommes connus au restaurant casher des étudiants.
Nous avons convolé en justes noces en 1961 et notre lune de miel, qui dure encore, nous a menés en bateau sur les rivages d'Israël. Nous avons passé un an dans le Kibboutz Shaalvim, en face de l'abbaye de Latroun (à l'époque en territoire ennemi !).
Après avoir enseigné dans plusieurs lycées de Galilée et de Jérusalem, je suis passé à l'Université Bar Ilan où j'ai enseigné le grec, le latin, la littérature chrétienne antique et surtout la philosophie de Philon d'Alexandrie. De retour à Strasbourg, j'ai fait un doctorat sur Philon d'Alexandrie et par la suite j'ai contribué à la traduction des œuvres de Philon en français (Paris, éditions du Cerf) et en hébreu (Jérusalem, Mossad Bialik). J'ai aussi travaillé aux Archives Historiques de la Ville de Jérusalem.
Philon d'Alexandrie (né en l'an 13 avant l'ère chrétienne, mort en 54) devrait servir de pont entre la culture philosophique générale et les études juives en particulier. Son œuvre immense (plus de 2000 pages en grec) est imprégnée de philosophie classique, mais elle est parfaitement compatible avec l'essentiel du judaïsme : elle énumère les observances de la Torah telles que nous les pratiquons encore de nos jours et fournit d'amples explications à ce sujet. Elle n'est nullement païenne, comme la philosophie de Platon et d'Aristote, et elle précède le christianisme. Néanmoins, cette œuvre est peu connue en Israël, parce qu'elle ne fait pas partie des études dans les écoles talmudiques (yeshivoth). On y trouve pourtant l'écho précurseur de nombreux sujets d'étude typiquement juifs dans la perspective d'une pensée universelle.
J'ai publié de nombreux articles en hébreu et en français sur mes recherches dans le domaine des Etudes juives. Signalons particulièrement mon livre sur Le Midrash à la lumière des Sciences humaines dont nous présentons ici un extrait qui concerne la fête de Rosh ha-Shanah.
Nous avons quatre enfants et, pour l'instant, sept petits-enfants, qui vivent tous en Israël.
Nous avons fait imprimer en hébreu un petit livre écrit en commun pour faire connaître à nos enfants, à nos petits-enfants et à nos amis nos mésaventures pendant la période de la Shoah et de notre jeunesse jusqu'à la création de l'Etat d'Israël . Nous avons illustré ce livre avec de nombreuses images : photographies de l'époque et dessins originaux. Nous avons l'intention d'en publier une traduction française d'ici quelques mois, et d'y ajouter d'autres textes en prose et en poésie retrouvés dans les archives familiales. De même, nous avons l'intention de diffuser dans le public le fac-similé d'un cahier de "mémoires" que j'ai écrit en 1943 et qui a déjà été transcrit et présenté presque intégralement dans le Site alsacien. Evelyne raconte elle aussi les péripéties de son enfance et de son sauvetage, Elle évoque le souvenir des membres de sa famille qui ont péri dans la tourmente.
Ces textes font suite à un récit en partie imaginaire que j'ai publié en hébreu en 1989 intitulé Héssed Neuraïkh (la grâce de ta jeunesse), Jérusalem, ed. Reuven
Dans tous ces textes, nous essayons de sonder l'insondable, c'est-à-dire de faire revivre dans nos consciences l'ambiance extraordinaire de l'époque de la Shoah. Les témoignages et la documentation historique à ce sujet sont si abondants et si sinistres qu'on risque d'y perdre le goût de la vie. Des publications récentes, comme Les Bienveillantes de Jonathan Littel, engendre en effet un réel dégoût. Quant à nous, nous avons essayé de restituer ce qu'on peut rappeler d'une enfance inquiète et persécutée, mais néanmoins orientée vers un avenir prometteur quand on a eu la chance d'échapper au pire.