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Lorsque Willy naît à Strasbourg le 22 décembre 1914, c'est un moment d'immense joie pour ses parents, Joseph et Lucie, née Hirsch, qui attendent ce moment depuis plus de dix ans déjà. Hélas, son père, incorporé dans l'armée allemande ne peut, pas plus que ses grands-parents, venir à Strasbourg pour la brith-mila. Sa mère contacte alors son ami d'enfance de Hatten, le Rabbin Arthur Weil, rabbin de Bischheim (plus tard rabbin de Bâle), qui prend sur lui l'organisation de la brit-mila et devient le sandek du petit garçon.
Willy Frank passe son enfance à Haguenau (Bas-Rhin) auprès de ses parents qui tiennent un commerce de Vins et Spiritueux.
Il poursuit ses études au Lycée de Haguenau où il obtient son baccalauréat. Suivent ensuite de brillantes années à la faculté de Médecine de Strasbourg où il passe le Doctorat en 1939. L'Université de Strasbourg est repliée à Clermont-Ferrand et Clairvivre (Dordogne), mais c'est à Bordeaux, accueilli par la Faculté de Médecine et de Pharmacie, qu'il soutient sa thèse en novembre 1939.
Très tôt, il s'implique dans la vie communautaire. Proche des rabbins Simon Auscher, Meyer Jaïs puis Robert Dreyfus, il participe activement aux activités en organisant des sorties pour les jeunes, des oneg Shabath … Mais, surtout, il devient l'élève assidu du 'hazan Alphonse Raas, 'hazan exceptionnel, doué d'une voix extraordinaire et d'un rare talent. Dès les années 1930, Willy Frank se prépare à reprendre le flambeau en communiquant au chœur qu'il dirige son enthousiasme pour la 'hazanouth alsacienne traditionnelle.
Affecté à Angers comme médecin-auxiliaire sous les ordres du Dr. André Bernheim, il fait venir pour Shavouoth 1940 ses parents qui sont toujours à Haguenau, ville qui, contrairement à Strasbourg, n'a pas été évacuée au moment de la "Drôle de guerre". L'invasion allemande les surprend et ses parents vont gagner Limoges où d'autres coreligionnaires et concitoyens sont déjà réfugiés. Démobilisé, il va les rejoindre.
La chorale le jour de la réinauguration de la synagogue de Haguenau (mars 1959). Willy Frank est à droite , Jean-Didier Frank est à côte de lui, portant un béret. Au centre, Oscar Kugler
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A Limoges, il bénéficie de la présence de Maîtres en Tora et, par ses liens avec le PSIL créé par le rabbin Deutsch, il est en contact avec ceux qui seront les futurs dirigeants communautaires d'après-guerre.
Il s'engage à l'OSE et parcourt la campagne pour suivre médicalement et spirituellement des enfants cachés chez des paysans. Pour ce faire, il doit mémoriser leurs noms et adresses par cœur, afin de ne pas compromettre leur sécurité. Il accompagne fréquemment le mohel Isi Werheimer lorsque ce dernier va effectuer une circoncision. Il assure également la fonction d'aumônier pour des camps de prisonniers. Il aura l'occasion de visiter les camps de Haute-Garonne où il retrouvera des membres de sa famille, originaires du Palatinat (camp de Noé, Gurs, …).
Remobilisé en 1944, il participe avec le Service de Santé à la poursuite de la guerre dans l'Est de la France et ce, jusqu'à l'armistice.
La Communauté est à reconstruire. Tant sur le plan matériel que sur le plan spirituel. Il participe ainsi à la reconstruction de la synagogue et de la maison communautaire, mais reconstitue également le chœur communautaire qu'il dirige d'une main de maître. Il transmet également son savoir à M. Oscar Kugler, qui a pris la succession du 'hazan Raas au sortir de la guerre. Lui-même, tant que sa santé le lui permettra, seconde le ‘hazan et, de nombreuses années durant, célébrera l'office de Min'ha de Kippour de sa voix chaude et puissante.
L'avenir de la Communauté passant par l'étude, il organise dès son retour à Haguenau un Talmud Torah pour les jeunes où il enseignera lui-même ainsi que celle qui deviendra son épouse et lance également le cercle des Jeunes Ménages, afin d'apporter la connaissance du judaïsme non seulement aux enfants, mais également à leurs parents.
Proche du grand rabbin Joseph BLOCH, il seconde celui-ci en révisant les épreuves de la traduction en français de la Tefilath Yoseph, la Tefila Bloch bien connue, qui paraîtra en 1963.
Administrateur dès 1946, vice-président de la Communauté en 1962, Président de la Confrérie "Am Segouloh", membre de différents comités de la Communauté, il est également très présent et estimé dans la cité où, en tant que médecin puis en tant qu’administrateur des Hospices Civils, en tant que représentant de la Communauté israélite et à divers autres titres, il déploie ses compétences avec un grand dévouement.
La maison Frank dispose d’une cour, en quelque sorte un petit centre communautaire, où les parties de ballon se disputent aux tournois de ping-pong ! Mais, lorsque Willy Frank apparaît à la fenêtre du premier étage, les jeux s’arrêtent car il s’agit alors, pour son fils ou pour Jacky Dreyfus (futur grand rabbin de Colmar et du Haut-Rhin) d’apprendre qui une Haphtara, qui des Kinoth pour Tichea Beav ou des Seli’hoth. Haguenau devient ainsi une communauté où la relève des "anciens" s’organise et l’on peut entendre des jeunes, âgés de 16 ans à peine, faire les Seli’hoth.
Son dernier enseignement fut, durant l’été 1967, l'office de Min'ha de Kippour à Jacky Dreyfus et celui de Sha’harith de Rosh Hashana à son fils. Pressentiment dans la distribution des enseignements ?
Il s’est éteint le 6 Tichri 5728 (10 octobre 1967)