Le Week-End du 21 juillet 2013 les EI ont fêté leurs 90 ans d'existence.
Voici l histoire des E.I.F de Mulhouse et (un peu) d'Alsace;
Naissance du mouvement E.I.F
A 17 ans, ce petit-fils de rabbin, construit, avec l'aide d'Edmond Fleg, dit Chef Fleg, son aîné de trente ans, écrivain et penseur juif notoire, un projet pluraliste ouvert aux jeunes israélites issus de tous les milieux sociaux et de toutes les tendances du judaïsme ; un projet qui prône une éducation juive modernisée avec des références fortes au scoutisme inventé seize ans plus tôt par Baden Powell. Celui-ci était, désireux de créer un mouvement d'éducation pour "faire des jeunes d'aujourd'hui les adultes de demain", susceptibles de rendre des services à leur communauté.
Dès huit ans, les jeunes apprennent l'histoire du Livre de la jungle et de Mowgli, la débrouillardise, le service du prochain (la B.A = Bonne Action quotidienne), le respect de la nature et vivent, dans un mouvement qui n'est pas encore mixte, une sorte d'indianisme et de chevalerie, avec une vie en communauté, des sorties en forêts, des camps, et un mode de vie qui les enthousiasment.
C'est dans cet état d'esprit, en alliant mystique juive et valeurs
scoutes que Robert Gamzon, totémisé selon la tradition scoute
s'inspirant de l'indianisme "Castor soucieux" crée en 1923,
pour les jeunes juifs, religieux ou non, majoritairement citadins, le mouvement
des Eclaireurs Israélites de France.
La totémisation est une épreuve initiatique à l'issue
de laquelle le scout, adolescent ou jeune adulte, se voit attribuer un nom
d'animal complété d'un adjectif sensé caractériser
sa personnalité.
En mai 1923, les sept premiers E.I.F font leur "promesse" à
la Synagogue de La Victoire à Paris.
Puis, en 1924 se crée, à Paris également, la première
"Troupe" d'Eclaireurs (pour les enfants de douze
à dix-sept ans), suivie en 1925 par la première"Meute"
de Louveteaux (pour les enfants de huit à onze ans)…
des noms en vigueur au sein du mouvement scout et en rapport avec le Livre
de la jungle de Rudyard Kipling qui a inspiré Lord Baden Powell.
En 1932, lors du Conseil National de Moosch (Haut-Rhin), les E.I. adoptent une conception du judaïsme appelé "minimum commun" rassemblant à la fois idéal religieux et idéal sioniste. Ce "minimum commun" est appliqué encore aujourd'hui au sein du mouvement !
Les E.I.F à Mulhouse :
C'est en 1928, que se crée à Mulhouse, à l'initiative de Sigismond Haït, totémisé Loup Gris, la Troupe Ezra, le deuxième groupe local EI qui voit le jour en France métropolitaine.
Un an plus tard, un groupe local voit également le jour à Strasbourg sous l'égide de Raymond Mai, totémisé Baloo, et Frédéric Hammel, totémisé Chameau.
Pour épauler Sigismond Haïtà Mulhouse, Adrien Gensburger, totémisé "Ourson Noir" devient chef de patrouille adjoint, fort de l'expérience acquise au sein des E.U où il a été louveteau puis éclaireur. Grâce à ses capacités et son engagement, il devient tout naturellement chef de patrouille en 1932 (il a 16 ans) puis chef de troupe jusqu'à son appel sous les drapeaux en 1936. D'autres chefs et cheftaines le rejoignent dans la troupe Ezra, dont Nelly Meyer, qui fut l'une des premières cheftaines EI à Mulhouse.
Les E.I.F n'étant à cette époque pas mixtes, des groupes
similaires aux Louveteaux et aux Eclaireurs se mettent en place pour les filles.
Les fillettes âgées de sept à onze ans se retrouvent chez
les Petites Ailes (P.A), qui constituent la branche cadette
de la F.F.E. (Fédération Française des Eclaireuses) tandis
que les jeunes filles plus âgées font partie des Eclaireuses.
Les P.A sont regroupées au sein d'une "envolée" et
se réunissent dans un local appelé le "nid". Leur
cheftaine s'appelle généralement "Plume grise". De
la même manière que les Louveteaux sont regroupés en "Meutes"
composées de "sizaines" de six louveteaux, "l'envolée"
est composée de "couvées" regroupant six Petites Ailes.
A cette époque à Mulhouse, la cheftaine des Eclaireuses se nomme
Suzanne Lang, tandis que Ninon Weyl est
cheftaine des P.A.
Alors qu'en 1928, le Rabbin René Hirschler a pris, à 23 ans, la succession du Rabbin Jacob Kaplan, la communauté juive de Mulhouse est réputée pour son dynamisme, son nombre et sa richesse. Des jeunes de tout âge et de tout milieu se retrouvent les jeudis, au sein du mouvement nouvellement crée des E.I. qui deviendra le fer de lance de la communauté.
C'est dans ce contexte que mon père, Jean Weill, né en 1919 à Mulhouse, est recruté par Nelly Meyer et devient louveteau dès la création de la meute. Il découvre, alors qu'il est issu d'un milieu juif peu observant, le scoutisme communautaire avec un enthousiasme qui ne se démentira jamais. Il s'y fait, lors de son premier camp à Wildenstein, deux grands amis; Claude Bloch et Ralph Weyl, frère de Ninon. Il côtoie également Louis-Lazare Jacob, surnommé "Cacao", né à Mulhouse en 1920 et qui, prenant en 1943 le pseudonyme de Jean-Louis Jaubert, deviendra comme basse un des célèbres "compagnons de la chanson", groupe qu'il dirigea de nombreuses années. Il fait aussi connaissance de nombreux autres juifs mulhousiens qui des années durant resteront ses amis et qu'il retrouvera avec plaisir après guerre.
A onze ans, Jean Weill devient éclaireur au sein de la troupe Ezra, composée de plusieurs "patrouilles". Sa patrouille est celle des "Ecureuils" et son Chef de Patrouille (C.P), A. Bloch est totémisé "Flamand Philosophe". Trois ans plus tard, et après avoir obtenu un certain nombre de "brevets", il devient C.P de la patrouille des "Lions". Compte tenu de son engagement sans failles, de sa petite taille et de son fort caractère, il est totémisé l'année suivante, et se voit attribuer le surnom plutôt bien adapté de "Moucheron Belliqueux" ! Par la suite (1935-36) il devient "routier" puis "instructeur" au sein d'un groupe de jeunes de son âge. En 1937, il a l'honneur de faire partie, avec son ami d'enfance Ralph Weyl, de la délégation EI du camp-école interfédéral de Cappy (Somme) qui regroupe tous les mouvements scouts. En août de la même année il participe, moment inoubliable, au "Jamboree " de Vogelsang en Hollande. Le "Jamboree" étant un gigantesque camp international qui rassemble tous les quatre ans des délégations scoutes du monde entier et dont l'existence perdure encore à ce jour pour la plus grande fierté des participants
En 1939, neuf ans après son entrée dans la troupe Ezra, Jean Weill devient chef de troupe puis Commissaire Local à vingt ans, succédant à Ninon Weyl, tandis que Loup Gris, comme Chameau, sont devenus "Commissaires Régionaux" et Castor, "Commissaire National". (N.B en 1953, succédant à Castor puis à Isard, Loup Gris deviendra Commissaire National des EI).
Les E.I.F pendant la guerre :
La guerre et l'expulsion des juifs de Mulhouse mettent, pour un temps, un
terme à l'aventure E.I.F Mulhousienne.
Mais pendant cet exode qui bouleverse leurs vies et celles de leurs proches,
nombre d'E.I.F n'oublient pas leurs idéaux scouts d'entraide et d'altruisme.
Rapidement, malgré la dislocation des communautés, ils s'organisent.
Si les plus âgés tels Adrien Gensburger et Jean Weill sont, du
fait de leur âge, mobilisés, d'autres chefs et cheftaines, trop
jeunes pour être appelés sous les drapeaux cherchent à
aider et reconstituent comme ils peuvent des noyaux d'unités E.I. tant
est fort leur sentiment d'appartenance au mouvement.
Conscients du désarroi dans lequel se trouvent les enfants évacués, isolés, coupés de leurs copains, leurs repères et parfois leurs familles, les chefs E.I souvent très jeunes, s'organisent pour les regrouper et leur proposer des activités. Les E.I.F de Strasbourg sont, semble-t-il parmi les premiers à se structurer en recensant les éclaireurs déplacés dans le Sud.
Dans le même temps "Pivert"
(Denise Gamzon), épouse de Castor, ouvre six Maisons dans le but
d'accueillir, à la campagne, de nombreux enfants juifs, Français
évacués ou réfugiés de nationalité étrangère.
La Maison de Moissac, dans le Tarn et Garonne, reste dans
la mémoire des anciens EIF car c'est là que s'établit
le quartier général des EIF qui crée et distribue du
matériel pédagogique destiné aux cadres du mouvement
qui prennent en charge un maximum de jeunes.
Par ailleurs dans une maison voisine, les enfants sont accueillis, encadrés par de jeunes cheftaines EI qui se sont improvisées monitrices. Entre 1939 et 1944, environ cinq cents enfants de deux ans à dix-huit ans ont ainsi séjourné à la Maison de Moissac, quelques jours pour certains, plusieurs années pour d'autres. Le but de ces maisons est de faire vivre, dans une ambiance scoute, juive et dans des conditions les plus "normales" possible, ces enfants séparés de leurs parents, et qui seront, en guise de formation professionnelle, initiés au travail manuel et agricole. Parmi ces jeunes, pour la plupart, non formés à la vie scoute un certain nombre vient des camps de Gurs et de Rivesaltes.
Un chantier de maraîchage, participe au ravitaillement de la collectivité. Le chantier rural de Lautrec est créé en novembre 1940. Sous le couvert du "retour à la terre" prôné par le gouvernement de Vichy, il accueille plus de 90 adolescents juifs qui y sont cachés. Denise Gamzon, en prend la direction en mars 1941. Adrien Gensburger, notre ancien "Ourson Noir" mulhousien devenu ingénieur agronome, y officie avec compétence.
Rappelons pour mémoire que Denise Gamzon née Lévy et totémisée "Pivert", est fille de juifs mulhousiens qui comme beaucoup d'Alsaciens ont opté par patriotisme pour la France. Cheftaine à Paris, elle fut l'un des piliers de la section israélite de la Fédération française des éclaireuses (FFE), créant en 1926 la première section d'éclaireuses EIF.
Dès novembre 1943, quelques aînés de Lautrec ont décidé de constituer une équipe de maquisards, qui devrait s'entraîner pour lutter contre l'armée allemande. Dirigés par Roger Cahen, lieutenant, et Adrien Gensburger, adjudant, ils créent un maquis, composé exclusivement de "compagnons" EIF. Accompagnés d'Henri Glowinski, ils forment un groupe juif de combat qui prend le nom de "Compagnie Marc Haguenau", ancien secrétaire général du mouvement, tragiquement décédé.
Le 20 août 1944, après le combat pour la prise du train allemand chargé de munitions entre Mazamet et Castres, à Labruguière, et le décès le 8 août de trois E.I.F; Rodolphe Horwitz, Roger Gotschaux et Gilbert Bloch, lieutenant de la 2ème compagnie de Vabre, le groupe de 150 maquisards, dont une majorité d'EIF, reçoit la reddition des 4 200 soldats et 71 officiers allemands de la garnison de Castres et défile devant eux au cri de : "Wir Sind Juden"!
A cette même époque, Ninon Haït, née Weyl, ancienne cheftaine des Petites Ailes à Mulhouse, sœur de Ralph Weyl et épouse de Loup Gris, officie auprès des internés de Gurs et dirige un service d'aide sociale organisé par les EIF. Avec l'aide de l'Abbé Glasberg, elle parvient à faire s'échapper un certain nombre d'internés.
Elle rejoint ensuite la Sixième, (appelée ainsi car il s'agissait de la sixième section de la Direction de la Jeunesse au sein de l'UGIF = Union Générale des Israélites de France), le mouvement devenu clandestin des EIF, qui, dans l'urgence, s'est structuré pour prévenir, cacher et sauver les jeunes juifs, français ou étrangers, menacés de rafles ou dont les parents ont été arrêtés par la Gestapo ou par la police française. La Sixième dont l'organisation remontait à 1942, fabrique notamment de faux papiers, place des enfants dans des familles en France, fait passer les frontières pour rejoindre la Suisse, Londres ou la Palestine avant d'intensifier encore son action en rejoignant la lutte armée et les maquis.
A sa tête se trouvent donc, entre autres, deux anciens E.I.F mulhousiens
:
- Ninon Haït-Weyl, précédemment citée
- Henri Wahl, né en 1909, totémisé Chamois
qui depuis l'exode gère le groupe local de Vichy et, de 1941 jusqu'en
août 1944, contribuera au sauvetage de nombreux enfants et adultes juifs,
apportant parce qu'il est leur aîné, écoute, soutien et
conseil à ces équipes de jeunes, filles et garçons, qui
affrontent des situations dramatiques. En 1943, il est chargé, à
titre d'officier de recruter les jeunes pour le maquis.
Tous trois adhèrent au mouvement des Eclaireurs Unionistes avant de
devenir des E.I.F. convaincus. Raymond Winter reprend, dès l'exode
de sa famille en zone libre, ses activités d'éclaireur. A peine
installé à Montpellier il recrée une troupe, secondant
ainsi le Rabbin Henri Schilli,
aumônier des EI, totémisé "Tison".
Il devient commissaire local EI. Il organise alors de nombreuses activités
communautaires et scoutes pour occuper les enfants réfugiés
et déracinés. Il aide également le "clan des routiers"
de Lyon puis devant les détresses côtoyées se tourne vers
la clandestinité afin de protéger, cacher et faire fuir les
juifs étrangers visés par les décrets de Pétain.
Raymond qui anime des camps E.I et travaille en collaboration avec l'OSE,
est rejoint pendant l'été 1941 par son cousin et ami Marcel
Gradwohl, totémisé "Souris".
Tous deux travaillent sous les ordres d'Henry Wahl et de Ninon Weyl-Haït.
Devenus clandestins ils obtiennent de faux papiers et en font fabriquer pour
les juifs traqués pour qui ils recherchent des planques et avec qui
ils gardent le contact.
Roger Gradwohl, leur aîné de deux ans, les rejoint dans la clandestinité
en 1943 et se spécialise dans la fabrication des fausses cartes d'identité
et d'alimentation.
Le 9 juin 1944, alors qu'ils s'apprêtaient à rejoindre le maquis
à St Flour, Raymond Winter, Roger Gradwohl et son frère Marcel
Gradwohl ainsi qu'Edgar Lévy, (40 ans) responsable de la "Sixième
adulte", sont victimes d'une rafle, destinée à venger des
opérations réussies de sabotage organisées par le maquis.
Repérés parce que juifs, ils sont fusillés avec 21 autres
otages à Soubizerges.
Marcel Gradwohl avait 23 ans, son frère Roger et Raymond, leur cousin,
en avaient 21… Ils avaient comme beaucoup d'autres voulu vivre
jusqu'au bout leur engagement scout, juif et patriotique, ces trois composantes
du sigle E.I.F. = Eclaireur Israelite de France.
Leur loyauté, leur sens du service et du souci de l'autre, leurs valeurs
ont contribué à sauver des centaines de jeunes juifs et je souhaitais
leur rendre cet hommage.
Comme celles-ci d'autres vies ont été ainsi brisées et je pense également avec émotion aux deux fils de "Chef Fleg", tous deux disparus pendant la guerre et à tant d'autres… Tant d'autres, assassinés, fusillés, déportés, dont Castor énuméra pendant plus d'une heure les noms, qualités et conditions de la disparition, lors du Conseil National de 1946.
Heureusement il y eut aussi les survivants nombreux, plus fidèles et investis que jamais dans le mouvement E.I.F.
Après la guerre :
A Mulhouse, les juifs survivants reviennent et se réinstallent comme
ils peuvent, recherchant logement, travail, familles dispersées ou
décimées.
En 1947, Odette Weill, "Baghera", sœur de
Jean Weill, reprend la meute de louveteaux, secondée
par Denise Breisacher, totémisée "Bangkok".
Ses louveteaux s'appellent entre autre Michel Kuflik, Gérard Kahn,
Gustave Fessel, Noël Grumbach, X Schwob, Teddy Kallay. Les réunions
ont toujours lieu le jeudi et les sorties le dimanche, souvent dans la vallée
de Thann.
Cette organisation dure environ trois ans… Si les éclaireurs et les louveteaux dépendent du mouvement E.I.F, les P.A. et éclaireuses appartiennent encore à la FFE (Fédération Française des Eclaireuses) qui s'auto-dissout en 1964. Elles rejoignent les E.I.F en 1969 pour créer les E.E.I.F. (Eclaireurs et Eclaireuses Israélites de France).
De belles amitiés datent de cette époque. Aux louveteaux on trouve Pierre Weill, Philippe Kahn, Jean Maurice Kahn, Jean-Louis Bernheim, Jean-Mic Meyer, Serge Lévy, Jean Marc Hosanski, Yves Meyer,etc... Chez les filles; Jane Meyer, Evelyne Kahn, Sylvie Hosanski, Evelyne Apter, Claudine Meyer, Danièle Meyer, Martine Weill, etc…Les camps ont lieu à Ste Croix en Plaine, au "Pré Renard", dans la maison EI. Malheureusement, suite aux ennuis de santé de leurs chefs et à l'absence de relève, le groupe mulhousien se dissout. Un certain nombre d'EIF voulant rester dans un mouvement scout adhère aux E.U. qui se réunit dans son local traditionnel de la rue St Jean à Mulhouse.
En 1964 les EEIF redémarrent à Mulhouse. Marie-France Furth reprend le groupe d'éclaireuses, son frère, Pierrot, s'occupe des éclaireurs. Denise Hosansky est commissaire local. Les activités reprennent avec une vigueur nouvelle. Nos réunions ont lieu au sein du centre communautaire inauguré quelques années plus tôt. L'ambiance est joyeuse, traditionnelle, conviviale, les activités nombreuses.
Les E.E.I.F de Mulhouse à mon époque :
Mulhouse n'étant pas une ville universitaire, il apparait difficile de trouver des chefs et cheftaines assumant un groupe dans la durée. De ce fait, c'est très jeune (16 ans) que les "routiers"(on parle à cette époque d"' Equipe") ou éclaireurs/éclaireuses se trouvent à assumer des responsabilités de chefs. Sylvie Hosanski, Martine Weill, Solange Olff, Corinne Karsenty sont alors cheftaines louveteaux de "meutes", devenues mixtes. Les éclaireuses ont pour cheftaines : Jane Meyer, Evelyne Kahn, Danièle Meyer, Claudine Meyer. Les éclaireurs ont pour chefs Jean-Marc Gensburger, Israël Nisand etc. La deuxième génération d'EEIF prend la relève dans la même ambiance chaleureuse, le respect des valeurs scoutes, juives et du minimum commun. De cette époque nous n'avons gardé que de bons souvenirs, celui des réunions, des jeux de piste au Tannenwald, des veillées de chants autour d'un feu de camp, des sorties (à Dynamo entre autres), etc…
Aujourd'hui je frémis à l'idée que si jeunes nous ayons été amené(e)s à assumer la responsabilité d'enfants à peine moins jeunes que nous : Denis Kahn, Rémy Meyer (futur président de la Communauté de Mulhouse), Michel Bernheim, Michel Hirschorn, Danièle et Claude Apter, Jean Feissel, Philippe Feuerstein, Pascal Neumann, François Loeser, et beaucoup d'autres comptèrent parmi les plus fidèles de nos louveteaux.
A cette époque, Hubert Rueff est notre commissaire local et Loup (Jacky Meyer-Moog) le commissaire régional.
Lors d'un camp de formation de chefs louveteaux à Flon en décembre 1968 avec "Renne" notre intransigeante chef de camp, je rencontre celui qui deviendra, en 1974, mon époux et est, lui, chef louveteaux à Strasbourg. Je suis la seule mulhousienne. Francis Gradwohl et Jean-Lou Hallel, viennent de Strasbourg, les autres jeunes chefs et cheftaines sont originaires de Metz, Marseille, Grenoble, Paris PARIS, etc… Dans ce contexte d'apprentissages et d'échanges naissent également d'inaliénables amitiés.
Notre groupe local mulhousien prend à cette époque le nom de "Mordehaï Anilewicz" en l'honneur du chef de la révolte du ghetto de Varsovie. Mon frère, Pierre, participe à trois camps d'été successifs de 1969 à 1971. Y naissent des amitiés qui dureront des décennies! Au centre des délégations mulhousiennes, la "fameuse" patrouille des Poulains ("Poulains Plein… d'entrain") est composée, dès Sausses, (1969) dans les Basses Alpes des inséparables Yves Meyer et Jean-Maurice Kahn (tous deux chefs de patrouille), Serge Lévy, Philippe Kahn, Jean-Marc Hosansky, Jean Louis Bernheim, Daniel Hochner, Denis Tuchel, Jean-Luc Olff et Pierre Weill. La patrouille est imbattable aux jeux sportifs et aux concours de cuisine, ainsi qu'au plus officieux… concours de vitesse au Bench. Les mêmes ou presque participeront aux camps de Benodet et Vigneaux. Séparés par les aléas de la vie et des milliers de kilomètress parfois, ces anciens "éclais" continuent de se rencontrer régulièrement, et avec un plaisir toujours renouvelé.
Quelques temps plus tard, lorsque notre commissaire local, Hubert Rueff, fidèle à l'idéal sioniste E.I, nous apprend qu'il fait son alyah, je reprends le flambeau en devenant à mon tour et comme mon père, 32 ans plus tôt, commissaire local. Le Strasbourgeois Jean-Lou Hecker, est alors commissaire régional et le futur grand rabbin Sitruck, ancien EI lui-même et rabbin à Strasbourg est notre aumônier de la jeunesse.
Des ennuis de santé m'ayant empêché de camper cet été là, c'est au domicile d'Evelyne Kahn et en présence d'EI mulhousiens et strasbourgeois que je suis totémisée, "Daffy sensible et enthousiaste". Mon mari quant à lui, est totémisé sur son lieu de camp, "Girafon fidèle et attachant"… Etrange coïncidence car il se voit attribué un totem très semblable à celui de Raymond Winter "Girafe énergique", né le même jour que lui, 29 ans plus tôt et décédé dans les circonstances tragiques relatées plus haut.
Avec mes parents toujours fidèles au mouvement et d'autres amis, j'assiste en en 1973 au 50ème anniversaire qui se déroulera dans le Massif Central sous un tel déluge que le plan ORSEC dut être déclenché pour rapatrier les nombreux EI, anciens et actuels, présents à ce grand rassemblement.
Je reste commissaire local jusqu'à notre mariage en 1974, continuant d'assumer aussi longtemps que possible les louveteaux puisque, contrairement à la majorité de mes amies parties faire leurs études à Strasbourg, Nancy ou en Israël, je reste faire mes études d'assistante sociale (encore une tradition EI !) à Mulhouse.
Jean-Luc Olff, dit "Schlucky", assumera par la suite la responsabilité de Commissaire Local. Avec Denis Tuchel, Jean-Luc, le légendaire "Schlucky" sorte de symbole mulhousien, sera et pendant de nombreuses années, de toutes les activités, rassemblements d'EI puis d'anciens EI et participera à plusieurs Jamboree, agrandissant ainsi sa collection de foulards et médailles internationales.
Mon beau-frère Laurent Gradwohl, Strasbourgeois né en 1966, sera, lui, Commissaire National des EIF en 1991 et 1992. Comme tous ses prédécesseurs il demeurera dans la légendaire maison du 27 avenue de Ségur à Paris, siège des EIF !
Les EI à l'époque de mes enfants
Au cours de ces années les terminologies du mouvement ont changé.
Quatre branches le constituent :
- La Branche Cadette, ou bâtisseurs ("bâts"), remplace
les louveteaux.
- La Branche Moyenne, ou éclaireurs ("éclais"), regroupe
les jeunes de 12 à 15-16 ans
- La Branche Perspective, ou "PIF" (Perspective Israélite
de France), prépare les jeunes à l'animation
- La Branche Animation, ou animateurs ("animos"), encadre les jeunes
Lorsque mes filles sont en âge d'entrer aux EI, en tant que "bât", le groupe local de Mulhouse est en activité mais mes filles n'"accrochent" guère. Elles participent, à notre grand regret, avec un enthousiasme modéré aux activités et camps.
Quelques années plus tard, en âge cette fois d'être éclaireuse, ma fille cadette, Myriam, souhaite renouveler l'expérience. Malheureusement, le groupe local de Mulhouse, qui a continué à subir l'érosion de ses équipes d'animation partant vers leurs 18 ans pour étudier dans d'autres villes, n'existe plus. C'est donc avec un groupe local strasbourgeois appelé Ben Gourion (à cette époque, Strasbourg compte deux groupes locaux) qu'elle doit aller pour son premier camp éclaireur en 1993, soit l'année du 70ème anniversaire des EEIF. Le camp d'été a lieu en Lozère où se retrouvent cette année là tous les EEIF, actifs ou anciens, pour fêter l'anniversaire du mouvement. Le seul Mulhousien qui l'accompagne est Jonathan Ach (fils d'E.I. lui aussi). Leur chef de camp est Anne Samuel.
Bien que continuant pendant quatre années consécutives à
camper avec le groupe de Strasbourg Ben Gourion, l'objectif de ma fille et
des camarades mulhousiens qui la rejoignent est recréer une
entité E.E.I.F à Mulhouse.
Ce sera chose faite à partir de 1996 avec d'abord la Branche Moyenne,
puis la Branche Cadette l'année suivante lorsque de nouveaux animateurs
viennent grossir les troupes. Ils choisissent la continuité puisqu'ils
reprennent les couleurs du foulard (bleu et blanc) et le nom du groupe local
(Mordechaj Anielewicz) de notre époque.
Les EI d'aujourd'hui
Le Groupe Local de Mulhouse a fusionné avec celui de Colmar
et a pris pour nom celui de "Buisson Ardent".
En effet, partant du constat que deux Groupes locaux ne pouvaient plus survivre
seuls, du fait du déclin démographique des deux communautés,
les décideurs communautaires, avec l'aide précieuse de Tsilla
Darmon, responsable de la région Est ont décidé de recréer
un G.L (groupe local) unique pour ces deux communautés.
Ce GL compte aujourd'hui environ trente jeunes répartis dans les trois branches. Les activités (une environ, toutes les trois semaines) se déroulent alternativement dans les deux villes. Il a pris pour nom celui de "Buisson Ardent" délaissant ceux de "Mordechai Anielewicz" (pour celui de Mulhouse) et " Daniel" pour celui de Colmar. Cet abandon des noms auxquels tenaient les Anciens des deux villes ne s'est pas fait sans nostalgie, particulièrement peut être pour Colmar car le prénom de Daniel avait été donné en honneur et en souvenir de Daniel Guedj, jeune chef E.I, mort à vingtans, lors d'un terrible accident de voiture et alors qu'il allait rejoindre son camp. Mais dans l'intérêt des enfants il fallait continuer, créer pour avancer et réunir les deux groupes pour permettre leur survie…
Si le foulard de Mulhouse était bleu et blanc il est désormais bleu, rouge et vert. Bleu, parce que c'est la couleur commune à tous les foulards de la région Est, rouge comme le blason de la ville de Mulhouse et vert car le blason de la ville de Colmar est rouge et vert.
La dynamique du G.L s'intègre dans celle de la Région Est qui regroupe les GL de Strasbourg, Colmar-Mulhouse, Nancy, Metz et Luxembourg et les relations entretenues entre ces G.L sont très étroites.
En ce qui concerne le nom de "Buisson Ardent", attribué
au GL unique de Mulhouse et Colmar, il s'agit du totem scout d'Evelyne
Askenazi, sœur de
"Manitou" (Léon Askenazi) née en 1926 à
Oran. Entrée aux EI d'Oran à 18 ans, elle est allée quatre
ans plus tard à l'école
des cadres d'Orsay, sous la direction de Castor et Pivert.
Elle a participé à de nombreux projets et est devenue en 1963
responsable de la FFE (Fédération Française des Eclaireuses).
Elle a exercé des responsabilités diverses.
Son totem lui vient de son caractère brûlant et piquant mais
également de sa haute conception de la place de la femme dans la société.
Elle vit aujourd'hui en Israël.
90ème anniversaire :
CPMG (= "Cordiale Poignée de Main Gauche " est le signe de ralliement des scouts depuis la création du mouvement par Bi.Pi.=Baden Powell)