Durmenach est, jusqu'au milieu du 19ème siècle, une des communautés les plus
importantes du Haut-Rhin, le nombre des juifs dépassant celui des habitants chrétiens. Des
émeutes antijuives y ont éclaté en 1789 et 1848. La synagogue, bâtie en 1803, a brûlé
vers 1970. Une salle des fêtes a été construite à sa place.
La communauté a été siège d'un rabbinat de la fin du 18ème siècle jusqu'en 1910. Elle a totalement disparu aujourd'hui. |
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les premières communautés juives d'Alsace se sont formées autour de l'an mille.
Entre le 12ème et le 13ème siècle, les juifs habitaient de nombreuses villes ou bourgs d'Alsace : Strasbourg, Mulhouse, Colmar, Haguenau, Wissembourg, Rosheim, Saverne, Marmoutier, Benfeld, Westhoffen, Ribeauvillé, Jungholtz, Rouffach, Sierentz, Ensisheim, Thann...
L'épidémie de la Peste Noire débuta en 1347 et pendant trois ans provoqua à mort de vingt-cinq millions de personnes. L'on raconta que cette mortalité venait des juifs qui jetaient venins et poisons dans les puits. En 1349, une Assemblée décida l'extermination des juifs. On retrouve des massacres à Strasbourg, à Sélestat, à Colmar, Molsheim, Mulhouse (1)...
Les survivants trouvèrent refuge dans quelques rares villages et bourgs d’Alsace, dans la vallée du Rhin, en Allemagne et jusqu'à la Pologne. Le judaïsme d'Alsace, d'urbain qu'il était, devint rural si l'on excepte la ville d’Haguenau.
A l’âge de l'Humanisme et de la Réforme, le judaïsme d'Alsace se trouva ramené à une centaine de familles. Au milieu de tous ces juifs en butte à toutes les humiliations se dressa Rabbi Joseph ben Gershom, plus connu sous le nom de Josselmann de Rosheim, qui défendit les juifs d'Alsace jusque devant l'empereur Charles-Quint pour obtenir l'annulation des ordres d'expulsion des villes impériales d'Obernai, Rosheim et Kaysersberg (2).
C'est entre le 15ème et le 18ème siècle que les juifs bannis de Bâle et de Mulhouse s'établirent dans le Sundgau. Ils constituèrent d'importantes communautés notamment à Hégenheim (vingt-neuf familles en 1716, soixante-trois en 1766) et quatre cent neuf juifs en 1784 soit la troisième communauté d'Alsace après Bischheim et Wintzenheim.
Le traité de Westphalie de 1848 donna l'Alsace à la France à l'exception de Strasbourg qui ne se soumettra qu'en 1681, et de Mulhouse qui appartenait à la Confédération helvétique.
Pour inciter à la prospérité d'une province dépeuplée par un siècle de guerre, les Français firent appel à l'immigration. Ces nouveaux arrivants venaient des régions proches : l'Alsace, le pays de Bade, et la Suisse mais aussi la Savoie et l'Italie.
La population juive de Durmenach passa de dix familles en 1732 à quarante-trois familles en 1766. Il y avait plus de juifs que de catholiques en 1781 (trois cent neuf juifs pour deux cent soixante catholiques). Cette progression s'expliquait en partie par des raisons politiques et économiques. Des juifs colporteurs, marchands de bestiaux ou regrattiers, intermédiaires auprès des armées ou des prêteurs d'argent, se procurèrent un droit de résidence accordé par les pouvoirs en place, la famille des Flachslanden à Durmenach. Le développement démographique et économique allait donc de pair avec l'essor de la communauté juive de la cité.
À la fin de l'Ancien Régime, les juifs d'Alsace étaient au nombre de vingt mille personnes environ soit 3% de la population totale (624 000 habitants). Mais cette population représentait 50% du judaïsme français. L'interdiction de séjour dans la plupart des centres urbains notamment à Strasbourg et à Colmar avait été maintenue, d'où une population surtout rurale que l'on trouvait répartie entre cent soixante des mille villages alsaciens.
La répartition était inégale sur le territoire alsacien. En 1784, la BasseAlsace accueillait 74 % de la population juive disséminée dans cent vingt neuf localités contre 26 % et cinquante quatre localités en Haute Alsace.
En 1781, Durmenach avait une population de cinq cent soixante neuf personnes. Le village avait trois cent neuf juifs soit plus de 54 % de la population totale.
Le Dénombrement de 1784 énumérait trois mille neuf cent treize familles soit 19707 personnes de tous les âges réparties dans 180 localités, la plupart rurales. Il faisait apparaître soixante quatre familles habitant Durmenach soit trois cent quarante personnes. C'était la cinquième communauté juive d'Alsace après Bischheim (473 juifs), Wintzenheim (430), Hégenheim (409) et Hagenthal-le-Bas (356) devant Zillisheim (332 juifs), Bergheim (327) et Haguenau (325 juifs). Il y avait quatre maîtres d'école (Judel Franck, Nathan Blüem, Isaac Lévy et Kiffa Meyer), deux chantres (Isaac Simon et Isaac Salomon) et deux familles pauvres. À titre de comparaison à Bischheim pour une communauté de 473 individus, il y avait quatre maîtres d'école, quatre rabbins, un chantre et vingt pauvres.
À côté d'une majorité besogneuse vivant pour la plupart modestement du commerce des ruminants, du colportage, du prêt d'argent et de la friperie existait une minorité de juifs dynamiques aisés et influents. Le "préposé" ou chef de cette communauté était Judel Bluem. Alexandre Hauser était un important bailleur de fonds, préposé de la communauté juive de Durmenach en 1766, qui en 1784 apparaissait au deuxième rang du Dénombrement.
L'état des finances du royaume contraignit le roi Louis XVI à convoquer les Etats Généraux pour le 27 avril 1789.
Les juifs d'Alsace obtinrent la permission de réunir un certain nombre de notables pour rédiger des doléances qui seraient présentées à Versailles par l'abbé Grégoire connu pour leur être favorable. Ce cahier de doléances fut élaboré entre le 19 et le 25 mai 1789, au domicile privé de Max Berr, par trente sept délégués venus de toute la province à Strasbourg dont cinq de Bischheim et trois de Durmenach : Judel Bluem "préposé " dans le Dénombrement de 1784, Salomon Wahl, et Isaac Wahl (3). Ces doléances témoignent d'un côté à l'aspiration des juifs à la liberté de circulation et de culte, à l'égalité fiscale et professionnelle et de l'autre au maintien d'une spécificité cultuelle (maintien des syndics, préposés et rabbins).
Comme dans tout le reste du pays, des troubles agraires se produisirent en Alsace à la nouvelle de la prise de la Bastille le 14 juillet 1789.
À la fin de ce mois, les paysans du Sundgau s'attaquèrent aux abbayes et aux châteaux. Mais ils s'en prirent aussi aux juifs de Durmenach, Hagenthal et Hegenheim, Rixheim et Sierentz. Des maisons furent pillées et détruites. Les paysans enlevèrent aux juifs leurs titres de créances qu'ils brûlèrent et s'emparèrent de l'argent qui leur tombait sous la main. Plus de sept cents juifs durent s'enfuir à Bâle, d'autres trouvèrent refuge à Mulhouse et dans leur famille de Basse Alsace.
Un témoin oculaire se rendant de Durmenach à Bâle nous a laissé une description d'une bande assez nombreuse de pilleurs :
Mais l'Assemblée Constituante adopta le décret du 27 septembre 1791 qui donnait l'égalité civile aux juifs alsaciens et lorrains. En affranchissant ses juifs, la France émancipait du même coup ceux de Durmenach qui avaient désormais les mêmes droits et les mêmes devoirs que leurs voisins chrétiens.
L'année 1848 fut nourrie en France par plusieurs crises.
En Alsace, la situation n'était pas meilleure. Les récoltes de 1844 et 1845 avaient été mauvaises. Les années suivantes la situation empira. On ne pouvait pas s'approvisionner en Allemagne où la situation était identique ni même dans le Midi à cause des frais de transport (5). La misère grandit aussi bien dans les centres urbains qu'à la campagne. La crise alimentaire fut durement ressentie, région de densité rurale forte, avec un crédit peu développé.
Dans ce contexte, des troubles sous forme d'émeutes touchèrent aussi bien le Bas-Rhin (Brumath, Marmoutier) que le Haut-Rhin. Des bandes de paysans incendièrent des maisons juives à Hagenthal, Blotzheim, Hégenheim et Seppois-le-Bas. Le 22 février, la synagogue et des habitations juives furent pillées à Altkirch. Mais ce fut surtout Durmenach qui fut le théâtre d'émeutes très violentes durant plusieurs jours du 28 février au 2 mars 1848. La population combattit la garde nationale juive chargée par le maire, Aaron Meyer, de défendre la communauté juive. Plus de soixante quinze maisons juives furent pillées et détruites. Le curé du village donna asile aux juifs trop âgés pour fuir et préserva leurs biens, et ce malgré la foule en colère qui assiégeait sa maison. La plupart des juifs du village, avant tout les femmes et les enfants, s'enfuirent dans les communes environnantes suisses de Rodersdorf, de Metzerlen, d'Allschwil et de Bâle (6). Le maire et les membres juifs du conseil municipal prirent aussi la fuite.
Sur Durmenach, nous avons plusieurs témoignages. Nous possédons une lettre écrite en yiddish alsacien d'un témoin du "Juderumpel", Seligmann, fils de Nathan Brunschwig habitant Durmenach (7). Voici, en traduction française le passage se rapportant aux événements :
Nous avons encore la description du Maire de Bouxwiller au représentant du Commissaire de la République soulignant bien la dévastation violente exécutée par des habitants des communes voisines :
Ces scènes de pillage (11) de Durmenach ont également été lithographiées dans une période où la censure était en retrait. La première image sans titre montre que jeunes et vieux, femmes et hommes en costume sundgauvien, se lancent à l'assaut du village. Sur chaque toit, un homme, ou deux en blouse bleue armé d'un gourdin fait sauter les tuiles. Dans la première maison, deux hommes se servent d'une hache, un troisième, lance par la fenêtre un double tiroir vide. Un quatrième homme charge un autre pilleur d'un matelas. Le vandalisme est général et l'église de Durmenach offre par contraste une impression de calme. Le pillage accompagne le vandalisme : le mobilier et les matelas sont chargés sur une charrette au premier plan à droite, des barriques de vin sont entassées dans des brouettes, des femmes portent un baquet sur la tête. Au premier plan à gauche, une femme âgée voûtée se promène avec une canne dans la main droite et un rouet dans la main gauche.
Il s'agit aussi de s'attaquer au judaïsme dans ce qu'il a de plus sacré, le Livre. Au premier plan au centre, un homme en costume sundgauvien avec des lunettes marche tenant un livre à la main sous le regard amusé d'un porteur de massue. En effet, à côté des maisons, les populations de la vallée de l'Ill s'en prirent à la synagogue qui fut profanée, des rouleaux de la Loi furent lacérés. Le dessinateur affirme la catholicité de Durmenach à majorité juive.
Enfin trois hommes au premier plan sont à cheval : deux d'entre eux ont un costume de ville, un haut-de-forme et une ceinture tricolore. Il pourrait s'agir des autorités administratives, du sous-préfet. Un gendarme charge seul sabre au clair. Protège-t-il les deux autorités ou annonce-il la répression ? La construction du dessin est ordonnée avec des maisons alignées et l'église au centre du village. Cette gravure exprime une idéologie face aux troubles.
Le deuxième dessin intitulé Juden Rebold von Durmenach 28 Hornung 1848 exprime dans un environnement rural, un vandalisme plus accentué : les poêles sont cassés à la hache au premier plan, une maison s'effondre au second plan. Le pillage est également très marqué avec des maisons remplies de personnes se livrant à des scènes de destruction et de vols. Au centre, des femmes sont groupées autour d'un baquet. L'alcool coule à flot avec un tonneau au premier plan à gauche où plusieurs personnes boivent ou servent du vin. L'individu qui lit la Torha est assis, les pieds posés sur une estrade.
Ces deux gravures expriment un des temps forts de l'antisémitisme en Alsace avec la mise à sac du village de Durmenach du 28 février au 2 mars 1848. Un artiste a composé des scènes variées soulignant la joie, la beuverie et l'idéologie catholique.
Qui avait perpétré ces exactions ? Il se dégage des procès-verbaux que ce sont des hommes et des femmes provenant pour la plupart des classes populaires touchées par la crise économique notamment les journaliers et les travailleurs à domicile. Il semble encore qu'il faille y ajouter de riches paysans et des artisans. Les émeutiers étaient originaires du village ou de communes voisines. Une nouvelle fois, la population juive fut rendue responsable de la situation catastrophique et endossa le rôle du bouc émissaire, rôle dont profitait la classe possédante non-juive qui pouvait détourner d'elle l'attention. L'armée et la garde nationale auraient pu ramener l'ordre tandis que la garde nationale locale formée de non-juifs refusait la plupart du temps de défendre les juifs.
L'année 1848 fut en Alsace et particulièrement à Durmenach un moment fort de l'antisémitisme dans la lignée des émeutes de 1819 Hep Hep contre les juifs allemands avant les pogroms de Russie entre 1881 et 1884 sous le tsar Alexandre III.
Au-delà de cet antijudaïsme, nous soulignerons autour de l'axe de temps 1808-1930 les éléments qui font perdurer la tradition et nous mettrons en valeur les atouts, les forces, et les particularités qui animèrent particulièrement la communauté juive de Durmenach.
La Révolution française, dans sa première phase constitutionnelle, par la Déclaration des Droits de l'homme et le décret d'émancipation des juifs, a privilégié l'intégration de ces derniers. Les juifs de Durmenach n'ont plus de juridiction distincte. Ils doivent faire le service militaire de 20 à 25 ans. Tous les métiers leur sont ouverts. Le libre exercice de leur culte leur est reconnu. Ils peuvent acquérir des immeubles et posséder des terres.
Napoléon 1er s'est intéressé aux juifs. Certaines de ses motivations sont d'ordre militaire. Ses armées ont besoin de négociants pour assurer l'approvisionnement en fourrage, en vivres et en chevaux.
En novembre 1808, lors de la prise patronymique des noms, la population juive de Durmenach s'élevait à quatre vingt quinze familles soit quatre cent quatre vingt sept personnes dont de nombreuses familles: dix sept familles Hauser, treize familles Blum, dix familles Uhlmann, sept familles Franck six familles Lévy et Meyer, cinq familles Bloch et Lang, quatre familles Brunschwig (12).
Les familles juives pratiquaient surtout le commerce de bétail, le colportage et le prêt sur gages. La population catholique du village vivait essentiellement de l'agriculture et de l'artisanat. Les familles nombreuses n'étaient pas rares : deux familles Blum de huit enfants deux familles de sept enfants (les familles Adler et Meyer), sept familles de six enfants (les familles Blum, Ducas, Lang, Léopold, Schreiber et Uhlmann) et douze familles de cinq enfants.
Cette tendance à la baisse à partir de 1848 est à lier aux conséquences directes de l'émeute violente de 1848 à Durmenach avec plus de 100 personnes au total ayant quitté le village puis par la suite à l'attrait des villes, à la diversification des métiers dans la deuxième moitié du 19ème siècle et aux conséquences de la déportation des juifs du village pendant la seconde guerre mondiale. Quinze juifs nés à Durmenach sont morts au camp d'extermination d'Auschwitz.
L'organisation du culte français avait été réglementée par le décret impérial du 15 mars 1808 qui établissait un consistoire central et sept consistoires départementaux dont celui de Wintzenheim (Haut-Rhin). C'était cette assemblée composée de rabbins et de laïcs qui assurait la police du culte et l'administration des biens de la communauté. C'était aussi lui qui accordait aux synagogues le droit d'acheter ou de vendre bâtiments ou immeubles. Une loi du 8 février 1831 mettait à la charge de l'Etat les traitements des rabbins et des ministres officiants des communautés juives les plus importantes. Ce fut seulement à partir de 1853 que l'Etat rétribua le rabbin de Durmenach.
Neuf rabbins ont dirigé la vie spirituelle de la communauté juive de 1788 à 1908 :
Plusieurs ministres officiants ont marqué la vie spirituelle de la synagogue de Durmenach. Citons entre autres, David Heymann de 1827 à 1851 qui eut neuf enfants dont au moins sept sont nés à Durmenach de 1827 à 1849. Nephtali Lévy fut chantre et sacrificateur à Durmenach de 1880 à 1882 et Mathieu Mosbacher exerça la fonction de ministre officiant et sho'heth (sacrificateur) à Durmenach de 1891 à 1922.
Victor Dreyfuss, fut le dernier ministre officiant de Durmenach. Le 17 juillet 1960, Victor et Germaine Dreyfuss eurent l'immense douleur de perdre leur fille unique Arlette, professeur de mathématiques au collège d'Altkirch. L'ensemble des habitants du village de Durmenach, les élèves et professeurs d'Altkirch suivrent le convoi jusqu'au cimetière avec corbillard et chevaux. Pendant des années, des élèves non juifs vinrent se recueillir sur sa tombe.
Une synagogue existait depuis 1803 sur la place du village. Elle souffrit à plusieurs reprises notamment pendant les émeutes de 1848. En 1874, un projet de restauration fut établi. Le Conseil municipal et la communauté juive de Durmenach sollicitèrent l'aide de l'Etat. De généreux donateurs de la communauté juive de Durmenach (notamment les familles Lang, Zivi et Brunschwig) et la contribution de l'Etat permirent sa restauration qui fut effectuée en 1875 par l'ingénieur d'arrondissement Franz Baldaut (16).
Elle servit de cadre aux prières quotidiennes, au Shabath (sabbat), aux fêtes, aux bar mitzva (majorité religieuse) des garçons, aux mariages...
Le samedi, les juifs étaient revêtus de leur costume de fêtes, ils se retrouvaient pour prier avec ferveur dans la "shoule " laissant aux shavès goy (17) la clef de leurs foyers.
La communauté juive disposait au 19ème siècle d'une école de filles et de garçons. L'ancienne école catholique est aménagée en école israélite avec les fonds de la communauté juive. La commune de Durmenach prend seulement en charge le loyer de l'école (18).
Le cimetière juif localisé en lisière de forêt sur les hauteurs du village date probablement de la fin du 18ème siècle car en 1794 il fut interdit aux juifs de Durmenach de continuer à enterrer leurs morts dans le cimetière de Hégenheim (19). Un projet de clôture du cimetière est présenté au conseil municipal en avril 1832, les sépultures ayant été endommagées par des sangliers et des bêtes féroces. Un architecte Frédéric Henry Wagner établit un projet de construction en 1834 pour le mur d'enceinte approuvé et financé par le conseil municipal et par la communauté juive de Durmenach. Ce mur ne sera élevé qu'en 1843 car il n'avait pas l'épaisseur prescrite et les dalles chargées de le recouvrir n'avaient pas les dimensions voulues.
Ce cimetière de plus de trois cent soixante tombes rassemble deux groupes de stèles :
Voir les tombes du cimetière en ligne
Durmenach a possédé une communauté juive riche de plus de trois siècles d'histoire. Tolérée au 18ème siècle, elle sera par la suite le centre d'une vie traditionnelle intense jusqu'au début du 20ème siècle malgré les émeutes violentes de 1848.
À partir du décret d'émancipation, le 27 septembre 1791, les conditions des juifs de Durmenach évoluent vers une intégration dans la société par le biais de l'école, du service militaire et par la participation au Conseil municipal. Les marchands de bestiaux et de chevaux vont longtemps dominer la vie socio-économique des juifs de la localité par l'achat et la vente du menu et du gros bétail.
La vie spirituelle des juifs de Durmenach a longtemps été caractérisée par son dynamisme symbolisé par l'édification d'une synagogue en 1803 et sa restauration en 1875, et par la présence . d'une école juive, d'un rabbinat tout au long du 19ème siècle. Les relations entre les juifs et leurs voisins catholiques sont variables suivant les périodes. Elles prennent la forme de tensions qui dégénèrent en un antijudaïsme latent et violent en 1789 et en 1848. Les rapports peuvent prendre aussi un aspect de cohabitation plus harmonieux.
La communauté juive allait disparaître entièrement à cause de l'exode rural. Le consistoire israélite du Haut-Rhin vendit la synagogue en 1959 à l'association du foyer Saint-Georges inaugurée en 1964. L'édifice fut détruit par un incendie en 1983 et fut reconstruit pour servir de salles de fêtes et de foyer.
Il ne reste plus à l'heure actuel dans le paysage villageois que le cimetière avec plus de trois cent soixante tombes au bout de la rue de la Gendarmerie, et quelques traces de l'ancienne synagogue avec trois murs et une porte et la rue de la synagogue pour commémorer aussi cette ancienne communauté juive.
Mais au-delà des pierres, cette synagogue avait un nom, une vie et un caractère spécifiques. "On ne se souvient que de ce qu'on a vu, fait, senti, pensé à un moment du temps, c'est-àdire que notre mémoire ne se confond pas avec celle des autres. Elle est limitée assez étroitement dans l'espace et dans le temps". La mémoire collective l'est aussi a pu écrire Maurice Halbwachs (24).
Puissent tous ceux qui ont aimé cette synagogue méditer les paroles de l'initiateur de la sociologie de la mémoire.
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