Puis ce sera le Séminaire israélite de France, à Paris, dans la section Pédagogie et Liturgie. Avec une dizaine de camarades, il mène une double scolarité, mêlant les études secondaires et cette spécialité pédagogique, musicale et liturgique.
Au milieu des années 50, il débute comme ministre officiant stagiaire à la synagogue de la Victoire (Paris), et grimpe les échelons de cette profession avant de rejoindre Strasbourg dix ans plus tard, qu'il ne quittera plus. "J'ai un souvenir très fort de Marcel Lorand, qui était alors ministre officiant, et qui m'a tant appris".
Ce sacerdoce qu'il affectionne sera accompagné de décennies passées à enseigner la musique à l'école Aquiba, la liturgie au Talmud Torah du Quai Branly, comme à préparer des enfants à la bar-mitsva.
Egalement connu des auditeurs pour les émissions religieuses qu'il anime sur Radio Judaïca et sur Radio France Alsace, il est intarissable sur les hommes qui l'ont marqué : Joseph Borin, Bertrand Joseph, Marcel Lorand.
Lors de l'office célébré en la synagogue pour son départ en retraite en juin 1999, René Jasner a beaucoup chanté, seul et accompagné par le choeur. Un moment émouvant fut celui où son fils aîné, Gilles, chanta avec lui. Débordant de projets, il se réjouit aussi de pouvoir profiter de ses cinq enfants (dont trois vivent en Israël) et de ses petits-enfants.
Il est décédé 18 septembre 2020, à Jérusalem en Israël.
SEDER DE PESSAH chanté et commenté par R. Jasner |
LEKHA DODI (chant du Shabath) par R. Jasner et la chorale Le Chant Sacré |
LEKHA DODI des trois semaines séparant le 17 tamouz du 9 av par R. Jasner |
OUNESSANE TOKEF chanté par R. Jasner |
PRIERES DU SOIR : Borekhou, Hou ma'avir Yom, Venismakh, Shema Israël chantées par R. Jasner et la chorale Le Chant Sacré |
MI KEMOKHO MALKHOUSSKHO chanté par R. Jasner et la chorale Le Chant Sacré |
Marcel Lorand et René Jasner lors du tournage des émissions sur le Judaïsme alsacien pour la Source de vie. © Michel Rothe 1982 |
Chaque année, le Kol Nidrei inaugure les vingt-cinq heures de la journée de Kippour dans nos synagogues toutes revêtues de blanc. Comment expliquer, s’interroge André Neher, que ce texte écrit en araméen, archaïque, hermétique et semblant taillé dans le roc de l’incompréhensible puisse ce soir-là, être accueilli dans le cœur de chaque juif, comme s’il avait été écrit à sa mesure, pour sa personne, pour son instant, et pour sa "revenance", sa techouva, au sein de la communauté, même si, durant toute l’année, il s’en est tenu écarté, voire séparé ? Comment en effet expliquer cette étrange puissance de conservation, comme si toute une spiritualité qu’on perd au fil du quotidien pouvait s’y rassembler et s’y blottir à l’état léthargique à notre propre insu, et sommeiller…mais avec la possibilité de s’y réveiller le soir du Grand Pardon, et emplir notre âme tout entière ?
Tous ceux et celles qui, quel que soit leur niveau de religiosité, ont prié avec M. René Jasner sous la grande "nef" de la synagogue de la Paix, savent qu’ils doivent une part de cette "revenance", à cette ferveur intense qu’il nous communiquait, lorsque, accompagné de M. Jacky Ouaknine, et de la Chorale, il entamait cette mélodie trois fois répétée et allant en crescendo. Le dépouillement avec lequel il s’adressait à D., symbolisé par le recours au kittel, l’habit mortuaire ou "sargueness", dont il était vêtu, contrastait avec celle de la magnificence de notre "choule" mais remuait encore plus le kahal jusqu’au plus profond des cœurs. N’était-ce pas ainsi qu’il résumait récemment dans un témoignage, diffusé par le site Akadem, les termes de la mission du Ministre officiant que lui avait transmis M. Léon Algazi ? Je le cite : "Prier avec sa "nechomau" et, en tant que "Shalia’h tsibour", représenter la communauté devant le Créateur". C’est ainsi qu’il officiait durant l’office de Moussaf, lors de l’évocation du "‘avodah", où, à l’instar du Cohen gadol, du Grand prêtre, qui entrait dans le Saint des saints, il se tenait, seul devant Hashem. Il vivait tant ce rôle du dedans, et sa prière atteignait parfois un tel degré paroxystique tel, qu’il n’était à cet instant plus seulement le représentant des fidèles présents, ni même de sa Communauté de Strasbourg, mais de toute la communauté d’Israël, la "Knesseth Israël", dans son intégralité, en tant que "moi" mystique, en particulier lors de la prosternation, dans la prière du "Oleinou". Une prière qui appelle avec force le jour où "tout genou fléchira devant D., où toute idolâtrie aura disparu de la terre, où le Monde sera affermi dans le Royaume de D.". Qui parmi nous, ne pouvait pas ne pas ressentir l’émotion de vérité qui engageait son corps tout entier, pourtant presque dissimulé par l’almémor du regard des fidèles. Qui ne se souvient pas également de la dextérité avec laquelle, nos chers bedeaux, M. Marc Berros et M. Nissim Serfaty le relevaient prestement, sous les yeux curieux des enfants (mais pas seulement…), captivés par cet impressionnant rituel, dernière image, pour beaucoup de fidèles de ce Yom kippour, avant leur retour à l’évocation des morts, et à la Neïlah.
Loin de nous, de vouloir limiter notre cher René Jasner à sa seule présence les Jours Redoutables, bien qu’il soit si symbolique qu’il ait quitté ce monde la veille-même de Rosh Hashana ! Lui-même nous répétait souvent un principe que le grand rabbin Schilli lui avait enseigné, et sur lequel il n’avait jamais transigé : à savoir être capable de célébrer l’office de minh’a de semaine, avec autant de "kavanah", d’orientation vers D., que le même office, le jour de Kippour. Encore une fois, pour lui, quelle que fut l’occasion, lorsqu’il conduisait la prière, il renouait à travers le nombre, le minyan, que ce fut au Mercaz, ou bien chez des endeuillés, avec la communauté d’Israël dispersée dans l’espace et le temps et, à travers cette unité, avec l’Unité la plus haute.
Son empathie légendaire pour ses élèves de l’Ecole Aquiba et du Talmud Torah, et en particulier pour ses élèves qu’il accompagnait à la Torah, murmurant tout près du "bar mitzwa yingle" sa "parscho" dans un même souffle, tel le prophète Elicha et l’enfant de la Shounamit "bouche sur sa bouche, yeux sur ses yeux, paumes sur ses paumes ". Ses "Mi-shébera'h" toujours chaleureux pour les membres de la communauté venus pour "Schnodder" les jours de fête, que leur judaïsme soit engagé ou "évasif" , sa gentillesse avec laquelle il accueillait les jeunes mariés et leur chantait les "shéva bera'hoth" sous le dais nuptial, ses émissions liturgiques sur Radio Judaica du vendredi après-midi, rendez-vous incontournable des amateurs de 'hazanouth, son humour, quasi juvénile, avec lequel il parlait de sa communauté, en particulier lors de ses "revues" humoristiques aux kidoushim communautaires, comme auprès des pensionnaires de l’Hospice Eliza échangeant ses bons mots dits en Yédisch-Daïtsch ravissaient les "Anciens", et même les éventuels "Qahal’s rags’n" de son auditoire…
Qui dira enfin sa généreuse hospitalité envers les jeunes et les moins jeunes, qu’avec sa regrettée épouse Jacqueline za"l il recevait chez lui ? Ce ne sont, sous ces lignes écrites dans la hâte de cette veille de Kippour, que quelques exemples du dévouement avec lequel René Jasner servit notre communauté, accompagna les grands rabbins et les présidents du consistoire et de la Communauté de ses conseils toujours avisés, collaborant avec son administration et ses institutions en véritable animateur communautaire qu’il fut, et qui lui firent mériter le titre de "’Haver".
D’autres sauront, mieux que moi, relater la carrière de celui qui, après avoir retrouvé à Strasbourg l’illustre Joseph Borin qu’il admirait tant, assista comme second ministre officiant Marcel Lorand qui aura exercé sur lui une profonde influence, et grâce auquel il deviendra, lui aussi, au fil des années, l’un des plus réputés 'hazanim en France. Ses collègues, ministres officiant, comme les choristes, rappelleront son investissement dans la Chorale "Le Chant Sacré" qu’il conduisit plusieurs années durant, et son souci de conserver scrupuleusement la tradition liturgique locale, les piyoutim des shabatoth spéciaux, tel le Cheney zèysim qu’il chantait sur un air martial le Shabath de Hanouka, mais aussi ceux de Simhath Torah, entonnés, dans un duo toujours épique, avec notre cher Jacky Ouaknine autour de l’almemor. Les anciens présidents et directeurs de l’Ecole Aquiba témoigneront enfin de l’influence pérenne qu’il y laissa auprès de générations d’élèves et de professeurs.
René Jasner za"l a quitté Strasbourg, il y a quelques années, avec sa chère épouse Françoise, pour retrouver en Israël une partie de ses enfants et petits-enfants, les autres étant restés à Paris et à Marseille. Il y retrouva ses anciens élèves et ses nombreux amis. Vivant à Jérusalem, sans regrets et sans nostalgie, comme un Sage qui pensait sûrement encore à sa communauté et à "sa" synagogue, il fut soudain frappé par une longue maladie qui bouleversa sa paisible retraite. Il fut entouré et accompagné avec beaucoup d’abnégation par Françoise, vers laquelle vont nos pensées, comme par ses enfants. Enfant de la Guerre, Pupille de la Nation, envoyé très jeune au Séminaire Israélite de France par sa famille après avoir grandi dans la pieuse communauté de Sarreguemines, puis, après avoir exercé à la synagogue de la Victoire à Paris, entrepris sa brillante carrière à Strasbourg, il nous aura montré ce que peut accomplir, dans l’adversité, un "baal émounoh", un homme de croyance, de conscience, et pour tout dire, un Ami, un vrai, toujours prêt à aider son prochain. Or dans ce monde où, pour les raisons que nous savons, la préservation de soi est devenue aujourd’hui l’impératif numéro Un, ce titre n’est pas des moindres.
Son "dernier Kol Nidrei" ? Non pas. Nous sommes convaincus qu’il se tient ce soir, là-haut, devant Hashem, où il continuera, comme "melitz yochèr", comme défenseur fidèle, à plaider pour sa communauté le pardon, l’expiation, et la bénédiction de nous voir tous et toutes scellés dans le Livre de la Vie.
Qui n'a pas été bouleversé par l'annonce du décès de notre cher René (ז"ל), alors même que nous nous apprêtions à nous séparer d'une année 5780, éprouvante à bien des égards.
Car avec le départ de René (rit c'est bien plus que le 'Hazan légendaire de la grande Schule qui nous quitte. C'est un morceau de notre Communauté qui s'en va. Lui qui durant sa remarquable carrière, comme 'Hazan, professeur de musique ou tout simplement comme animateur communautaire, ne laissa personne indiffèrent.
Car René (ז"ל) était avant tout, pour beaucoup, un ami. Le verbe haut, l'humour décapant et ravageur, le regard pétillant, le cœur généreux et débordant, René (ז"ל) aimait les gens. Et le croiser était toujours l'occasion d'un échange sympathique et chaleureux.
A titre personnel, René (ז"ל) m'a bien sûr enseigné ma paracha de bar mitsvah, mais bien plus que cela, il m'a transmis son amour de la liturgie rhénane. Nul n'avait son pareil pour former les élèves.
Ses enregistrements sur cassettes audio (les plus jeunes se demanderont de quoi je parle) précédés de son truculent compte à rebours, resteront gravés dans ma mémoire. Et bien entendu sa généreuse table du Shabath et de Yom Tov où il aimait recevoir avec sa chère Jacqueline (ז"ל), surprenant toujours ses invités avec son merveilleux schnaps servi dans une bouteille estampillée "produit toxique" et qui produisait toujours son effet.
Son amour d'Israël aura eu raison de son attachement indéfectible à la Communauté strasbourgeoise, se rapprochant ainsi d'une partie de ses enfants et de ses amis déjà installés dans le quartier alsacien de Jérusalem, l'incontournable "Katamon Hayeshana".
A ses enfants, à son épouse Françoise qui l'a si bien entouré et accompagné durant la maladie, je veux dire toute mon affection et mes vœux de prompte Nehama.
יחי זכרו ברוך
Très chers Gilles,Alain, Judith,Sabine et David
C’est avec tristesse et émotion que j’ai appris la nouvelle du décès de votre papa, זיל en cette veille de ראש השנה.
Je le savais souffrant mais on a du mal à imaginer le pire et on espère toujours.. et j’ai un regret à formuler, n’avoir pas pu lui rendre visite en Israël. Je l’ai heureusement vu à Netanya, il n’y a pas longtemps, avec Françoise et Judith.
Hashem l’a rappelé à lui et que son âme repose en paix et prie pour tous les siens, אמן
J’ai connu René, זיל, dès mon arrivée à Strasbourg après la guerre des Six jours, tout d’abord en sa qualité de ministre officiant à la grande synagogue et puis et surtout à Aquiba pendant de très nombreuses années.
Aux offices nous apprécions tous sa prestance, sa voix, son charme, son charisme et que dire de son מלא רחמים.. et de son allure majestueuse dans certaines manifestations communautaires.
A Aquiba , nous avions bien sympathisé et j’avais plaisir à discuter, à échanger avec lui de choses et d’autres et puis comment ne pas se rappeler :
- ses prestations au Primaire Aquiba , tous les matins , où il s’annonçait allègrement dès son arrivée à l’école
- sa disponibilité pleine et totale pour les manifestations à l’école où il nous enchantait avec ses revues qui visaient justement les récipiendaires avec beaucoup d’humour, de doigté et de finesse: on s’esclaffait ! Il était unique en son genre, un véritable artiste.
- son enseignement d’éducation musicale au Collège Aquiba pendant quelques années assuré avec dévouement et conviction
- ses conseils judicieux qu’il me réservait en ma qualité de chef d’établissement , au point qu’il était un de mes plus proches conseillers, à la sécurité, à la gestion des élèves, à la relation avec les autorités... J’avais vraiment plaisir à l’accueillir dans mon bureau et il le savait si bien qu’il se permettait de me contacter directement en court circuitant le secrétariat.
- sa Présence à l’école due à sa personnalité et à son amour pour les jeunes.
C’est grâce à votre père, זיל ,comment l’oublier, que j’ai su pouvoir écrire des poèmes!
En effet cela remonte à l’arrivée de Catherine Trautman en qualité de maire de Strasbourg et au pot d’adieu que nous organisions pour Norbert Engel qui quittait l’enseignement e la philosophie pour rejoindre la maire en sa qualité d’adjoint.
Je comptais sur votre père pour ce pot de départ mais voilà qu’il avait un concert à Metz et il fallait donc le remplacer.
Je n’ai pas trouvé de candidat et donc me voici contraint de remplacer René. Et c’est là, vu que je connaissais assez bien Norbert, que j’ai décidé de prendre l’initiative d’écrire un poème. Je le dois à votre père, זיל . Depuis j’en ai fait plusieurs, dont l’un dédié à votre père que je vous enverrai plus tard.
Et puis me concernant , votre père, זיל, a été l’excellent animateur de la soirée de mon départ de Aquiba, le 25 septembre 2005.
René Jasner a été pour moi un ami, un collègue, un conseiller, un artiste et nous nous estimions mutuellement.
Aujourd’hui, il reste les souvenirs, les très bons souvenirs et vous savez mieux que quiconque les nombreux rôles que votre père, זיל, a joués avec dévouement, passion, abnégation et toujours dans la שמחה et la joie de vivre qu’il partageait avec votre chère maman, זיל.
Sachez vous en inspirer et qu’il puisse être un guide pour vous et vos enfants.
René Jasner était une personnalité hors norme de la communauté de Strasbourg, connu et apprécié de tous ceux qui l’ont côtoyé, approché et il aura indiscutablement marqué la C.I.S pendant des dizaines d’années par sa Voix, ses Revues, sa forte Présence..
Il savait nous faire rire et aujourd’hui nous pleurons.
Je suis de tout cœur avec vous, je partage votre douleur car j’ai perdu un très bon ami avec lequel j’ai beaucoup partagé pendant les 34 années à Aquiba, en toute complicité.
Ma femme et mes enfants se joignent à moi pour vous présenter nos condoléances émues et notre sympathie attristée.
נפשו צרורה בנצור החיים
Quelques heures avant Rosh Hashana m'est parvenue la terrible nouvelle du décès de M. René Jasner זיל. Combien de souvenirs ont alors défilé dans ma mémoire, notamment la préparation des grandes fêtes, que l'on surnommait amicalement les grandes manœuvres.
Je serai à jamais reconnaissant envers René זיל, collègue mais surtout ami et complice des bons comme des mauvais moments, de m'avoir initié à la 'hazanouth locale ainsi que tant d'autres élèves actuellement en exercice.
René Jasner était l'incarnation de la jovialité sa table était célèbre à Strasbourg ! Nous avons partagé des repas que je n'hésiterai pas à qualifier de pantagruéliques tant sa table était abondante, avec la complicité de son épouse Jacqueline זיל et également avec Françoise.
René fut aussi un grand formateur combien de bar mitsvah a-t-il formé, devenus aujourd'hui des adultes et pères de famille qui se rappellent encore de ses cours et de sa bonne humeur. Je n'oublie pas non plus les élèves de l'école Aquiba qui peuvent témoigner de sa culture liturgique et musicale.
René זיל nous a quittés juste au moment où sa voix exceptionnelle aurait dû vibrer dans les Synagogues en ces jours de Roch Hachana et de Yom Kippour, fêtes redoutables qu'il appréhendait de par la responsabilité qui lui incombait en tant que 'hazan (ministre officiant).
A Gilles, Alain, Sabine, Judith et David, je voudrais exprimer ici toute mon affection dans cette douloureuse épreuve, et à Françoise, lui adresser un énorme bon courage et l'assurer de ma sincère amitié.
Gmar Hativa Tova
Hommage du Rabbin David Lilti
Commémoration du mois de la disparition de René Jasner par l'intermédiaire de Zoom Dimanche 18 octobre 2020 |
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