"Lorsque dans une petite salle au premier étage de la rue Kageneck garnie d'une quinzaine d'hommes venus de tous les coins de France, la voix du ministre officiant volontaire se leva, un sentiment tout nouveau s'empara de nous, le sentiment de renouer avec le passé, d'en avoir fini avec ces migrations de tous les jours.
Et quand à la fin de l'office, nousprenions congé l'un de l'autre, nos remerciements allaient à ceux qui, sans attendre qu'une population juive stable se fût rétablie, avaient voulu que le premier minyan présent à Strasbourg pût être l'occasion d'une prière en commun, et qui avaient donné à chacun de nos coreligionnaires arrivant dans notre ville l'occasion de venir rendre grâce à Celui qui nous avait permis d'être les survivants" a pu écrire Maître Edouard Bing en 1945 (1).
Ce témoignage poignant illustre la
situation dans laquelle se trouvaient les Juifs de Strasbourg. D'un côté, la seconde guerre mondiale avait fait des Juifs, des parias voués à l'errance du Juif éternel avec l'exil et la déportation qui leur rappelaient leur précarité et le singulier destin (2).
D'un autre côté, il y avait cette volonté, cette force des Juifs rendant grâce à l'Eternel de renouer avec le passé et de reconstruire une vie spirituelle à Strasbourg autour d'un nouveau
lieu de culte qui répondait mieux aux besoins des fidèles.
Il est vrai que le retour à Strasbourg, le dialogue avec les Alsaciens demeurés ou retournés dans leur région durant l'occupation nazie fut difficile (3). L'ampleur du désastre frappait les esprits au point de se demander s'il fallait reconstruire ou aller ailleurs.
Des communautés juives d'Alsace-Lorraine sous le choc
Après l'ivresse de la victoire totale sur l'Allemagne le 8 mai 1945, le bilan humain apparut dans sa triste réalité. La guerre avait coûté à la France environ 600 000 morts, 200 000 soldats et 400 000 civils dont la moitié moururent en déportation (4). Plus d'un million et demi de prisonniers de guerre dont 10 à 15 000 Juifs avaient été emmenés en Allemagne durant l'été 1940. Ils furent 70 000 à s'évader et en 1945 un million d'hommes regagnèrent péniblement la France. 60 000 sur les 650 000 hommes astreints au Service du Travail Obligatoire à partir de mars 1943, devaient disparaître. Environ 130 000 Alsaciens et 30 000 Mosellans avaient été enrôlés dans la Wehrmacht à partir de 1942. 40 000 de ces " Malgré nous" envoyés sur le front russe furent tués ou portés disparus. Au moins 40 % des 63 000 déportés non-raciaux, surtout des résistants mourront dans des camps de concentration, exécutés, achevés ou morts d'épuisement.
Dans ce contexte, la collectivité juive de France était exsangue. Elle ne comptait plus que 200 000 âmes alors que la collectivité juive atteignait 300 000 personnes en 1939 (5). Elle avait perdu plus d'un tiers de ses effectifs tant en raison des combats, des exécutions, des morts dans les camps d'internement et surtout les déportations. C'est ainsi que le chiffre total des Juifs déportés de France entre le printemps 1942 et l'été 1944 s'élevait à 76 000 dont 2 500 survécurent soit 3 % des partants. Le relèvement institutionnel, économique et démographique apparaissait comme une urgence. Le rôle qui incombait aux organisations juives dans la restructuration de ia communauté juive française était fondamental. Mais ces organisations étaient privées de leurs dirigeants. Les guides spirituels manquaient. Les lieux de culte avaient subi des dommages ou avaient été entièrement détruits. Des communautés entières surtout rurales avaient disparu dans la tourmente (6). La paix retrouvée, l'aspiration majeure semblait bien être de reprendre le cours de la vie normale, là où il avait été abandonné en 1940. Ce qui était vrai des individus l'était aussi de la communauté organisée, conglomérat formé d'organisations de tous les types : cultuelles d'abord, culturelles, caritatives et politiques ensuite (7).
La reconstruction spirituelle et matérielle du judaïsme en Alsace-Lorraine allait être très difficile. Ainsi à Metz sous l'impulsion du président du consistoire de la Moselle, Georges Samuel aidé dans sa tâche par le grand rabbin Nathan Netter, la synagogue de la rue de l'Arsenal, dont l'intérieur avait été endommagé, avait été récupérée dès décembre 1944. Un oratoire de fortune avait été installé dans la maison de refuge et des services religieux y furent célébrés par des soldats américains. Peu à peu la communauté juive se reconstituait sous l'active direction d'Eugène Weil, le président de la communauté de Metz. La grande synagogue et les attenantes étaient en voie de réinstallation. La majeure partie des autres synagogues de la Moselle étaient cependant détruites (Thionville, Sarreguemines, Boulay) des oratoires avaient vu le jours.
Dans le Haut-Rhin, certaines synagogues avaient été complètement détruites. C'était le cas de Grussenheim, Hastatt et Biesheim. D'autres avaient subi de très graves dégâts qui les rendaient provisoirement inutilisables comme à Mulhouse et à Herrlisheim. Les cimetières avaient été très sérieusement endommagés : murs en partie démolis, tombes brisées et renversées (8). Néanmoins, depuis le retour de l'Alsace à la France, les offices religieux purent fonctionner régulièrement dans les deux grandes communautés de Mulhouse et de Colmar.
En effet, la communauté de Colmar, qui avait retrouvé sa synagogue intacte, se regroupa tout de suite autour de l'ancien rabbin de Wintzenheim, le grand rabbin Simon Fuks (1911-2008) qui assura l'intérim du grand rabbin Ernest Weill. Il fut nommé Grand rabbin du Haut-Rhin en 1947 et exercera son mandat jusqu'en 1986 date à laquelle Jacky Dreyfus lui succéda. Il prit une part prépondérante à la reconstruction de la communauté : restauration de la synagogue de Colmar, construction en 1960 du centre communautaire, inauguration du premier bain rituel de l'époque moderne et développement de la vie associative (9).
A Mulhouse, c'est le rabbin Edgar Weill (1920-2004) qui fut le moteur de la restauration de la synagogue avec le président de la commission de reconstruction, Gaston Weill. Elle fut achevée en 1949. Il fut l'une des chevilles ouvrières du centre communautaire et créa notamment le jardin d'enfants qui fut inauguré en 1958. Il fut encore le fondateur et l'animateur d'une association judéo-chrétienne Bible et Culture fondée en 1983.
La renaissance d'une vie juive à Strasbourg (1946-1950)
En 1939, quand éclata la seconde guerre mondiale, il y avait en Alsace environ 30 000 Juifs. Strasbourg en comptait environ 10 000 (9 118 Juifs en 1936 soit 4,75% de la population de la ville). Deux mois après l'intronisation du jeune rabbin de Mulhouse, René Hirschler, comme Grand rabbin du Bas-Rhin, Strasbourg fut évacuée et les membres de la communauté juive se retrouvèrent à Périgueux, à Limoges ou ailleurs. La communauté juive de Strasbourg paya un lourd tribut : près d'un millier de personnes (un dixième des Juifs de Strasbourg) furent fusillées, déportées, moururent de privation ou au combat (10). Tous les rabbins de la ville disparurent soit en exil, soit dans les camps d'extermination. Le rabbin Hirschler mourut de typhus et d'épuisement, le rabbin Runes s'éteignit durant la Drôle de Guerre, le rabbin Victor Marx décéda en 1944 à Périgueux. Le rabbin Brunschwig ne survécut pas à la déportation tout comme Fernand Kaufmann, le premier ministre officiant de la synagogue consistoriale de Strasbourg. Pour les Juifs qui revinrent s'installer à Strasbourg, l'ampleur du désastre était considérable. La synagogue du quai Kléber avait disparu. Elle avait été incendiée le 1er octobre 1940 et rasée par les nazis en 1941 (11).
Le judaïsme rural, déjà en perte de vitesse, reçut un coup fatal. Ce furent les plus anciennes générations qui retournèrent au village, les plus jeunes préférant les villes comme Strasbourg, Colmar et Mulhouse. Le judaïsme alsacien était dorénavant citadin.
Les institutions nécessaires à la vie normale de la communauté juive de Strasbourg furent créées après guerre. Cette relève communautaire fut rendue possible par l'action conjuguée du rabbinat, de la commission administrative et du consistoire israélite de Strasbourg. C'est le rabbin Deutsch (Mulhouse 1902 - Jérusalem 1992) qui fut chargé de cette reconstruction. Il bénéficiait d'un prestige considérable, lui qui après la défaite de 1940, avait retrouvé une partie de la communauté juive de Strasbourg repliée à Limoges pour y fonder en 1943 le Petit Séminaire Israélite. Il fut nommé Grand rabbin à titre intérimaire jusqu'à ce que le décès du grand rabbin René Hirschler fut reconnu officiellement. Il fut installé dans ces nouvelles fonctions par décret en 1947 (12).
À l'action du grand rabbin Deutsch, venaient s'ajouter celle du consistoire et celle de la commission administrative. En septembre 1946 fut élu le Consistoire israélite du Bas-Rhin avec à sa tête Lucien Cromback (1884-1961) qui axa son travail dans trois directions :
Les élections à la commission administrative de Strasbourg en mars 1946 portèrent à la présidence Maître Édouard Bing. Plusieurs commissions de travail furent rapidement constituées. Elles montraient l'ampleur de la tâche qui attendait les responsables que ce soit la commission des finances, celle de la construction, celle du cimetière, celle de l'antisémitisme, celle des offices et de l'enseignement. Les enjeux étaient importants, Parmi les problèmes à régler, se trouvaient celui de la reconstruction de la synagogue consistoriale, celui de l'unité des diverses communautés et celui plus crucial des locaux cultuels.
C'est dans ce contexte que Charles Frey, maire de Strasbourg, René Paira, préfet du Bas-Rhin et le général Raymond Gruss, gouverneur militaire de la place associèrent leurs efforts à ceux des responsables communautaires pour trouver un lieu de culte provisoire et fonctionnel. En 1948, la ville mit à la disposition de la communauté un bâtiment de l'ancien Arsenal, place Broglie, bel édifice de la Renaissance s'élevant dans la cour de l'ancien couvent des Franciscains de Sainte Claire (16). Cet édifice de 600 places, aménagé sur les plans de Lucien Cromback, fut inauguré en mars 1950 marquant véritablement la renaissance spirituelle de la communauté juive de Strasbourg. Le judaïsme strasbourgeois affirmait sa vitalité et son espérance.
Des pourparlers s'engagèrent avec la municipalité de Strasbourg qui aboutirent à un acte d'échange en février 1953 du terrain du quai Kléber contre une superficie équivalente située sur le parc des Contades et donnant avenue de la Paix.
La première pierre de cette synagogue de la Paix fut posée en septembre 1954. Les travaux s'échelonnèrent sur plus de trois ans. La consécration de la synagogue de la Paix sur les plans de l'architecte Claude Meyer-Lévy donna lieu le 23 mars 1958 à une manifestation de haute spiritualité. Elle fut précédée par un dernier office dans la synagogue provisoire place Broglie la veille au soir. Les Tables de la Loi passèrent devant le square de l'ancienne synagogue du quai Kléber où une minute de silence fut observée. Ainsi un pont avait été établi entre la synagogue du quai Kléber, celle de la place Broglie et la synagogue de la Paix. Très différente de l'ancienne synagogue par son style et par sa conception architecturale moderne, la synagogue de la Paix n'était pas seulement un édifice à vocation cultuelle, c'était aussi un centre culturel par la juxtaposition autour des lieux de prières des locaux propres aux activités administratives, éducatives et sociales les plus diverses. Un centre fut aménagé pour la jeunesse, des locaux utilisés pour les mouvements de jeunesse, le Gan, l'école Yehouda Halévy et les associations.
La synagogue de la Paix qui pouvait accueillir plus de 1 600 personnes marquait le retour à la monumentalité. Un emplacement nouveau, un matériau (la pierre naturelle taillée, le béton armé brut et le métal) et un mobilier résolument modernes caractérisaient l'édifice. L'architecte conçut un sobre vaisseau de béton dans la lignée des frères Perret, mais avec une remarquable adaptation du matériau au symbolisme judaïque. La vaste voûte est portée par douze colonnes évoquant les douze tribus d'Israël. Les deux premières encadrent le portail extérieur tout en symbolisant Yakhin et Boaz, les deux colonnes du Temple de Salomon et les dix autres à l'intérieur évoquent les Dix Commandements. La façade principale donnant sur l'avenue de la Paix est composée d'un réseau d'étoiles de David, monumental ouvrage de ferronnerie, à la base duquel en fer également s'ouvre le portail orné par les emblèmes des douze tribus. Au-dessus du portail figure une inscription en hébreu du livre de Zacharie (4:6) "Plus fort que le glaive est mon esprit" (17).
Selon André Neher, cette synagogue était aussi un centre communautaire avec une structure où se côtoyaient les activités sacrées et profanes. Cette "synagogue de la Paix nous offrait la chance inouïe d'espérer pour demain une refonte de l'unité juive disloquée" (18).
L'arrivée et l'accueil des Juifs d'Afrique du Nord à Strasbourg (1960-1963)
La majorité des Juifs n'arriva cependant que dans les années 1960. En effet, une équipe de bénévoles - dont Renée Neher-Bernheim - de la communauté juive de Strasbourg sous l'impulsion du Docteur Joseph Weill, président du consistoire du Bas-Rhin avec à sa tête André Neher, président de la commission d'accueil se mobilisa pour accueillir de nombreux Juifs d'Afrique du Nord dont deux mille Juifs venus d'Algérie entre 1962 et 1963. Leur adaptation fut aussi favorisée par la présence des rabbins Albert Hazan né à Oran et occupant le poste d'aumônier concordataire et nommé rabbin officiellement en avril 1961 et du rabbin Avraham Elbaz, futur rabbin de la synagogue de la Meinau, dernier chef spirituel de Ghardaïa.
La fin de la guerre d'Algérie vit affluer les Juifs séfarades d'Afrique du Nord.
Ainsi en juin 1962 des familles entières, venant du Sud algérien, le Mzab, hommes, femmes et enfants arrivèrent à la gare de Strasbourg venant de Marseille. Ces Juifs étaient souvent des artisans, des cultivateurs et des petits boutiquiers dont il fallait favoriser le reclassement professionnel. Les Juifs d'Algérie, très attachés à la pratique religieuse avaient choisi Strasbourg en raison de la renommée de la communauté israélite. Ils y trouvaient un abattage rituel, des produits casher, des synagogues et des écoles juives. L'école Aquiba accueillit de nombreux élèves à la rentrée des classes en 1962 (235 élèves en 1955 et 450 élèves en 1963 dont 250 élèves de la communauté séfarade). La population séfarade ne cessa de grandir : Cronenbourg, la Meinau, l'Esplanade étaient devenus des sections de la grande communauté. De plus en plus, on sentit le besoin de remplacer le provisoire par du permanent. La communauté aida les fidèles à construire des synagogues. La première fut édifiée à Cronenbourg. Le rabbin Raphaël Perez en sera le chef spirituel, devenant par la suite Grand rabbin de la communauté séfarade de Strasbourg de 1984 à 2005 de l'oratoire Léo Cohn puis à partir de 2000 de la nouvelle synagogue Rambam. En 1985, on construisit la synagogue de la Meinau avec à sa tête le rabbin David Abergel, un homme de conviction et pédagogue. Les différences de mentalités, de traditions, malgré quelques conflits, furent largement compensées par le tempérament chaleureux des nouveaux arrivants. L'intégration fut un succès (19).
Une importante vie juive à Strasbourg
En 1965 on comptait 12 000 Juifs à Strasbourg (4,5% de la population strasbourgeoise). Cet accroissement était dû à la croissance naturelle, à l'immigration en provenance de localités alsaciennes plus petites, à l'immigration en provenance d'Europe centrale, et à l'installation de Juifs venus d'Afrique du Nord.
Strasbourg compte de nos jours une importante communauté juive d'environ 20000 personnes soit environ 4% de la population strasbourgeoise dont 60 % d'ashkénazes et 40 % de séfarades. La ville est dotée de plusieurs synagogues et oratoires dont la vaste synagogue de la Paix et la nouvelle synagogue séfarade Rambam inaugurée en avril 2000. La synagogue de l'Esplanade dirigée par le rabbin Claude Spingarn a été inaugurée en avril 1992. D'autres lieux de culte de quartiers (Etz 'Haïm, oratoire Ami, Adath Israël, Beth Hamidrach, Jeunesse Loubavitch, Chearim, synagogue de la Meinau) montrent la diversité et la richesse d'une collectivité juive. Les Juifs de Strasbourg disposent de plus d'une radio communautaire Radio Judaïca. Ils ont la possibilité ou non de mettre leurs enfants dans une des écoles et des établissements secondaires à vocation juive (l'École Aquiba, le Gan et l'école Yehouda Halévy, le lycée secondaire ORT, le centre Eshel). Ils ont également à leur disposition un hospice pour seniors la maison de retraite de la Fondation Elisa EHPAD (Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes).
Cette communauté est guidée depuis 1987 par le grand rabbin René Gutman qui a succédé au grand rabbin Max Warschawski. Réouven Coriat, quant à lui, est le rabbin de la communauté séfarade de Strasbourg. Claude Heymann, grand rabbin adjoint de Strasbourg, dirige l'oratoire du Merkaz dit "office des jeunes" où les prières sont célébrées par les jeunes selon le rite ashkénaze, sur l'air judéo-alsacien.
Un renforcement des études religieuses semble s'amorcer depuis quelques années autour de nombreux cours d'étude des textes (Torah, Talmud) et de pensée juive proposés aux fidèles à la communauté. Ce nouvel accès à l'étude des Ecritures s'est aussi étendu ces dernières années aux femmes, qui en étaient traditionnellement exclues.
Quant à L'Union Juive Libérale de Strasbourg (UJLS), elle a été créée en 1994. Elle regroupe aujourd'hui 70 familles membres auxquelles s'ajoutent une trentaine de familles sympathisantes. Elle a un lieu de prière et d'études situé rue du Puits à Strasbourg. Cette communauté se rattache à la Fédération du judaïsme libéral francophone (FJLP) qui regroupe deux communautés parisiennes et des communautés de province comme Lyon et Toulouse distincte de l'Union Libérale israélite de France (ULIF) dont la synagogue principale est celle de Copernic et du Mouvement juif libéral de France (MJLF). Ce judaïsme libéral accueille indifféremment les Juifs de tradition orientale ou occidentale. Dans sa liturgie, le judaïsme libéral s'efforce d'assurer la synthèse entre les deux traditions afin d'éviter toute " coupure " entre les uns et les autres. Vis-à-vis de la conversion au judaïsme, que le motif initial en soit ou pas l'accession au mariage, le judaïsme libéral pratique une attitude d'ouverture, en accueillant de façon bienveillante la demande de conversion de celles et ceux qui désirent s'intégrer au peuple juif' (20).
Les Juifs de France, depuis l'époque de Theodor Herzl, étaient le plus souvent indifférents, sinon hostiles au sionisme. L'attachement des Juifs de Strasbourg avec l'État d'Israël depuis sa création en 1948 se renforça surtout à l'époque de la guerre des Six jours de 1967. Plusieurs cadres strasbourgeois montèrent en Israël à l'exemple d'André et Renée Neher et de Lucien Lazare et sa famille.
Andrée et Renée Neher s'arrachèrent à leurs attaches françaises, pour devenir des habitants de Jérusalem. Cette alyah fut ressentie en France et en Israël, comme un symbole. Mais les positions prises par le général de Gaulle aux lendemains de la guerre des Six jours, les affectèrent douloureusement.
En 1968, Lucien Lazare né à Strasbourg en 1924, engagé dans la Résistance puis secrétaire général de la communauté israélite de Strasbourg s'installa en Israël avec sa famille. Il dirigea le lycée municipal René Cassin de Jérusalem. Il est membre de la commission de désignation des Justes des Nations à l'institut Yad Vashem. L'ambiance parmi les Juifs s'est cependant sensiblement dégradée ces dernières années avec le regain d'antisémitisme ce qui pousse un certain nombre de familles surtout des jeunes couples à émigrer en Israël.
Le site internet du judaïsme d'Alsace et de Lorraine renforce le lien entre Israël et les Juifs de la région. Ce site établi à Jérusalem a été créé en 1998 par Michel Rothé, originaire de Mulhouse et Barbara Weill.. Il est un moyen de communication en particulier pour les Juifs de Strasbourg et apporte de nouvelles possibilités de conservation du patrimoine et de la mémoire.
Quelques personnalités
D'autres personnalités ont un itinéraire original :
Conclusion
La communauté juive de Strasbourg s'est relevée après la seconde guerre mondiale. Par l'ancienneté de sa présence, son rôle de centre religieux et l'existence du régime de concordat, Elle est un exemple particulier, mais significatif du judaïsme français. Les institutions créées après 1945 mettent l'accent sur la reconstruction, le renouveau des institutions et un effort consacré notamment à l'éducation juive, contrairement à la tendance qui prévalait avant la guerre.
L'université de Strasbourg a compté en André Neher, l'un des principaux artisars du renouveau du judaïsme en France, en Alsace et à Strasbourg.
La rencontre de deux cultures en 1962 avec la venue des Juifs d'Afrique du Nord allait permettre de mettre en route la notion de la richesse dans la diversité favorisant un renouveau du judaïsme en Alsace et à Strasbourg. La ville se distingue par sa forte participation à la vie religieuse et cultuelle et par son attachement à Israël (31). Malgré une tentation du repli sur soi, au nom d'une tradition religieuse qui s'est renforcée, la diversité qualifie à l'heure actuelle les Juifs de Strasbourg en 2012. Qu'ils soient orthodoxes, libéraux ou assimilés, ashkénazes ou séfarades, pauvres ou riches, cultivés ou moins cultivés, ils occupent une place spécifique, marquée par la tradition et la diversité, dans la ville de Strasbourg d'aujourd'hui.